Après des manquements graves, l'AMF radie Bykep (ex Keplerk) de la liste des PSAN

Anciennement connue sous le nom de Keplerk, la société avait obtenu l'enregistrement PSAN en février 2021 auprès de l'Autorité des marchés financiers.

Bonne nouvelle pour certains, mauvaise nouvelle pour d'autres. Mardi, l'Autorité des marchés financiers (AMF) a ajouté 6 nouveaux PSAN (prestataires de services sur actifs numériques), dont Société Générale Forge et Crypto.com à sa liste... Et elle en a également radié deux: Emmanuel Management en raison de l'arrêt de son activité, mais surtout Bykep (ex Keplerk blockchain) pour "manquement" à ses obligations en tant que PSAN. C'est la première fois que l'AMF radie des acteurs de cette liste.

"Le Collège de l’Autorité des marchés financiers (AMF) a décidé le 27 septembre 2022 de retirer l’enregistrement en qualité de prestataire de services sur actifs numériques (PSAN) à Bykep Sas, avec effet immédiat", souligne l'AMF dans un communiqué.

Obtention du PSAN en février 2021

Fondée en 2017, Bykep a véritablement lancé sa solution d'achat et de vente de cryptomonnaies à partir de 2019 sous le nom de Keplerk blockchain. Cette société était surtout connue en France pour permettre d'acheter des bitcoins dans des bureaux de tabac, malgré quelques couacs à son lancement. La société Keplerk avait stoppé ses activités en décembre 2020, puis avait refait surface en février 2021 grâce à l'enregistrement PSAN de l'AMF.

Jusqu'à présent, tout semblait rouler entre Bykep et les autorités françaises. Mais des contrôles effectués par l'ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) à partir du mois de mai 2022, notamment en matière de lutte contre le blanchiment d'argent (dispositif LCBFT) ont révélé "des manquements justifiant l’engagement d’une procédure de radiation", souligne l'AMF.

"Des défaillances sérieuses du dispositif de LCB-FT"

Les contrôles auraient ainsi permis de découvrir des "opérations effectuées au débit de portefeuilles de clients sans leur consentement", souligne le communiqué.

"Elles montraient également des défaillances sérieuses du dispositif de LCB-FT, plus particulièrement en matière de gestion des dossiers de connaissance de la clientèle, d’examen renforcé des opérations présentant un risque particulier ou de mise en œuvre des mesures de gel des avoirs".

Bykep a par ailleurs indiqué à l'AMF qu'elle avait été victime d'un vol d'actifs numériques "par attaque informatique" pour une valeur de 300.000 euros le 8 septembre dernier.

Réseau de financement du terrorisme

Deux informations concernant la société Keplerk méritent d'être soulignées. D'une part, en septembre 2020, le parquet national antiterroriste a annoncé avoir levé le voile sur un réseau de financement du terrorisme, qui avait profité de la vente de bitcoins dans des bureaux de tabac pour transférer de l'argent sur des comptes appartenant à des djihadistes.

Parmi les sociétés qui proposaient un tel système, figuraient notamment... Digycode et Keplerk. Quelques mois plus tard, le 9 décembre, le gouvernement avait également présenté une ordonnance visant à durcir la surveillance de l'utilisation des cryptomonnaies pour lutter contre le financement du terrorisme, à la suite de la découverte de ce réseau de financement du terrorisme.

"Pour encaisser les bitcoins, Mesut S. et Walid F. se sont enregistrés sur les plateformes en ligne des deux entreprises françaises qui proposent ces coupons sur le sol français: Digycode et surtout Keplerk sur laquelle a transité l’écrasante majorité des fonds", souligne l'article.

Malgré la tourmente autour de cette affaire, Keplerk a continué ses activités de ventes et d'achats de cryptomonnaies, et avait d'ailleurs besoin de l'enregistrement PSAN pour pouvoir continuer à poursuivre son activité.

En 2019, l'Autorité des marchés financiers (AMF) avait laissé un an aux acteurs qui proposaient notamment de la vente ou de l'achat d'actifs numériques pour s'enregistrer en tant que PSAN, soit jusqu'en décembre 2020, souligne un article du site Bitcoin.fr de l'époque.

"Suspendre le service d’achat/vente de crypto-actifs"

En effet, introduit par la loi Pacte en 2019, l’enregistrement PSAN est obligatoire pour un acteur dans certains domaines, notamment s'il souhaite fournir en France des services de conservation d’actifs numériques et/ou d’achat ou de vente d’actifs numériques en monnaie ayant cours légal. Sur ce point notamment, l'AMF et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution vérifient que les acteurs se conforment à la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB/FT).

"Conformément à la loi n°2019-486 du 22 mai 2019 relative aux prestataires de service sur actifs numériques, le non-enregistrement auprès de l’AMF nous oblige à suspendre le service d’achat/vente de crypto-actifs à compter du 19/12/2020 à 00h00. Nous espérons obtenir cet enregistrement dans les prochaines semaines, nous reviendrons vers vous pour vous informer du rétablissement du service", avait déclaré Keplerk dans l'article de Bitcoin.fr.

Selon les informations transmises au greffe de commerce, l'entreprise Keplerk change d'adresse et de nom en décembre 2020 et se rebaptise Bykep. Elle obtient ensuite l'enregistrement PSAN de l'AMF le 18 février 2021.

Son enregistrement PSAN concernait deux services: la conservation d'actifs numériques et l'achat/vente d'actifs numériques contre monnaie ayant cours légal, "le règlement des opérations par monnaie électronique/cartes prépayées n’étant pas autorisé", peut-on lire sur la fiche de cet acteur sur le site de l'AMF.

Cette mention entre parenthèse fait très probablement référence aux activités permises à l'époque par Keplerk d'achats de bitcoins via des bureaux tabac. C'est d'ailleurs le seul acteur PSAN de la liste de l'AMF qui disposait d'une telle mention jusqu'à présent. Contacté par BFM Crypto, l'AMF ne souhaite faire aucun commentaire sur cet acteur.

Au moment de la rédaction de cet article, le site de Bykep n'est plus disponible.

Pauline Armandet