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Emploi

Les négociations sur l'assurance chômage entrent dans la phase décisive

Le gouvernement veut réduire l'endettement de l'Unedic d'environ 35 milliards d'euros.

Le gouvernement veut réduire l'endettement de l'Unedic d'environ 35 milliards d'euros. - Pascal Guyot- AFP

Le texte sur la réforme de l'assurance chômage va être sera transmis ce soir aux organisations syndicales. Deux sujets cristallisent les tensions : la diminution des contrats précaires et les conditions d'indemnisation des chômeurs.

Après trois mois de surplace, les difficiles négociations sur la réforme de l'assurance chômage voulues par l'exécutif entrent enfin jeudi dans leur phase décisive avec la mise sur la table par le patronat d'un projet d'accord global.

Ce texte, qui sera transmis mercredi soir aux organisations syndicales, doit traiter des deux points durs: d'une part la diminution des contrats précaires (CDD de moins d'un mois) dont le nombre a explosé depuis 20 ans; de l'autre les conditions d'indemnisation des chômeurs pour inciter au retour à l'emploi et réaliser les économies demandées par le gouvernement (entre 3 et 3,9 milliards sur trois ans).

"Notre volonté n'est pas de procrastiner. On va proposer un projet d'accord complet", a confirmé à l'AFP le président du Medef, Geoffrey Roux de Bézieux.

Des négociations retardées

Cette séance, qui sera suivie en principe d'une dernière le 20 février, aurait dû intervenir fin janvier mais elle avait été annulée à la suite d'un bref coup de colère patronal sur la principale pomme de discorde: l'instauration d'un "bonus-malus", modulation des cotisations d'assurance chômage payée par les entreprises en fonction de leur recours aux contrats précaires.

Le Medef, la CPME (petites entreprises) et l'U2P (artisans et commerçants) avaient été fortement irrités par des déclarations d'Emmanuel Macron, lors d'un débat public dans la Drôme, qui avait répété sa "détermination" à mettre en place le "bonus-malus". Ces déclarations mettaient à mal la stratégie patronale qui rejette catégoriquement cette idée et tente de convaincre les syndicats qu'il y a des "pistes alternatives" contre la précarité.

La bouderie patronale n'a duré que trois jours après qu'Edouard Philippe eut réaffirmé à l'Assemblée sa "confiance" aux partenaires sociaux pour trouver un accord sans prononcer les deux mots qui fâchent.

Mettre fin à la "précarité excessive"

"Nous, on a une solution. Si les partenaires sociaux en trouvent une meilleure qui a le même effet c'est très bien, mais sinon on la fera", a résumé dimanche la ministre du Travail Muriel Pénicaud à propos du bonus-malus. A l'heure où "un tiers" des CDD ne durent qu'une journée, il "faut régler cette question de la précarité excessive", a insisté Muriel Pénicaud en visant les employeurs qui "remettent toujours les même personnes au chômage et donc grèvent le coût de l'assurance chômage", de deux milliards par an selon l'Unedic.

Lors de la dernière séance, le négociateur patronal Hubert Mongon avait évoqué une douzaine de "propositions alternatives" parmi lesquelles revoir le "CDD d'usage" (utilisé dans beaucoup de secteurs sans limitation de renouvellement, ni indemnité de précarité), "la priorité à l'embauche en contrat long" pour les salariés en "contrats courts récurrents"; l'accès à la formation, etc...

Réduire la dette de l'Unedic

Reste à savoir si cela suffira aux syndicats, notamment les "réformistes" (CFDT, CFE-CGC et CFTC). Sans "propositions tangibles sur la taxation des contrats courts, il n'y aura pas de discussion possible", a prévenu Laurent Berger (CFDT). De son côté, FO a fait du bonus-malus "une condition" pour une signature d'accord.

Autre sujet conflictuel: les économies demandées par le gouvernement pour réduire l'endettement de l'Unedic d'environ 35 milliards d'euros. L'exécutif veut aussi éviter certaines situations où un demandeur peut gagner plus en alternant périodes d'emploi et de chômage qu'en travaillant en continu en temps partiel.

En décembre, le patronat avais émis des propositions qui avaient fait bondir les syndicats sur un durcissement des conditions d'accès d'indemnisation ou un étalement des indemnités versées. La seule proposition qui n'avait pas été catégoriquement rejetée était de calculer l'indemnité mensuelle sur la base de 30 jours (au lieu de 29, 30 ou 31). Cette mensualisation permettrait une économie substantielle de 350 millions par an, selon l'Unedic.

Les partenaires sociaux pourraient également convenir que l'objectif d'économies est trop ambitieux dans le contexte actuel de crise sociale. "La CFDT ne signera pas un accord qui pénalisera les demandeurs d'emploi", a martelé Laurent Berger.

Leur intérêt est cependant de trouver un compromis pour préserver la gestion paritaire de l'assurance chômage, à laquelle est notamment très attachée Force ouvrière. En cas d'échec, le gouvernement reprendrait en effet la main et pourrait imposer ses vues par décret.

Coralie Cathelinais avec AFP