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Comment Stellantis a fait de Sochaux l'usine de référence pour la production de SUV

Le site historique de Peugeot vient de boucler un plan de modernisation de 5 ans avec 200 millions d'euros investis. De quoi faire partie aujourd'hui des sites industriels les plus performants de Stellantis en Europe, avec la production du successeur du 3008 déjà assurée.

Transformer un site industriel historique, qui a démarré sa production automobile en 1912, en une usine moderne, bien prête pour les défis de ce début de XXIe siècle: c'est ce que vient de réaliser Stellantis à Sochaux.

Un avenir assuré

Le groupe vient en effet de boucler un plan de modernisation de 200 millions d'euros entamé en 2017. Lorsque PSA n'avait donc pas encore fusionné avec FCA pour former Stellantis. Cinq ans plus tard, "l'usine s'impose comme le site le plus performant d’Europe pour la fabrication de SUV multi-énergies", a souligné Arnaud Deboeuf, directeur industriel de Stellantis lors d'une visite du site sochalien organisée pour la presse lundi 5 septembre.

En clair, de quoi lui assurer la production du successeur du Peugeot 3008 de deuxième génération, l'un des plus gros succès de la marque au lion ces dernières années. Ce modèle, dont la production sera lancée en 2024, sera proposé en version 100% électrique et reposera sur la nouvelle plateforme "STLA medium".

Une position de numéro un européen de la production de SUV qui renvoie à la compétition lancée par Stellantis entre chaque site:

"On joue à livre ouvert pour favoriser le partage des compétences et des méthodes de production. C'est devenu la force de frappe de notre manufacturing d'avoir créé en quelques mois une communauté (d'usines) avec des classements publiés tous les mois sur différents critères comme le nombre de défauts constatés par véhicule, explique Arnaud Deboeuf. C'est une interaction souhaitée entre les sites pour déployer ce qui marche et corriger ce qui ne marche pas."

En ligne de mire: des gains de productivité via des "investissements frugaux", qui doivent permettre d'absorber le choc de la transition vers l'électrique. L'an dernier, le site de Mulhouse, à quelques dizaines de kilomètres, avait lui aussi bouclé un important plan de modernisation pour récupérer la production de la Peugeot 308, dont la précédente génération était assemblée à Sochaux.

Downsizing industriel

Pour se retrouver parmi les meilleurs élèves industriels de Stellantis en Europe, le site sochalien a appliqué une sorte de "downsizing industriel", d'après ce terme anglais qui est utilisé pour désigner la réduction de la taille des moteurs, grande tendance avant le passage programmé à l'électrique.

Ces dernières années, l'usine de Sochaux a ainsi fortement réduit sa surface au sol, réduit à 172 hectares suite à la cession de 44 hectares à l'agglomération du pays de Montbéliard, mais aussi la taille des bâtiments.

L'atelier regroupant montage, contrôle qualité et logistique, qui occupait autrefois cinq bâtiments différents, se retrouve aujourd'hui dans un seul, placé au coeur du site industriel.

"C'est fini l'époque des grandes usines, Togliatti, c'est fini", plaisante Arnaud Deboeuf, en référence à la ville-usine du constructeur russe Avtovaz, que vient d'abandonner Renault dans le contexte de la guerre en Ukraine.

A la clé, une meilleure efficacité opérationnelle: "avant la transformation, une pièce faisait en moyenne un kilomètre pour aller du quai de déchargement au lieu de consommation: une distance ramenée à 200 mètres", met en avant Stellantis.

Alors que le gouvernement a appelé les entreprises à la sobriété énergétique face au risque de pénurie cet hiver, ce "compactage du site" permet aussi de réduire la consommation liée en particulier au chauffage. La consommation d'énergie aurait ainsi été réduite de 20% par rapport à l'an dernier.

Le "Transtockeur", ou la logistique optimisée

Au-delà de la réduction de taille du site, c'est un tout nouveau bâtiment sur lequel mise fortement Stellantis pour optimiser sa logistique de production. Avec 25 mètres de haut, le "Transtockeur", son petit nom, permet de stocker plus de 4200 palettes de petits colis de pièces et délivrer une palette toutes les 18 secondes.

A la manière des grands entrepôts logistiques d'un géant du e-commerce comme Amazon, tout est automatisé: une fois déposée sur un tapis roulant, la palette est scannée par des caméras pour être rangée sur d'imposantes étagères.

Ce bâtiment permet à l'usine Stellantis de Sochaux de disposer d'un magasin automatisé pour accéder à différents composants. 4200 palettes peuvent y être stockées et délivrées à rason d'une palette toutes les 18 secondes.
Ce bâtiment permet à l'usine Stellantis de Sochaux de disposer d'un magasin automatisé pour accéder à différents composants. 4200 palettes peuvent y être stockées et délivrées à rason d'une palette toutes les 18 secondes. © Stellantis

La palette peut ensuite être "appelée" par la ligne de production et acheminée en un temps record. Le rangement est optimisé pour favoriser l'accès aux pièces les plus susceptibles d'être sollicitées.

A l'intérieur de ce nouveau magasin de composants de l'usine Stellantis, le Transtockeur, complètement automatisé.
A l'intérieur de ce nouveau magasin de composants de l'usine Stellantis, le Transtockeur, complètement automatisé. © Stellantis

Du côté de la nouvelle ligne de production, qui assemble actuellement les Peugeot 3008 et 5008, un ballet incessant de robots transporte les composants vers les différents postes d'assemblage.

Dans un autre bâtiment, le nouvel atelier d'emboutissage dispose d'une nouvelle ligne de presses haute cadence: les éléments d'acier et d'aluminium sont transformés en portières et autres éléments de carrosserie en un temps record. Une installation qui permet de réaliser l'ensemble de la production de Sochaux et même d'autres sites, alors qu'elle occupait trois lignes de presses auparavant.

Des atouts dans un environnement incertain

Une modernisation qui doit aussi permettre à l'usine de mieux affronter les crises qui se succèdent depuis 2019 et le début du covid en Chine. A Sochaux, Stellantis a dû stopper la production à plusieurs reprises cette année. En cause, le manque de composants, notamment les fameux semi-conducteurs. Mais le groupe a su s'organiser.

"Cela demande de travailler avec nos achats, avec nos fournisseurs, avec un suivi quotidien pour adapter les besoins, réallouer les voitures, choisir les voitures où il y a le plus de demande de nos clients, donc énormément de flexibilité", note Arnaud Deboeuf.

Les résultats du premiers semestre lui permette d'afficher un certain optimisme, avec un bénéfice net en hausse de 34% au premier semestre pour Stellantis.

https://twitter.com/Ju_Bonnet Julien Bonnet Journaliste BFM Auto