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Plus les indemnités sont élevées, plus les demandeurs d'emploi restent longtemps au chômage

Les 1,1million de personnes percevant moins de 1000 euros ne restent que 9 mois au chômage en moyenne.

Les 1,1million de personnes percevant moins de 1000 euros ne restent que 9 mois au chômage en moyenne. - Philippe Huguen - AFP

Les 15.000 chômeurs, qui, en 2017, ont perçu une allocation mensuelle de 5000 euros, sont restés plus d’un an et demi au chômage, selon des chiffres de Pôle emploi. A l'inverse ceux qui percevaient moins de 1000 euros, sont restés seulement 9 mois sans emploi.

Le gouvernement doit présenter la semaine prochaine la réforme de l'Assurance chômage, et Edouard Philippe a annoncé dans son discours de politique générale de jeudi qu'il comptait instaurer la dégressivité des indemnités pour les salariés les mieux rémunérés. La mesure est controversée car ce sont les cadres, avec leur très haut niveau de cotisation et leur faible taux de chômage, qui contribuent à l'équilibre des comptes de l'assurance-chômage. Mais des chiffres de Pôle emploi, que s'est procuré le Parisien, fournissent une toute autre vision.

Un chômage des cadres faibles

En résumé, les demandeurs d'emploi qui perçoivent les indemnités les plus élevées sont ceux qui pointent le plus longtemps au chômage. Dans le détail, les 15.609 chômeurs, qui, en 2017, ont touché une allocation de 5000 euros et plus chaque mois sont restés plus d’un an et demi au chômage. Les 12.4076 qui recevaient entre 4.000 et 5.000 euros restaient en moyenne 17 mois, et les 31.964 chômeurs indemnisés entre 3000 et 4000 euros, 15 mois.

La décrue est très nette en fonction des sommes perçues. A l'opposé les 1,4 million de chercheurs d'emploi touchant entre 1000 et 2000 euros ne restent inscrits que 11 mois. Et la tranche la plus basse, qui concerne 1,1million de personnes percevant moins de 1000 euros ne restent que 9 mois.

"Ces chiffres montrent qu’un haut niveau d’indemnisation n’accélère pas nécessairement le retour à l’emploi. Alors même que le chômage des cadres est particulièrement faible dans notre pays, autour de 3,8%, on peut légitimement penser qu’il est possible de réduire progressivement l’allocation des hauts revenus"», précise une source gouvernementale au quotidien.

Pousser les cadres à prendre des emplois moins qualifiés

Mais les économistes ont une interprétation différente du pourquoi les chômeurs les mieux rémunérés, et donc les plus qualifiés, mettent autant de temps à retrouver un emploi. Rien n'indique qu'ils cherchent à profiter du système en s'octroyant une pause. Peut-être "peinent-ils à retrouver un travail qui corresponde à leurs qualifications, sur un marché de l’emploi plus restreint que pour les salariés au smic ?", s'interroge Bruno Ducoudré, économiste à l'OFCE auprès du quotidien.

La mise en place d'une dégressivité de l'allocation risque alors de les pousser à prendre un travail plus rapidement, peut-être en deçà de leurs qualifications. Ce qui sur le long terme risque de faire perdre de la valeur à leur profil et aux développements de leurs compétences. Sans compter que, cet emploi n'est alors plus disponible pour une personne qui avait le profil idéal et qui à son tour devra prendre un emploi moins qualifié, un jeu de domino qui peut avoir des effets néfastes sur l'employabilité de tous. 

Coralie Cathelinais