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Inflation: l'industrie agroalimentaire mise sur la réouverture des négociations commerciales

La grande distribution et l'industrie agroalimentaire pourraient renégocier les prix des produits alimentaires qui ont été fixés par les récentes négociations commerciales.

À peine terminées, les négociations commerciales sont de retour. Face à la flambée des coûts de production, l'industrie agroalimentaire et la grande distribution vont rouvrir le dossier des prix des produits alimentaires.

• Des négociations déjà obsolètes?

Chaque année, les prix des produits alimentaires que l'on retrouve dans les supermarchés sont rudement négociés entre fabricants et distributeurs. C'est un rituel strictement encadré par la loi: chaque industriel doit envoyer avant le 1er décembre ses conditions de vente (entre autres, les tarifs réclamés), ouvrant la voie à trois de mois de négociations avec la grande distribution. Ces négociations doivent se terminer le 1er mars au plus tard.

Pour l'année en cours, la procédure est déjà terminée; les contrats 2022 ont été signés. Mais ces négociations, puisqu'elles se fondaient sur les demandes de tarifs envoyées au plus tard le 1er décembre, n'ont pas pris en compte l'inflation galopante des coûts de production des derniers mois, sur fond de crise sanitaire. Et alors qu'elles s'apprêtaient à se conclure, la guerre en Ukraine est arrivée, donnant un nouveau coup d'accélérateur à la flambée des coûts.

• Que réclament les industriels?

Pour faire face à la forte hausse des prix des matières premières agricoles, de l'énergie, du transport et des emballages, les industriels de l'agroalimentaire réclamaient la réouverture au plus vite de ces négociations. Une demande entendue par le gouvernement: l'exécutif vient d'appeler les fabricants et les distributeurs à se remettre autour de la table pour revoir ces contrats à peine signés et prendre en compte l'augmentation des coûts de production.

Par ailleurs, les industriels demandent que les marques de distributeurs (MDD) soient aussi concernées par ces nouvelles discussions; ces produits ne sont pas concernés par la procédure annuelle obligatoire et leurs prix sont négociés individuellement au long de l'année. Un moratoire sur les pénalités logistiques – c'est-à-dire les sanctions qui s'appliquent sur les fournisseurs quand les chaînes d'approvisionnement sont perturbées, comme aujourd'hui en Ukraine – est aussi évoqué.

• Comment pourrait-on renégocier?

Le gouvernement ne peut pas, juridiquement, obliger les deux parties à renégocier les contrats qui ont été signés: ce nouvel épisode de négociations devrait s'appuyer sur deux dispositifs prévus par la loi Egalim 2.

Les contrats comportent désormais une clause de révision automatique des prix au cours de l'année en fonction de l'évolution des coûts – cette clause ne concerne néanmoins que les matières premières agricoles. Egalim 2 a également étendu la clause de renégociation aux prix de l'énergie, du transport et des matériaux entrant dans la composition des emballages: concrètement, en cas de fluctuations de ces prix, il est possible rouvrir des négociations en cours d'année.

• Comment s'annoncent-elles?

Les négociations avaient été particulièrement difficiles cet hiver, et ça ne devrait pas être plus facile si les discussions reprennent au printemps. Les négociations qui se sont achevées le 1er mars dernier se sont traduites par une hausse de 3% en moyenne des prix des produits alimentaires payés aux industriels par les distributeurs. Bien moins que ce que réclamaient les fabricants, alors que la grande distribution concédait, elle, une augmentation pour la première fois en huit ans.

Le gouvernement a fait appel au "bon sens" de toutes les parties prenantes pour mener ces nouvelles négociations: il a assuré attendre une certaine "transparence" de l'industrie agroalimentaire pour justifier ses demandes et, côté distribution, mettra en valeur les "bonnes pratiques" et les enseignes "vertueuses" et volontaristes. Les ministères de l'Agriculture et de l'Industrie assurent qu'une réunion hebdomadaire aura lieu chaque année pour suivre l'évolution des discussions.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV