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Sous-marins: chez les sous-traitants de Naval Group, c'est la stupeur

La résiliation par l'Australie du programme de douze sous-marins a surpris les sous-traitants de Naval Group.

La volte-face australienne sur le "contrat du siècle" n'a pas surpris que Naval Group. Pour les sous-traitants de l'entreprise française, la résiliation par Canberra du programme de douze sous-marins a aussi été une douche froide. "On est face à un mur, avec déjà une vingtaine de personnes inoccupées dès le 1er octobre", regrette le directeur général du groupe Fiva, Serge Boniface, interrogé par France Bleu Cotentin. L'entreprise emploie 140 personnes en France, dont la moitié à Cherbourg, auprès de Naval Group.

Selon le dirigeant, le contrat australien représentait, à terme, "au moins 35% du chiffre d'affaires" de l'entreprise et soixante personnes "devaient se consacrer aux études sur ce projet", notamment des études d'outillage. "Et là, ça s'arrête tout d'un coup", s'inquiète Serge Fiva auprès de la radio locale. "On va mettre tout ce qui est possible à notre niveau pour essayer de replacer notre personnel, nos forces de travail, sur d'autres activités, auprès d'autres clients" mais "avec un tel délai, aussi bref, sans préavis, ça va être très difficile".

Commandes étatiques

L'inquiétude est la même du côté de Jeumont Electric, sous-traitant nordiste de Naval Group installé dans la ville du même nom, près de Maubeuge, explique France Bleu Nord. L'entreprise avait été chargée de fabriquer les systèmes de propulsions des douze sous-marins australiens: pour ses 520 salariés, cela représentait "plusieurs années de travail" dans les bureaux d'étude et les ateliers, souligne un délégué CGT de l'entreprise. Un prototype était déjà sur les rails.

Un coup dur, mais pas forcément un arrêt brutal pour ces entreprises. La suite "dépendra des éventuelles accélérations des commandes étatiques", prévient Serge Boniface. Notamment les nouveaux sous-marins nucléaires de la Marine française, destinés à remplacer l'actuelle génération de submersibles en 2035, ou le futur porte-avions tricolore, successeur attendu du Charles-de-Gaulle. Jeumont Electric, de son côté, mise notamment sur les frégates indonésiennes construites par le groupe italien Fincantieri.

Des "opportunités perdues"

Plus que des emplois menacés, ce sont des emplois "qui ne seront pas créés demain" et des "opportunités perdues", a expliquait Anne-Charlotte Fredenucci, présidente du spécialiste de l’ingénierie et de l’intégration de systèmes électriques et électroniques Ametra, sur le plateau de BFM Business. Dans le cadre des compensations industrielles et des transferts de technologies inscrits dans le contrat australien, Ametra avait noué en mai 2020 un partenariat avec une entreprise australienne, Easy Skill, qui ne verra finalement pas le jour.

"On s'est également implanté en Inde pour accompagner nos grands clients dans le cadre de contrats selon un mécanisme similaire d'obligation d'achats locaux [...] et [notre entreprise] avait créé des dizaines d'emplois en France et en Inde. Donc [on] avait de grands espoirs quant à la création d'emplois locaux en Australie et en France autour de cette fourniture de douze sous-marins à l'Australie", notait Anne-Charlotte Fredenucci.

La dirigeante se veut néanmoins optimiste. "Nous allons continuer à travailler sur les sous-marins, sur les frégates, sur le porte-avions de nouvelle génération", assurait-elle. "Le développement de l'industrie navale en France ne s'arrête pas là".

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV