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"Démagogique et destructrice de valeurs": les boulangers furieux contre la baguette de Leclerc à 29 centimes

Michel-Edouard Leclerc a annoncé mardi qu'il bloquait le prix de la baguette de pain dans les magasins du groupe à 29 centimes d'euro. La filière du blé a largement critiqué cette initiative compte tenu des coûts de production.

Des agriculteurs aux boulangers, l'ensemble de la filière du blé s'est indignée mercredi du lancement par le groupe Leclerc d'une baguette de pain à 0,29 euro, dénonçant une campagne "démagogique et destructrice de valeurs".

Michel-Edouard Leclerc a annoncé mardi qu'il bloquait le prix de la baguette de pain dans les magasins du groupe à 29 centimes d'euro - voire jusqu'à 23 centimes - pendant au moins quatre mois, au nom de la défense du pouvoir d'achat des Français dans un contexte inflationniste.

Une déclaration de guerre pour l'ensemble de la filière blé. Céréaliers, meuniers et boulangers, ainsi que la FNSEA, premier syndicat agricole, ont dénoncé dans un communiqué commun "des prix volontairement destructeurs de valeurs".

"Le non-respect d'une filière"

Ils s'indignent d'une annonce "démagogique" alors que "les cours des céréales et par conséquent de la farine, connaissent des prix élevés, que les coûts de production (salaires, etc.) progressent fortement et que la moyenne du prix de la baguette, en France en 2021 selon l'INSEE est de 0,90 euro".

"C'est l'effondrement de toute une filière, c'est le non-respect d'une filière, d'un produit artisanal" prévient Dominique Anract, président de la Confédération nationale de la boulangerie pâtisserie française (CNBPF) sur le plateau du Grand journal de l'Eco sur BFM Business, ce mercredi.

"Le risque serait que tout un tas de boulangeries ferment, surtout dans les petits villages" poursuit-il. "C'est la différence entre un boulanger qui fait du pain et une société qui fait de l'argent."

Cette annonce, qui survient au moment où les filières et le gouvernement "travaillent pour rémunérer justement les agriculteurs" et où "le savoir-faire et la qualité de la baguette française sont en passe d'être reconnus par l'UNESCO", a provoqué un tollé.

"Il faut rémunérer correctement les acteurs"

"Nous cherchons à préserver l'emploi et la qualité, cela a un coût: il faut rémunérer correctement les acteurs, ceux qui plantent, qui récoltent, qui assemblent les grains et font la farine, et ceux qui fabriquent le pain. Ce que fait Leclerc est honteux", a déclaré à l'AFP Jean-François Loiseau, président de l'Association nationale de la meunerie française.

"Il faudra que monsieur Leclerc nous explique comment et combien il rémunère les boulangers avec une baguette à 29 centimes", a réagi de son côté Christiane Lambert, patronne de la FNSEA.

Alors que les prix du blé ont augmenté d'environ 30% en un an, M. Loiseau se demande "où le groupe Leclerc achète sa farine" et "sur quels produits il va compenser".

En outre, Leclerc "casse les prix" dans le contexte particulièrement tendu des négociations annuelles entre producteurs et distributeurs, soulignent les acteurs de la filière.

Michel-Edouard Leclerc ne s'en est pas caché: "Les fournisseurs de farine ont beaucoup invoqué la hausse du prix du blé, pour demander des augmentations considérables", a-t-il déclaré mardi sur BFMTV, défendant son choix sur un "produit phare", "marqueur de l'inflation", comme il l'avait fait pour le carburant il y a quelques mois.

T.L avec AFP