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LinkedIn, ce réseau privilégié par la Chine pour espionner les cadres français

Une note d'alerte de la DGSI et de la DGSE fait état de l'utilisation de LinkedIn pour approcher des sources françaises.

Une note d'alerte de la DGSI et de la DGSE fait état de l'utilisation de LinkedIn pour approcher des sources françaises. - MARTIN BUREAU / AFP

A l’aide de faux profils ou "avatars numériques" sur le réseau social professionnel, près de 4000 cadres et employés de l’administration française ont été approchés par la Chine, pour mieux récupérer des informations confidentielles.

Après un long échange flatteur sur LinkedIn, une cadre du ministère de l’Economie s’envole vers la Chine rejoindre un chasseur de tête bien sous tous rapports. Assailli de messages, un volontaire international dans une ambassade de France en Asie cède à une généreuse proposition professionnelle, formulée par un Chinois au titre ronflant. Autant d’exemples d’une large opération d’espionnage menée par la Chine sur les réseaux sociaux professionnels pour récupérer à la source des données sensibles de l’Etat français, de son administration et de ses grandes entreprises.

Le mode opératoire des services chinois, décrit par Le Figaro, semble grossier. Comment accorder sa confiance à un simple contact LinkedIn, caché derrière un faux profil, et proposant une collaboration professionnelle bien trop généreuse pour être honnête? Il s'est pourtant avéré efficace. Dans la pêche aux informations confidentielles, et d’après la note d’alerte de la Direction générale de la Sécurité Intérieure (DGSI) et de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), la Chine a ferré près de 4000 gros poissons, "cadres et employés de la fonction publique, collaborateurs d’entreprises stratégiques et acteurs des cercles d’influence".

Un exemple de prise de contact, traduite, sur LinkedIn.
Un exemple de prise de contact, traduite, sur LinkedIn. © Le Figaro

Des notes d'analyse

Tous ont été amenés à se rendre, souvent tous frais payés, à des colloques et séminaires à l'étranger, avant d'être invités, une fois rentrés chez eux, à rédiger des rapports sur des sujets d'actualité sensibles, contre une rémunération conséquente. Le document des services de renseignement précise que la cible "reçoit des instructions de son correspondant chinois qui lui demande régulièrement la rédaction de notes d'analyse s'appuyant sur les informations confidentielles".

En tout, 500 faux profils ont été répertoriés par les sources de renseignement européennes. Ils s'adossaient à des sociétés factices, parfois suivies par des centaines de personnes, et dont Le Figaro dévoile quelques noms. Les services français ont transmis plusieurs mises en garde pour que les agents publics et salariés de l'administration cessent de tomber dans le panneau.

LinkedIn indique, de son côté, mener des investigations pour limiter la création de faux comptes et toute activité frauduleuse. "Nous conseillons toujours à nos membres de ne se connecter qu’à des personnes sur LinkedIn qu'ils connaissent et en qui ils ont confiance, ou qui leur sont présentées par une personne qu'ils connaissent et en qui ils ont confiance. Nous encourageons les membres à signaler les faux profils ou profils suspects à LinkedIn afin que nous puissions prendre les mesures qui s’imposent", précise le réseau social. 

L’appétit de la Chine pour LinkedIn dans ses opérations d'espionnage n'est pas nouveau. Il avait été percé à jour en fin d'année dernière par l'office allemand de protection de la Constitution. Le BfV révélait à l'époque que le réseau social professionnel servait de terrain de jeu pour mieux approcher des parlementaires et politiciens allemands. Les autorités estimaient alors que près de 10 000 citoyens avaient pu être contactés par ce biais... ce que Pékin n'a cessé de démentir. 

https://twitter.com/Elsa_Trujillo_?s=09 Elsa Trujillo Journaliste BFM Tech