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Annulation de la commande australienne de sous-marins français: quelles compensations?

En annulant pour "convenance" le contrat signé avec le constructeur français Naval Group, le gouvernement australien perd les sommes déjà versées dans le cadre de cette commande mais il va devoir aussi payer une compensation dont le montant va se négocier âprement.

Que va coûter à l’Australie l’annulation de sa commande de sous-marins à la France, quelle compensation va-t-elle devoir verser à Naval Group, le constructeur français à qui la commande avait été passée ?

Impossible pour le moment de répondre précisément à cette question. D’abord du fait de la complexité de cette commande impliquant à la fois Naval Group mais aussi ses sous-traitants australiens. Le dernier contrat signé en 2019 dans le cadre de cette commande prévoyait que 60% de la facture à la charge du contribuable australien profite directement à des entreprises et des travailleurs du pays.

840 millions d'euros déjà payés

Ensuite, parce que le sujet va faire l’objet d’âpres négociations. Une chose est sûre, la facture dépassera le milliard d’euros. Car avant le fameux contrat signé en 2019 et annulé ce mois-ci, le gouvernement australien a déjà eu à régler la facture des deux qui l’ont précédé. Ces contrats déjà honorés sont évalués à 840 millions d’euros.

Reste donc à trouver un accord pour le préjudice subi à la suite de cette annulation. Interrogé sur la perte de chiffre d’affaires qu’elle va générer, le PDG de Naval Group évoque dans Le Figaro, le chiffre de 10% de ses ventes, soit 50 millions d’euros par an.

650 personnes à reclasser

Par ailleurs, au total, 650 personnes rien qu’en France, ont été mobilisées dans le cadre de cette commande. Il va falloir les reclasser. La perte de cette commande oblige par ailleurs l’entreprise à geler ses embauches de cadres et d’ingénieurs. S’ajoute à cela le préjudice en terme d’image auprès de ses clients actuels ou potentiels.

Combien tout cela pourrait coûter à l’Australie? Pour l’heure, le PDG de Naval Group n’avance aucun chiffre. Et il rejette d’un revers de la main les montants évoqués par la presse australienne (400 millions de dollars australiens soit 250 millions d’euros). En revanche, il insiste bien sur la responsabilité pleine et entière du gouvernement australien.

L'Australie a résilié le contrat pour "convenance" selon le terme juridique, ce qui veut dire d'ailleurs que nous ne sommes pas en "faute". C'est un cas qui est prévu dans le contrat et qui donnera lieu notamment à un paiement de nos coûts engagés et à venir, liés à la "démobilisation" physique des infrastructures et informatique ainsi qu'au reclassement des employés."

Un préjudice assez compliqué à évaluer

En clair, ce ne peut être un dédommagement a minima, puisque même des coûts prévus mais non engagés, liés au devenir des sites déjà construits en Australie au frais de Naval Group devront être pris en compte ainsi que toutes les conséquences financières auxquelles va devoir faire face le constructeur français pour assurer un avenir aux salariés mobilisés jusqu’alors sur ce projet. L’évaluation de ce préjudice sera évidemment assez compliquée.

D’ores et déjà, Naval Group en discute sur place avec des experts du gouvernement australien. Une première proposition financière sera faite dans les prochaines semaines. La pression diplomatique et politique exercée par la France jouera évidemment pleinement dans la marge de manœuvre dont disposera l’Australie pour la négocier à la baisse.

Pierre Kupferman
https://twitter.com/PierreKupferman Pierre Kupferman Rédacteur en chef BFM Éco