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Pourquoi TikTok est accusé d'avoir poussé au suicide une adolescente de 15 ans

Les parents de Marie ont porté plainte contre TikTok après que leur fille s'est suicidée en 2021. Ils pointent notamment le rôle de l'algorithme du réseau social, qui aurait enfermé leur fille dans son mal-être.

L'algorithme de TikTok est l'une des recettes les mieux gardées. Et même avec la création en avril 2021 d'un centre européen de transparence et de responsabilité, les différents éléments qui rendent la plateforme chinoise aussi addictive restent flous.

Début septembre, une plainte a été déposée à l'encontre du réseau social. Les parents de Marie, une adolescente de 15 ans qui s'est suicidée en septembre 2021, reprochent à TikTok d'avoir joué un rôle dans le mal-être de leur enfant. Ils estiment que le système de recommandation de l'entreprise a aggravé son état, la poussant à mettre fin à ses jours.

L'avocate des parents, Laure Boutron-Marmion, dénonce un "algorithme extrêmement puissant", auprès de Franceinfo. Elle estime que "par l'algorithme, l'adolescente a reçu en masse ces vidéos qui sont sur le même thème et qui ne peuvent que conduire à être encore plus mal".

Cerner les préférences de chacun

Interrogé par Tech&Co en mars 2023, le co-directeur de l'AI Forensics (une ONG spécialisée dans l'étude des algorithmes de recommandation), Marc Faddoul, rapelait le fonctionnement de celui de TikTok.

Comme pour toutes les plateformes, l'objectif est de conserver les utilisateurs le plus longtemps possible sur leur application. Pour cela, les réseaux sociaux tentent de proposer des contenus qui plaisent à chacun. C'est à ce moment que les algorithmes interviennent. Ils servent à cerner les préférences d'un utilisateur afin d'augmenter sa durée d'engagement.

Mais à ce jeu, TikTok semble le plus compétent. Notamment grâce au format court de ses vidéos. "En une heure, on regardera peut-être une quinzaine de vidéos YouTube, mais on en aura vu plusieurs centaines sur TikTok", souligne Marc Faddoul.

Pour chaque vidéo visionnée, l'application intègre de nombreuses informations: l'avez-vous regardée, aimée, partagée, ignorée? Autant de données qui servent à affiner les goûts que l'algorithme attribue à une personne.

Des contenus négatifs plus engageants

Mais à cela s'ajoute un point qui participe à l'addictivité du réseau social. "L'algorithme favorise aussi particulièrement les contenus polarisants ou polémiques, car ce sont les plus engageants", ajoute Marc Faddoul. Ainsi, les contenus négatifs sont davantage susceptibles d'être mis en avant.

C'est cette spécificité qui est pointée du doigt par les parents de Marie. Peu de temps avant son suicide, la jeune fille victime de harcèlement lié à son poids a publié une vidéo évoquant son mal-être. D'après la plainte, en cours d'évaluation par le parquet de Toulon, c'est à partir de cette publication que l'algorithme de TikTok a recommandé d'autres contenus autour de la dépression et du harcèlement.

Sur son site, TikTok explique analyser les contenus visionnés par ses utilisateurs pour leur recommander d'autres vidéos. Mais le réseau social ne précise pas que la publication d'un contenu par l'utilisateur lui-même peut influer sur les recommandations faites par l'algorithme.

La plainte des parents de Marie a été déposée au nom de trois motifs: "provocation au suicide", "propagande des moyens de se donner la mort" et "non-assistance à personne en péril".

Pierre Monnier