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"Nous ne sommes pas une compagnie low cost”: Eurostar se défend sur le prix des billets

Une étude de Greenpeace affirme qu'un billet de train, toutes liaisons confondues, coûte en moyenne 2,6 fois plus cher qu'un billet d'avion en France. Un ratio qui monte à 6,7 pour le trajet Marseille-Londres via l'Eurostar.

Prendre le train au lieu de l'avion pour réduire ses émissions de CO2: pourquoi pas mais à quel prix? La question des tarifs des compagnies ferroviaires face à l'aérien est récurrente et épinglée par de nombreux consommateurs et les associations environnementales.

Dans une récente étude, Greenpeace s'est penché sur les liaisons inter-européennes et dresse un bilan peu fameux pour la France.

"Un billet de train, toutes liaisons confondues, coûte en moyenne 2,6 fois plus cher qu'un billet d'avion. Sur 17 des 20 itinéraires analysés depuis la France, l’avion est majoritairement moins cher."
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Toujours selon l'association, le ratio est même de 6,7 pour le prix moyen d'un trajet entre Marseille et Londres avec le train (SNCF et Eurostar) par rapport à l'avion. Des prix (du train en général) qui vont "à contre-courant de l’urgence climatique et de la nécessité de réduire les émissions", raille Greenpeace.

"Nous ne sommes pas une compagnie low cost"

De quoi alimenter les critiques régulières contre les tarifs d'Eurostar, jugés très élevés, notamment en périodes de pointe comme lors des vacances de Noël. Chez la filiale de la SNCF qui opère les trains vers Londres via le Tunnel sous la Manche mais aussi ceux vers la Belgique et les Pays-Bas (ex-Thalys), l'étude de Greenpeace passe mal.

"Nous ne sommes pas une compagnie low cost", répond d'emblée un porte-parole d'Eurostar. En effet, et Greenpeace le précise, les Easyjet et autres Ryanair "exploitent 79% des itinéraires analysés avec une ligne directe".

"Notre concurrent, ce n'est pas l'avion. Eurostar, c'est une liaison de centre-ville à centre-ville, il y a donc un gain de temps très important par rapport à l'avion, notamment à Londres où les aéroports sont loin du centre-ville. Ce qui ajoute des frais de transport", explique le porte-parole.

"Ensuite, il faut prendre en compte tous les frais annexes imposés par les compagnies low cost. Je rappelle que sur Eurostar, les enfants de moins de 4 ans ne payent pas de billet, que l'emport de bagage est gratuit, tout comme le choix de la place. On offre un service qui est très différent, on a une ambition client et il faut prendre le voyage dans sa totalité", poursuit-il.

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"On travaille sur l'offre, le service, le programme de fidélité, l'après-vente, la prise en charge des problèmes", souligne Eurostar, qui fait référence notamment aux récentes pannes et grève qui ont perturbé le réseau fin 2023.

"Même lorsqu'on n'est pas responsable du problème (comme lors de la récente inondation côté anglais, NDLR), on rembourse les billets avec une prime et aussi les frais annexes de restauration ou d'hôtellerie." Manière de se démarquer de l'aérien où cette prise en charge est bien plus aléatoire.

Des prix d'appel bas… mais vite écoulés

Comme pour ceux de la SNCF, le prix des billets d'Eurostar varie en fonction de la date, de la demande, du remplissage. C'est le fameux "yield management". L'opérateur reconnaît donc qu'il peut être cher à certains moments, beaucoup moins si on anticipe son achat. Une pratique qui est de plus en plus forte chez ses clients, précise-t-il.

"Nos prix d'appel n'ont pas changé avec 29 euros pour Bruxelles, 35 pour Amsterdam et 44 pour Londres. On fait des promotions tous les trois mois, on propose une option sur notre application pour repérer le meilleur tarif", souligne Eurostar.

Mais force est de constater que ces petits prix par train sont peu nombreux (impossible d'avoir le chiffre exact) et partent très vite car l'engouement pour Eurostar est fort. Résultats, les augmentations sont rapides.

Eurostar a transporté 18,6 millions de passagers en 2023, en hausse de +22% par rapport à 2022 et de 33% vers Londres, soit quasiment son niveau d'avant Covid. Une vraie satisfaction au regard de la situation de la compagnie après le Covid où elle était au bord de la faillite.

Pas de surenchère pour les Jeux olympiques

Pour les Jeux Olympiques de Paris, Eurostar promet de ne pas jouer la surenchère.

"Les prix maximums n'augmenteront pas, c'est une opportunité pour nous et pour Paris. Nous avons ouvert la billetterie pour les liaisons depuis Londres avec une part de billets bloqués à 49 euros. 25.000 billets au total ont été vendus en quelques heures", précise le porte-parole.

Au global, l'opérateur attend près de deux millions de passagers pour les Jeux de Paris.  Et il transportera dans des trains spéciaux de nombreux athlètes venant des Pays-Bas, de Belgique, d'Allemagne et de Grande-Bretagne.

Enfin, Eurostar met en avant l'augmentation rapide de ses coûts. L'électricité bien sûr mais aussi les péages payés aux gestionnaires des réseaux. La compagnie doit même payer deux fois, par passager et par train, à Getlink, le gestionnaire du tunnel sous la Manche. L'entreprise boucle d'ailleurs 2023 avec un chiffre d'affaires record à 1,1 milliard d'euros et une croissance de 26% pour la seule partie ferroviaire.

Une part de marché de 80% vers Londres

Si, dans l'absolu, prendre l'avion vers Londres depuis la France reste en moyenne moins cher que le train, une chose est néanmoins sûre: le rail reste largement plébiscité puisque la marque Eurostar revendique une part de marché de 80% sur la destination, preuve que les Français n'arbitrent pas uniquement en fonction du prix.

Reste que ces prix ont peut-être vocation à baisser dans les prochaines années avec l'arrivée de concurrents agressifs dans le tunnel. Getlink vise le doublement des liaisons directes à grande vitesse entre l’Europe et le Royaume-Uni d’ici 10 ans. Certains acteurs se sont déjà positionnés.

Mais Eurostar "restera sur sa ligne, on ne cassera pas les prix, on veut être digne de confiance pour nos clients", insiste la compagnie qui mise sur sa valeur ajoutée pour se démarquer.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business