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Les PSAN français, bons élèves de la lutte contre la criminalité financière

C'est ce que révèle le dernier rapport du groupe d'action financière (GAFI) sur la lutte contre le blanchiment d'argent.

Le Groupe d’action financière internationale (GAFI), chargé d’élaborer des normes pour les acteurs financiers, a publié hier un rapport d’évaluation sur ce que font les acteurs financiers en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme (LCB-FT ou BC-FT).

Le GAFI a notamment fait mention des prestataires de services sur actifs numériques (PSAN), préférant la dénomination de prestataires de services sur actifs virtuels (PSAV).

Le régime de PSAN a été instauré par la loi Pacte en 2019 qui cherchait à encadrer les cryptomonnaies: à ce jour, la France comme 37 PSAN enregistrés, le dernier à avoir obtenu un tel enregistrement étant le géant Binance. Pour obtenir l’enregistrement PSAN, les acteurs sous soumis à des vérifications de l’AMF et de l’ACPR sur l’honorabilité et la compétence des dirigeants et des actionnaires de la société, ainsi que sur la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Une "bonne compréhension" des risques

Le rapport du GAFI, qui avait étudié 27 PSAN, souligne que les acteurs ont traité 204 millions d'euros d'opérations en 2020. Les opérations sont essentiellement des opérations réalisées par les PSAN pour les comptes de leurs clients. Ce montant reste évidemment beaucoup moins important que les montants du secteur financier dit traditionnel.

"L’analyse nationale des risques considère les risques de BC/FT comme modérés citant l’anonymat et l’opacité de certaines blockchains, l’attractivité des plateformes permettant les conversions de crypto-monnaies fiduciaires et la nature transfrontalière du secteur permettant le transfert de fonds rapide vers d’autres pays. Malgré la forte réglementation et l’engagement du secteur, les typologies ont montré la forte attractivité du secteur pour le BC/FT, notamment via l’accès à des services non réglementés en France. Toutefois les PSAV enregistrés et supervisés représentent un petit secteur avec des mesures d’atténuation conséquentes", souligne le rapport.

Selon le rapport, il apparaît que même avant d'être enregistrés PSAN, les acteurs fournissaient déjà des déclarations de soupçons à Tracfin, l'organisme de Bercy dédié à la lutte contre la fraude et le blanchiment. Ils ont notamment fournis 87 dossiers en 2020.

Nombre de déclarations de soupçons transmises à TRACFIN par type
d'institution financière par année
Nombre de déclarations de soupçons transmises à TRACFIN par type d'institution financière par année © GAFI

De manière générale, le GAFI souligne que ces acteurs ont une "bonne compréhension" des risques de criminalité financière, prenant des mesures en ce sens, par exemple en ce qui concerne les règles de virement d'actifs virtuels.

Quelques difficultés sur la "travel rule"

Mais tout n'est pas encore si simple: "quelques difficultés ont été notées sur l’application de la ‘travel rule’ et la mise en place de structures de contrôle interne", souligne le rapport.

"L’accompagnement des informations sur le donneur d’ordre et le bénéficiaire avec le virement, dites Travel Rule, posent un défi technologique et les clarifications des autorités nationales et européennes sont attendues", ajoute ce rapport.

Pour rappel, la directive TFR (pour "Transfer of Funds Regulation") vise à lutter contre le blanchiment d’argent sur les transferts de fonds. Elle est actuellement en cours de négociations à Bruxelles.

"Les PSAN n’ont pas attendu le règlement TFR pour collecter systématiquement des informations sur les dépôts et les retraits", explique à BFM Crypto Victor Charpiat, ancien crypto-avocat qui a lancé une fintech dans ce secteur. "La mise en place accélérée de la Travel Rule chez les PSAN a été critiquée pour deux raisons. D'abord, il n'existe toujours pas de standard technologique pour permettre l'échange d'informations entre PSAN. Ensuite, étendre l'obligation de vérification à la totalité des transferts constituerait une lourde charge opérationnelle, d’où la proposition de conserver un seuil de 1000€ pour déclencher l'obligation de vérification."

Enfin, selon le rapport, les PSAN seraient plus réactifs pour appliquer des mesures de gel des avoirs que les institutions financières, qui peuvent mettre entre 24 et 48 heures.

Plus largement, ce rapport du Gafi classe la France parmi les meilleurs élèves dans le cadre de la lutte contre la criminalité financière, qu'il s'agisse de la finance traditionnelle ou du secteur des cryptos.

Pauline Armandet