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La blockchain Terra a lancé son airdrop: quelles sont les implications fiscales en France?

La nouvelle blockchain Terra tente de dédommager ses utilisateurs grâce à une campagne de "airdrop". En quoi consiste ce concept? Quelles sont les implications fiscales?

Samedi, la nouvelle blockchain Terra est née, après que le plan de relance pour sauver l'écosystème Terra a été accepté par la communauté. Le fondateur de Terra, Do Kwon avait notamment prévu de dédommager ses utilisateurs, en procédant à une campagne de "airdrop".

Un airdrop est une distribution gratuite d'une cryptomonnaie (token) réalisée par les créateurs de cette même cryptomonnaie. Pour un projet, ce type de méthode lui permet de gagner en visibilité ou bien, dans le cas de Terra, de regagner une certaine légitimité perdue.

En fonction de chaque projet de airdrop, la société derrière peut choisir de les distribuer à tout le monde ou bien à une liste de personnes en fonction de certaines conditions, comme par exemple celle de déjà posséder cette cryptomonnaie, d'être sur la plateforme d'un projet ou encore d'avoir une certaine activité dans la finance décentralisée (DeFi). Les exemples varient en fonction de chaque projet de airdrop.

Par exemple, dans le cadre de la blockchain Terra, la réception des airdrops se fait en fonction d'un plan de répartition précis établi par son fondateur Do Kwon. Pour recevoir ces airdrop (en l'occurence de la nouvelle cryptomonnaie luna), les utilisateurs devaient notamment posséder le stablecoin usd (UST) ou la cryptomonnaie luna soit sur son wallet (portefeuille numérique de cryptomonnaie), soit sur une plateforme d'échange de cryptomonnaies (type Binance). Certaines plateformes ont déjà procédé à la distribution des airdrops, la plateforme FTX devant réaliser cette opération mardi.

"Il faut faire attention à ce que l’on reçoit"

Si l'on revient au système de airdrop, les cryptomonnaies sont directement envoyées sur le wallet d’un utilisateur. Il peut recevoir ces tokens alors qu’il avait entendu parler d’une campagne de airdrop, mais également sans avoir eu connaissance d’une telle campagne, d’où le fait de rester très vigilant.

"Il faut faire attention à ce que l’on reçoit, et notamment s’informer avant d’ouvrir le airdrop. Certains airdrop reçus peuvent valoir des milliers de dollars, il faut faire attention quand on souhaite les transférer en stablecoins ou dans une autre cryptomonnaie, s’il s’agit d’une arnaque et que l’utilisateur clique dessus, tous ses tokens sont envoyés à la personne malveillante", explique à BFM Crypto Marouane Essaïdi, digital asset manager chez TheDiggers, une communauté qui cherche à faire de l'éducation financière sur les cryptomonnaies.

Par exemple, aujourd'hui, PeckShield, un spécialiste de la sécurité blockchain, a posté sur Twitter une alerte sur le airdrop de luna, de manière à éviter les arnaques.


De manière générale, les airdrop permettent à des utilisateurs de pouvoir s’insérer plus facilement dans l'univers des cryptomonnaies.

"Des personnes ont pu recevoir des montants conséquents à peine arrivés sur le marché, en fonction de leur activité sur certaines plateformes. Par exemple à la suite de leurs activités sur la plateforme OpenSea, ils ont pu recevoir des montants de l’ordre de 1.000 à 50.000 dollars", ajoute Marouane Essaïdi.

Alors que la nouvelle blockchain Terra a lancé sa campagne de airdrop, quelles sont les conséquences fiscales pour les Français qui en bénéficient?

L’airdrop pris dans le calcul de la plus-value

La situation classique est qu’un investisseur occasionnel, qui est sous le régime de la flat tax à 30%, va recevoir des airdrops. Il va avoir une acquisition gratuite, donc il n'aura pas de majoration du prix d’acquisition, ni d'imposition du gain d’acquisition. Pourtant, deux cas de figure s’offrent à lui: une fois le airdrop reçu, soit l’utilisateur les convertit dans un autre actif numérique (type stablecoin, principalement USDT ou USDC) et les réutilise pour de nouveaux investissements.

Soit il décide de les échanger contre de l’euro et au moment de la revente des tokens contre de l’euro, la plus-value relative à cette opération sera alors égale au prix de cession.

A titre d'exemple pour un investisseur occasionnel qui avait reçu un airdrop de 10.000 unités qui valent par exemple 10.000 euros, à la revente des tokens de manière immédiate, la plus-value est égale au prix de cession - valeur d'acquisition (égale à 0 si on le fait immédiatement). Dans ce cas de figure = 10.000 euros.

En cas de cession ultérieure, la plus-value réalisée à la suite de la cession des token issus du airdrop et d'autres tokens, serait égale à:

Le prix de cession (10.000 euros) - (l'investissement initial (1.000 euros de base) x le prix de cession (10.000 euros)) / la valeur totale du portefeuille qui est constituée par les tokens issus du airdrop et les autres tokens du portefeuille (par exemple, 50.000 euros) = 9.800 euros.

"On retrouve en tout état de cause ce airdrop au moment où un particulier va déclarer ces opérations relatives aux cryptomonnaies. Si une personne reçoit beaucoup d’airdrop tout en étant un investissement occasionnel, elle aura un montant important de prix de cession et donc une plus-value imposable importante: l’airdrop sera pris dans le calcul de cette plus-value. En effet, même si le airdrop est gratuit et non imposé, cela n’empêche pas de devoir déclarer les plus-values par la suite", explique à BFM Crypto Nicolas Verger, avocats du cabinet Revo Avocats.

Par ailleurs, il existe un cas de figure précis où des personnes bénéficient d’airdrop à la suite de prestations de services au profit d’une société crypto ou d’un projet, qui envoie en contrepartie des airdrop. Ici, il existe un risque d’imposition au moment de l'attribution.

Ce cabinet d’avocat a notamment fait face à des cas d’investisseurs ayant bénéficié d’airdrop du fait de leur qualité de prestataires de services. "Cette situation entraîne, selon nous, une imposition du gain d’acquisition au moment de l’attribution dans la catégorie d’imposition des revenus issus desdites prestations (salaires, BIC ou BNC, pouvant aller à une imposition globale jusqu’à environ 60% du gain d’acquisition)".

Par ailleurs, en plein bull run dans les cryptomonnaies, c'est à dire quand les cryptomonnaies vivent une forte période de croissance, certaines peuvent voir leur cours être multiplé par 100.

"En cas de contrôle notamment du fait de la déclaration de plus-values importantes, il va falloir le cas échéant justifier auprès de l’administration fiscale la perception de ces tokens issus d’airdrop. Dans la situation où l’investisseur a des attributions gratuites et également un lien avec le projet, l’investisseur pourrait être requalifié en professionnel impliquant un redressement sur une partie de ses revenus issus d’opérations relatives aux cryptomonnaies. Dans les prochaines années sur certains portefeuilles, l’administration fiscale pourrait tenter de requalifier de l’investisseur occasionnel (particulier) en habituel (professionnel)", prévient Nicolas Verger.
Pauline Armandet