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EN DIRECT - Frances Haugen, lanceuse d'alerte de Facebook: "Il n'y a pas suffisamment de modérateurs francophones chez Facebook"

Frances Haugen lors de son audition au Congrès américain, le 5 octobre 2021

Frances Haugen lors de son audition au Congrès américain, le 5 octobre 2021 - Jim WATSON © 2019 AFP

L'ancienne cadre de Facebook s'exprime face aux députés français, revenant sur les accusations visant Facebook et concernant l'addiction, la désinformation et la haine en ligne.

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"Il n'y a pas suffisamment de modérateurs francophones chez Facebook"

"Je vous l'assure, il n'y pas suffisamment de modérateurs francophones chez Facebook", assure Frances Haugen. "Je pense que Facebook doit rendre publique le nombre de modérateurs par langue".

Elle critique également l'intelligence artificielle, incapable de faire "la nuance", et de prendre en compte "le contexte", pour modérer.

Fausses informations: les Français désavantagés par rapport aux Américains

"Le français ne bénéficie pas de tous les systèmes de sécurité qui profitent à l'anglais. D'après les données que j'ai vues, beaucoup de langues, dont le français, font face à d'importants problèmes de sécurité, par exemple concernant la désinformation liée au Covid" précise Frances Haugen.

Elle revient sur de précédentes accusations, largement documentées, sur le manque d'investissement de Facebook pour modérer des contenus dans d'autres langues que l'anglais.

D'après des sources internes évoquées dans le livre L'inquiétante vérité : et si facebook n'était pas votre ami? (Albin Michel, 2021), Facebook employait par exemple seulement cinq modérateurs parlant le birman, pour 18 millions d'utilisateurs dans le pays en 2018.

A l'époque, le réseau social abritant pourtant de nombreuses publications haineuses à l'encontre des Rohingyas, alors victimes d'un génocide.

Début 2021, une vidéo complotiste au sujet de la vaccination s'est par ailleurs hissée en tête des publications les plus populaires en France.

Frances Haugen assure ne pas être rémunérée pour s'attaquer à Facebook

"Je n'ai pas été rémunérée du tout. J'ai d'ailleurs un solde négatif de 250.000 dollars aujourd'hui. C'est grâce à tous les donateurs que je peux agir" assure Frances Haugen

La lanceuse d'alerte répondait à la question de Yaël Braun-Pivet, présidente de la Commission des lois, qui souhaitait faire la transparence sur ce sujet.

Facebook accusé de radicaliser les utilisateurs

"Facebook a essayé de maximiser le nombre d'interactions en 2018. Mais ces interactions peuvent aussi prendre la forme d'intimidations ou de messages haineux" explique Frances Haugen.

Elle prend notamment l'exemple de partis politiques européens ayant partagé leurs craintes avec Facebook à ce sujet lorsqu'elle était en poste.

"Ils ont dit à Facebook qu'ils pouvaient auparavant publier des contenus au sujet de leurs idées, mais qu'après ces évolutions, seuls les messages polarisants fonctionnaient".

Un cas qui n'est pas sans rappeler les nombreuses accusations visant Facebook, notamment concernant sa propension à privilégier les extrêmes et à radicaliser les internautes.

"Les profits plutôt que la sécurité"

"Facebook choisit les profits plutôt que la sécurité" répète Frances Haugen. "Si Facebook continue à opérer en toute opacité, alors d'autres tragédies arriveront" déplore-t-elle.
"Il faut pouvoir avoir accès à l'ensemble des données de Facebook. Les régulateurs auraient ainsi la possibilité d'évaluer les risques" réclame Frances Haugen.

La lanceuse d'alerte revient ainsi sur l'opacité de Facebook autour du fonctionnement de ses algorithmes de recommandation, mais aussi de ses systèmes de modération.

Ces derniers sont vivement critiqués en raison de leur efficacité limitée, notamment dans des autres langues que l'anglais.

Un témoignage en plein projet de régulation

Frances Haugen, qui a rejoint Facebook en 2019 avant de quitter l'entreprise en 2021, s'exprime à un moment déterminant.

Au niveau européen se négocie un projet de régulation visant à davantage responsabiliser les principaux réseaux sociaux, notamment pour accroître la transparence autour de leurs outils de modération.

"Il faut prendre le problème à bras le corps et je soutiens totalement le projet de l'Union européenne" a déclaré la lanceuse d'alerte dans son propos liminaire ce 10 novembre.
Pauline Dumonteil et Raphaël Grably