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Le ChatGPT de Baidu "Ernie Bot" est accessible à tous, mais reste soumis à la censure chinoise

Malgré un premier test peu convaincant en mars, une version grand public du robot conversationnel de Baidu, utilisant l'intelligence artificielle, est disponible depuis ce jeudi 31 août.

C'est la réponse chinoise à ChatGPT. Le géant chinois de l'internet Baidu a lancé son robot conversationnel Ernie Bot, accessible à tous depuis ce jeudi 31 août. Il s'agit d'une étape majeure dans la volonté de la Chine d'être d'ici 2030 un leader mondial de l'intelligence artificielle.

"Nous sommes ravis d'annoncer qu'Ernie Bot est désormais pleinement disponible pour le grand public, à partir du 31 août", a annoncé Baidu dans un communiqué.

Cette technologie, qui suscite l'enthousiasme mondial depuis des mois, se heurte chez le géant asiatique à la volonté des autorités de contrôler l'information en ligne, et Baidu a dû solliciter leur autorisation avant la mise sur le marché.

Le logiciel, téléchargeable dans les boutiques d'application et sur le site officiel du groupe, vise principalement le marché chinois dans l'immédiat. Il fonctionne principalement en mandarin mais comprend aussi les questions en anglais.

"Outre Ernie Bot, Baidu s'apprête à lancer une série de nouvelles applications nées de l'intelligence artificielle qui permettront aux utilisateurs d'expérimenter pleinement les quatre capacités fondamentales de l'intelligence artificielle générative: la compréhension, la production, le raisonnement et la mémoire", a ajouté la compagnie.

"Changeons de sujet"

Testée ce jeudi 31 août au matin par l'AFP, la plateforme répondait facilement à des questions triviales comme "Quelle est la capitale de la Chine?" ou "Avez-vous des loisirs?".

Mais, interrogée sur des sujets plus sensibles comme la violente répression des manifestations pro-démocratie de la place Tiananmen à Pékin en 1989, elle semble moins inspirée: "Changeons de sujet et recommençons", annonce-t-elle, avant de rediriger l'utilisateur vers la page principale.

Questionné sur l'actuel Dalaï Lama - qui critique ouvertement le gouvernement chinois et vit en exil -, Ernie Bot donne à l'AFP des informations sur le Dalaï Lama... qui vivait au 17e siècle.

Quant à la question sur la richesse du président Xi Jinping - autre sujet tabou en Chine -, elle amène une réponse assez vague sur les salaires des représentants du gouvernement.

"Taïwan est-il un pays indépendant?" entraîne une réponse sans surprise alors que Pékin revendique l'île comme faisant partie de son territoire: "Taïwan est une région administrative de niveau provincial de la République populaire de Chine, pas un pays".

"Parlons d'autre chose", ajoute immédiatement Ernie Bot.

Une "inspection de sécurité" des solutions IA

Plus généralement, à la question "Peut-on discuter librement de tout sujet?", le logiciel répond: "Oui, nous pouvons parler de tout ce que vous voulez. Cependant, veuillez noter que certains sujets peuvent être sensibles ou toucher à des questions légales et sont donc soumis à votre propre responsabilité".

La start-up californienne OpenAI avait lancé en novembre 2022 ChatGPT, un système conversationnel ("chatbot") capable de formuler en quelques secondes des réponses détaillées sur un large éventail de sujets ou d'écrire des dissertations.

Les prouesses de ChatGPT sont suivies avec passion en Chine, où l'interface est pourtant bloquée sans logiciel de contournement type VPN et numéro de téléphone étranger.

La Chine ambitionne de devenir d'ici 2030 un leader mondial de l'intelligence artificielle, amenée à révolutionner une multitude de secteurs dont l'industrie automobile et la médecine.

Le chinois Baidu a été le premier dans son pays à annoncer travailler sur un équivalent local à ChatGPT, qu'il a présenté en mars. Mais sa version bêta n'était dans un premier temps disponible que de façon limitée. L'annonce de son lancement pour le grand public était bien accueillie à la Bourse de Hong Kong jeudi matin, où les titres Baidu gagnaient 3,3% à 03H30 GMT.

Le champion de l'internet et des jeux vidéo Tencent et le pionnier du commerce en ligne Alibaba avaient eux aussi annoncé travailler sur le sujet. Face à cette euphorie pour ces nouveaux outils, la Chine avait annoncé en avril qu'elle imposerait une "inspection de sécurité" aux outils d'intelligence artificielle avant d'autoriser leur mise sur le marché.

Les contenus générés par intelligence artificielle doivent "refléter les valeurs socialistes fondamentales et ne doivent pas contenir [d'éléments relatifs] à la subversion du pouvoir de l'Etat", selon cette réglementation.

P.M avec AFP