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Les voitures électriques coûtent de plus en plus cher

Alors que la France a engagé sa transition vers la voiture 100% électrique, certains modèles connaissent une forte hausse de prix depuis le début de l'année, conséquence de l'inflation des matières premières et de l'énergie.

C'est une des voitures électriques les plus vendues en France et son prix vient d'augmenter de plus de 11.000 euros en quelques mois. Il s'agit de la Tesla Model 3, longtemps affichée au tarif de 43.800 euros, pour sa version d'entrée de gamme lancée l'an dernier.

Hausse de tarif et baisse de bonus

Un tarif sous le plafond des 45.000 euros, qui donne droit en France au bonus écologique maximum. Une subvention qui était à l'origine de 7000 euros, passée à 6000 euros depuis le 1er juillet 2021. Résultat: un tarif, aide comprise (et sans compter les aides locales ou la prime à la conversion), qui est donc descendu à 36.800 euros.

Mais aujourd'hui la berline star de la marque américaine s'affiche à un tarif minimum de 49.990 euros. Une hausse de 6190 euros depuis début mars qui en provoque une autre, avec la baisse du bonus accordé pour ce modèle. En effet en passant au-dessus du seuil de 45.000 euros, un véhicule voit son aide réduite à 2000 euros. Et il n'y a plus d'aide pour un véhicule à plus de 60.000 euros, hors voitures électriques roulant à l'hydrogène.

On a donc bien face à une hausse de 11.190 euros entre une Model 3 achetée le 30 juin 2021 et aujourd'hui, soit une hausse de la facture finale pour le consommateur de près de 36% en un peu plus de 9 mois.

D'autres modèles concernés

Si Tesla ne donne pas d'explication à cette hausse, ce n'est pas un cas isolé. Ford vient par exemple de relever le prix de sa Mustang Mach-E. Le SUV voyait encore son prix démarrer à 50.450 euros en janvier et vient de passer à 56.400 euros minimum en France (+11%).

Des ajustements de prix sur certaines versions "pour faire face à l’augmentation significative des coûts de fabrication et des matériaux", explique Ford France. La pénurie de semi-conducteurs de 2021 continue de perturber la production cette année et la guerre en Ukraine bouleverse aussi les prix des matières premières et de l'énergie.

Un phénomène qui touche particulièrement les voitures électriques avec, dans les batteries, des composants spécifiques actuellement en tensions.

"Pour la première fois depuis 2010, le coût des batteries devrait augmenter en 2022 avec la flambée des matières premières notamment lithium, nickel, cobalt et manganèse, explique Nicolas Meilhan, expert du secteur et consultant pour le site EV Volumes. Les matières premières représentaient il y a quelques années 40% du coût de la batterie et c'est passé aujourd'hui à 80%."

Dans ce contexte, Luc Chatel, président de la Plateforme automobile, s'inquiétait la semaine dernière de voir l'écart de prix entre véhicules thermiques et électriques s'accroître encore davantage:

"On a un écart de l'ordre 40% dans le prix de vente d'un véhicule électrique par rapport à un véhicule thermique. Cet écart va encore augmenter", affirmait-il à l'antenne de BFM Business.

Une forte demande

Autre explication à cette hausse de prix: une forte demande pour les véhicules électriques, encouragée par les niveaux records des prix des carburants et un bonus qui devait normalement être réduit de 1000 euros à partir du 1er juillet, passant à 5000 euros. En cas de réélection d'Emmanuel Macron, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire avait toutefois expliqué le 15 mars dernier que cette aide resterait à son niveau actuel de 6000 euros, a priori et au moins jusqu'à la fin de l'année.

"Ce prolongement du bonus actuel serait une décision logique avec les délais de livraisons qui s'allongent fortement depuis le début de l'année, cela permettrait de compenser la hausse du prix des matières premières et la disparition progressive des remises en concessions", souligne Solal Botbol, cofondateur et président de BEEV, vendeur de voiture 100% électrique en location longue durée.

Face à la forte demande actuelle, les stocks disponibles de véhicules électriques neufs sont au plus bas et des délais de livraison ne cessent de progresser.

Si Fiat n'a pas augmenté le prix de sa 500 électrique, qui démarre toujours à 24.500 euros, il faut se montrer patient si on ne trouve pas son bonheur parmi les modèles disponibles, avec trois mois d'attente une fois la commande passée. Comptez un mois de plus pour une Renault Zoé, autre star du marché français.

"S'il peut y avoir de fortes variations selon les modèles, on est passé d'un délai de livraison moyen de 3 mois en début d'année à 6-8 mois, voire un an actuellement, une problématique qui passe finalement avant le prix pour de nombreux clients, indique Solal Botbol. Toutefois, si on veut passer à l'électrique à court terme, cela reste la bonne période pour s'équiper afin d'anticiper de futures hausses de prix. Et les constructeurs ne peuvent pas trop augmenter les prix sur l'électrique alors que les ventes de modèles thermiques baissent."

Du côté de la marque au losange, on trouve d'ailleurs même de potentielles baisses de prix sur la nouvelle Mégane, vendue uniquement en électrique. Renault baisserait les tarifs de certaines versions sous les 45.000 euros pour justement rentrer dans les clous du bonus maximal, croit savoir le site spécialisé Automobile Propre. Mais la suspension de la production du 14 au 25 avril, faute de composants, ramène encore une fois à la disponibilité du modèle, plutôt qu'à son tarif.

Hyundai, de son côté, assure ne pas avoir augmenté le prix de sa Ioniq 5 depuis le début de l'année.

En revanche, chez Dacia, la Spring, voiture électrique la moins chère du marché et modèle le plus vendu en janvier, n'échappe pas au phénomène. Son prix a augmenté de 1000 euros il y a une semaine. Depuis le lancement il y a un an, le prix hors bonus de la version Confort est passé de 16.990 euros à 18.690 euros et la version Confort Plus de 18.400 euros à 20.190 euros.

Logiquement, il faut alors se tourner vers le marché de l'occasion avec deux avantages: des prix plus abordables et une disponibilité immédiate. Des atouts qui ont contribué à l'explosion des ventes l'an dernier, mais dans un marché qui arrive aussi à saturation. Avec la hausse de la demande, le prix moyen s'envole, pour les thermiques en particulier qui représente encore le gros des ventes.

En effet si les ventes d'électriques de seconde main ont plus que doublé le mois dernier en France, elles représentent toujours moins de 2% des transactions, souligne le spécialiste des données automobiles AAA Data.

L'offre d'occasion fait défaut, alimentée par la pénurie de véhicules neufs depuis deux ans. Le site Aramisauto a ainsi vu le nombre de recherches pour des véhicules hybrides et électriques multiplié par deux entre février et mars mais peine à satisfaire tous les acheteurs intéressés. Des modèles très prisés: en mars, 77% des voitures électriques mis en ligne sur le site trouvaient preneur en moins de 7 jours, alors que ce taux est seulement de 35% pour les voitures essence.

Au-delà des modèles 100% électriques, c'est l'ensemble des voitures récentes, entre 0 et 2 ans, qui sont touchées par des hausses de prix, souligne Olivier Flavier, vice-président automobile du groupe Leboncoin. Sur la plateforme, le prix moyen pour ces véhicules est passé de 26.755 euros en février 2021, à 30.327 euros en février 2022, soit une augmentation de 13,5% sur cette catégorie.

https://twitter.com/Ju_Bonnet Julien Bonnet Journaliste BFM Auto