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"On a besoin de protéger l'Europe": pourquoi Macron relance l'idée d'un bouclier antimissile européen

Relations tendues entre Emmanuel Macron et Olaf Scholz

Relations tendues entre Emmanuel Macron et Olaf Scholz - Odd ANDERSEN

Emmanuel Macron a évoqué la création d'un bouclier antimissile européen ce jeudi 25 avril lors de son discours à la Sorbonne. Un message adressé à Berlin qui veut installer dès 2025 un bouclier américano-israélien pour protéger l'Europe.

Le discours donné jeudi par Emmanuel Macron à la Sorbonne a été suivi de près à Berlin, en particulier la partie sur la défense de l'Europe. De toute évidence, le chancelier allemand Olaf Scholz n'a pas perdu une miette de ce qui a été dit sur l'éventuelle création d'un bouclier antimissiles européen.

En évoquant ce bouclier, Paris soutient l'idée d'une initiative stratégique qui s'appuierait sur l'industrie européenne de défense. Est-ce une manière d'apaiser les relations avec l'Allemagne en soutenant la nécessité de protéger l'Europe ou faire une contre proposition pour torpiller l'European Sky Shield Initiative (ESSI)?

"J’étais interrogatif hier", a expliqué ce vendredi devant la presse Emmanuel Macron depuis Strasbourg en réponse à une question de BFMTV. "Je ne pense pas que la réponse soit seulement une capacité. Ce qui apparaît aujourd'hui clairement, c'est qu'on a besoin de protéger l'Europe".

La Russie, une "puissance désinhibée"

Pour le chef de l'État, les missiles de la Russie -qualifiée de "puissance désinhibée"- menacent le continent européen. "Le débat levé par les Allemands est légitime. Simplement est-ce c'est la bonne réponse? Je ne suis pas sûr que quelques boucliers antimissiles nous protègent totalement contre les missiles russes ou qui dissuadent", a déclaré Emmanuel Macron.

"C'est cette réflexion stratégique que nous devons mener. Et ensuite nous déclinerons des capacités et un cadre commun de sécurité", propose le chef de l'État.

Reste que les quelques mots savamment lâchés par le chef de l'État ont pu surprendre. Pour se protéger, la France dispose d'une part de la dissuasion nucléaire, et d'autre part de systèmes de défense sol-air Mamba armés de huit missiles Aster 30 répartis sur le territoire pour protéger les sites sensibles ou stratégiques.

Pour la défense de l'Europe, Berlin a posé ses jalons quelques mois après l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Le chancelier allemand a annoncé la création de l'ESSI, un bouclier antimissile européen pour se protéger d'une éventuelle attaque de la Russie. Ce projet, dont la France, mais aussi la Pologne, ne fait pas partie, rassemble autour de l'Allemagne 17 pays européens, parmi lesquels le Royaume-Uni. Son coût est estimé à 4 milliards d'euros.

"Nous jouerions ainsi un rôle clé pour la sécurité de l'Europe", expliquait le rapporteur au Bundestag pour le budget de la défense, Andreas Schwarz.

Un bouclier allemand presque européen

Ce bouclier, qui vise à protéger l'Europe, n'a presque rien d'européen. Si, pour la courte portée, Berlin compte utiliser le système allemand IRIS-T fourni par Diehl BGT Defence. l'ESSI s'appuie sur des solutions étrangères. Il intègre des batteries longue portée Arrow 3 mises au point par Israël et, pour la moyenne portée, sur des Patriot PAC-3 comme ceux que Washington a fournie à l'Ukraine.

Ce dispositif qui disposerait de trois sites de lancement en Allemagne pourrait en outre être piloté depuis la base américaine de Ramstein depuis laquelle sont pilotées les opérations aériennes de l'Otan. Selon Berlin, il devrait être être opérationnel en 2025.

Paris a peu apprécié cette décision unilatérale de protéger l'Europe avec des armements excluant les systèmes Mamba et Mistral de MBDA, le missilier européen. L'an dernier, à l'occasion du salon aéronautique et de l’espace du Bourget, Emmanuel Macron avait taclé l'initiative allemande. L'Élysée l'avait même qualifié d'entente industrielle et commerciale.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco