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La police de Los Angeles partage "accidentellement" des photos d'agents en infiltration

Après avoir remis les images de plus de 9300 agents de la police de Los Angeles, la ville tente maintenant de forcer le site qui les a publié à les retirer.

Ces informations ont été partagées "par inadvertance": c’est ce qu’affirme le bureau du procureur de la ville de Los Angeles, après que la police locale a livré les photos et détails de plus de 9300 de ses agents, y compris en infiltration, en réponse à une demande d’archives publiques. Mais rien n’est moins sûr.

Les photos, noms, rangs, ethnicités, dates d’embauche, divisions et bureaux, et numéros de badge des agents sont désormais accessibles en ligne sur une base de données appelée "Watch the Watchers" (littéralement, "surveiller ceux qui nous surveillent"), révélait le Los Angeles Times en mars dernier.

Le site a été lancé par une organisation activiste, la Stop LAPD Spying Coalition, qui s’oppose à la collecte de renseignements par la police de la ville et milite pour la réformer. La police de Los Angeles est régulièrement accusée d'usage excessif de la force. Début janvier, en l'espace de quelques jours, trois Afro-Américains souffrant de troubles mentaux sont morts lors de leur interpellation.

"Nous ne publions pas les adresses de leurs domiciles, ou les choses qui ne concernent pas leur rôle en tant qu’officiers de police", se défend Hamid Khan, l’un des responsables de la Stop LAPD Spying Coalition.

Photos "livrées en mains propres"

Le syndicat qui représente les agents ordinaires de la police du département de police de Los Angeles (LAPD) avait attaqué en justice le chef Michel Moore suite à la divulgation de ces informations. Depuis, plus de 300 des agents concernés se sont dit prêts à intenter une action en justice contre la ville de Los Angeles.

En retour, la ville poursuit désormais Ben Camacho, "journaliste citoyen" (une notion qui existe aux Etats-Unis pour qualifier les citoyens effectuant un travail journalistique, souvent dans un but militant) qui a obtenu ces informations et la Stop LAPD Spying Coalition, à qui il les a remis. Les avocats de la ville assurent que cette démarche a pour but de protéger les officiers de police "dont la vie et celles des membres de leurs familles sont gravement mises en danger par cet affichage" public.

Ces informations auraient en fait été communiquées volontairement par la ville, et pas par "inadvertance" ou par "erreur", assure Susan Seager, l’avocate de Ben Camacho. Elle affirme que le bureau du procureur de Los Angeles "a livré en mains propres" les photos en septembre dernier, accompagnées d’une lettre indiquant: "les images des officiers travaillant sous couverture au moment du téléchargement de ces photographies (fin juillet 2022) ne sont pas incluses".

Les experts interrogés par le Los Angeles Times concluent également que le retrait des images semble injustifiable devant la justice américaine, qui privilégie selon eux le droit de la presse à divulguer des informations, même classées secret-défense ou pouvant compromettre la sécurité du pays.

Lucie Lequier