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L'Euro 2016 menacé par la fronde contre la loi Travail?

La mobilisation contre la loi Travail aura-t-elle raison de l'Euro 2016?

La mobilisation contre la loi Travail aura-t-elle raison de l'Euro 2016? - BFMTV

À peine deux semaines avant le coup d'envoi de l'Euro 2016, la contestation contre la loi Travail a pris une telle ampleur que la tenue de la compétition de football semble aujourd'hui compromise.

Ce devait être l'événement sportif de l'année. Sera-t-il en fait le bras de fer du quinquennat Hollande? À quinze jours du match France-Roumanie qui signe le début de l'Euro 2016, les syndicats entendent mettre des bâtons dans les roues du gouvernement pour empêcher l'adoption de la loi Travail. Quitte à perturber un moment que tous les aficionados du ballon rond attendent depuis des mois.

Les transports seront eux aussi gravement impactés par la grève
Les transports seront eux aussi gravement impactés par la grève © BFMTV

Des transports paralysés

A en croire 56% des Français interrogés dans le cadre d'un sondage MCI-Odoxa pour France Info et le Parisien-Aujourd'hui en France paru mercredi, la fronde contre la réforme El Khomri risque de perturber la tenue de l'événement. L'invitation de l'intersyndicale à amplifier la mobilisation pourrait leur donner raison.

En plus de grandes journées d'actions comme celle du 14 juin, ce sont aussi les grèves de transports en tout genre qui devraient compléter le plan d'attaque des syndicats.

SUD-RATP appelle par ailleurs à la grève illimitée à partir du 10 juin, jour de l'ouverture de la compétition. La CGT avait quant à elle annoncé un mouvement similaire à partir du 2 juin. Côté SNCF, c'est grève reconductible dès le 31 mai.

Sans compter les raffineries paralysées et les dépôts de carburants qui ont mis à sec de nombreuses stations-services.

La pénurie de carburant est l'une des conséquences de la contestation
La pénurie de carburant est l'une des conséquences de la contestation © BFMTV

D'autant que dans le sillage de la contestation contre la réforme El Khomri, la colère de nombreuses professions pourrait éclater durant la compétition pour obliger l'exécutif à satisfaire à leurs exigences. C'est donc une déferlante de grèves qui risque de s'abattre sur la France dans les prochaines semaines. Cheminots, routiers, pilotes, taxis, buralistes… Autant d'épines dans le pied du gouvernement.

Des forces de l'ordre déjà trop sollicitées 

Si les autorités misent sur l'essoufflement du mouvement, les contestataires eux tablent sur l'usure des forces de l’ordre ultra-sollicitées dans le cadre de l'Etat d'urgence, alors que celles-ci redoutent de devoir se retrouver sur deux fronts en même temps.

Car si la fronde continue au même rythme, elles devront gérer à la fois la sécurité des manifestations de plus en plus émaillées de violences, mais aussi celle de l’événement sportif, sur fond de menace terroriste. Un détail sur lequel Eric Coquerel, le coordinateur du Parti de gauche, n'a pas manqué d'appuyer.

"60.000 policiers pour l'Euro… je ne vois pas comment ils vont faire puisque aujourd'hui leur seul barrage contre les manifestants ce sont les policiers. S'ils veulent continuer à organiser l'Euro ils ont intérêt à retirer leur loi", s'est-il exclamé.

Les forces de l'ordre sont déjà très sollicitées, pourront-elles être sur deux fronts à la fois?
Les forces de l'ordre sont déjà très sollicitées, pourront-elles être sur deux fronts à la fois? © BFMTV

Une mobilisation sous forme de guerre d'usure

Loin d'avoir faire taire la contestation contre la loi Travail, le recours à l'article 49.3 par le gouvernement a mis le feu aux poudres. D'où la multiplication d'actions coup de poing pour faire de l'Euro un argument supplémentaire de négociation. 

"Pourquoi on fait durer le suspense? Le 10 juin vous avez l'euro de foot qui commence, c'est ça l'image qu'on va donner aux gens qui viennent. S'il le faut on le fera, mais Monsieur Valls serait raisonnable de s'en aller avec sa loi", a affirmé Jean-Luc Mélenchon lors de la manifestation de ce jeudi.

D'ailleurs le député européen n'est pas le seul à avoir le locataire de Matignon dans le collimateur.

"Ce n'est pas de ma faute s'il y a un Premier ministre qui est rigide", se défaussait Jean-Claude Mailly, le numéro un de Force ouvrière, en haussant les épaules alors qu'il assurait que les grèves étaient vouées à se poursuivre, même durant la tenue de la compétition et quand bien même cela donnerait une mauvaise image de l'Hexagone à l'étranger.

Les violences émaillent de plus en plus les manifestations
Les violences émaillent de plus en plus les manifestations © BFMTV

Une mauvaise image qui pourrait avoir des répercussions

Alors que les retombées économiques de l'Euro 2016 s'annonçaient juteuses (environ 1,2 milliard d'euros), cette grogne pourrait avoir de sévères impacts sur une machine du tourisme déjà grippée par les attentats du 13 novembre.

Les images des échauffourées autour des cortèges tournent déjà en boucle dans les médias du monde entier, donnant une "image désastreuse de la France", selon Didier Chenet du Syndicat national des hôteliers, cafetiers et traiteurs.

Après une année difficile avec une amputation significative de son chiffre d'affaire, il explique subir des annulations de réservations en cascade, notamment à cause des blocages. "Il est temps que les touristes et les Français puissent se sentir en sécurité et circuler librement", tempête-t-il.

L'intersyndicale a appelé à amplifier la mobilisation
L'intersyndicale a appelé à amplifier la mobilisation © BFMTV

Le gouvernement et les syndicats se regardent en chien de faïence

Syndicats et gouvernement se renvoient la balle, se rejetant mutuellement la faute.

"S'il y a des grèves nous ferons en sorte d'éviter trop de désagréments pour tous ceux et toutes celles qui sont seront là. En tout cas le gouvernement tient bon sur sa position et ne veut pas faire l'objet d'un chantage", assurait Thierry Braillard le secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports.

Alain Vidalies a quant à lui a appelé les cheminots à leur responsabilité, ce dimanche sur Fance Info, rappelant que "l'Euro est un enjeu important pour la France".

Une situation inextricable ?

Chacun campe sur ses positions et dans ces conditions il sera difficile d'apaiser le climat explosif et d'accueillir la compétition dans de bonnes dispositions.

Selon Laurent Neumann, éditorialiste politique de BFMTV, c'est entre les mains du président de la République que se trouve la "clef" pour résoudre le problème.

"Il y a l'Euro qui arrive bientôt, c'est le moment de sortir son sifflet et siffler la fin de la récréation et de se mettre autour d'une table", a-t-il prévenu.

Marie-Caroline Meijer avec Rym Bey