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"Un été exceptionnel": près de 300 tortues marines sont nées sur les plages méditerranéennes en 2023

12 sites de pontes ont été référencés cet été par les scientifiques sur l'ensemble des côtes de la Méditerrannée occidentale, dont six rien que le littoral azuréen, contre seulement un en 2022. BFMTV.com fait le point sur cette année inédite.

Hyères, Fréjus, Porquerolles, Villeneuve-Loubet, Saint-Cyr-sur-Mer... Sur de nombreuses plages méditerranéennes, cordons de sécurité et bénévoles se sont relayés depuis plusieurs semaines, dès les premières lueurs du jour et jusqu'à la tombée de la nuit.

L'objectif de ces petites mains bénévoles? Surveiller les nombreux nids de pontes de tortues marines découverts cet été sur le littoral.

"C'est un été exceptionnel, notamment pour le nombre de pontes découvertes", explique Sidonie Catteau, cheffe de projet Tortue Marine de l’Association Marineland et responsable pour les Alpes-Maritimes et le Var du Réseau Tortue Marine de Méditerranée Française (RTMMF), auprès de BFMTV.com.

En effet, 12 sites de pontes ont été découverts sur l'ensemble du bassin méditerranéen français cet été. Bien plus, d'ailleurs, que l'unique nid repéré l'année dernière, en 2022. Six ont été trouvés dans les Alpes-Maritimes et le Var, les six autres entre la Corse (quatre nids) et l'Occitanie (deux nids à Marseillan et Sète).

"Environ 300 naissances"

Face à cette multiplication des nids de ponte, les scientifiques du RTMMF ont décompté de nombreuses "émergences", c'est-à-dire le nombre de tortues ayant réussi à percer leur coquille, sortir leur carapace du sable et atteindre l'eau de la mer.

Dans le détail, 123 oeufs ont été découverts sur le site de La Bergerie (Hyères) et 26 émergences se sont produites. "C'est peu", reconnaît la cheffe de projet Tortue Marine de l’Association Marineland, qui explique que "le nid a été prédaté par un chien errant".

Du côté de Villeneuve-Loubet, 92 oeuf et 72 émergences ont été constatés, plus que les 85 oeufs et 70 émergences à Saint-Cyr-sur-Mer, mais moins que les 93 oeufs et 75 émergences observés à Fréjus.

Les deux derniers sites recensés, à Porquerolles et La Capte (Hyères), n'ont pas tout à fait terminé de dévoiler leurs surprises. Si "plus de 115 oeufs" ont été pondus sur ce premier site, et 37 émergences pour l'heure dénombrées, d'autres pourraient apparaître "pendant encore huit jours sur ce site", selon l'experte.

Enfin, le site de La Capte reste pour l'heure un mystère. "Ça commence à bouger. On a hâte de voir", expliquait ce mardi Sidonnie Catteau à BFMTV.com.

Au total, ce sont donc 280 tortillons qui ont déjà rejoint la mer Méditerranée, alors qu'"environ 300 naissances" sont à prévoir au total cet été.

Une situation inédite bientôt normale?

Et le nombre de nids de pontes de tortues marines découverts cette année pourrait être que la face cachée de l'iceberg. "Ces naissances sont seulement celles que nous avons pu constater sur le terrain. D'autres nids ont pu passer sous les radars", estime Sidonie Catteau.

Si les constatations côté français se veulent plus qu'optimistes, cette dernière espère que la mise en commun des données avec leurs collègues italiens et espagnols permettra de confirmer la tendance et d'en apprendre encore davantage sur ces tortues protégée de l'espèce Caouanne.

"Ce qui est intéressant, c'est qu'on observe un changement de la structure de la population de ces tortues au large des côtes françaises. Il y a de plus en plus de mâles en âge de se reproduire et d'adultes en général", explique Sidonnie Catteau.

L'une des hypothèses avancées pour expliquer ces changements serait une augmentation des températures de surface, et donc une modification des courants marins, emportant les tortues qui se laissent dériver par ces derniers jusqu'aux eaux méditerranéennes. Prochain objectif: étudier la fidélisation de ces sites de nids de pontes dans les prochaines années.

"On n'a jamais autant parlé des tortues marines"

Si l'apparition de ces nombreux nids est une bonne nouvelle, l'arrivée des tortillons jusque dans l'eau de la mer Méditerranée en est une meilleure encore. Justement, la protection apportée par les nombreux bénévoles mobilisés cet été permet "un meilleur taux de survie que dans le nature", selon la cheffe de projet Tortue Marine de l’Association Marineland.

Cette dernière loue "une aventure humaine passionnante de protection et d'apprentissage 24h/24", ayant fédéré plus de 300 personnes autour d'un objectif peu commun: "surveiller des tas de sable!", ironise-t-elle auprès de BFMTV.com.

"Experts, scientifiques, référents du muséum d'Histoire naturelle de Paris, bénévoles... On travaille tous ensemble, c'est très émouvant car on n'a jamais autant parlé des tortues marines", explique Sidonnie Catteau.

Une fois toutes les émergences terminées au sein des nids repérés, d'ici quelques jours selon Sidonnie Catteau, le temps sera désormais consacré à une seconde phase, tourné vers l'apprentissage. Densité du sable, type d'émergences... "Tout ce qu'il se passe aujourd'hui est quelque chose que nous apprenons pour demain", confie cette dernière auprès de BFMTV.com.

L'objectif à court terme est aussi d'enseigner à la population et aux élus les bons gestes à avoir dans les prochaines années, notamment via "un guide que l'on met à jour et distribue", mais aussi de réfléchir à l'adaptation de l'activité humaine pour ne pas déranger les futures naissances sur le littoral méditerranéen.

Alixan Lavorel