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"Libérer la parole": Attal justifie le choix de l'anonymat pour les questionnaires sur le harcèlement scolaire

Tous les élèves à partir du CE2 vont être invités à remplir un questionnaire anonyme pour évaluer s'ils sont victimes de harcèlement scolaire. Lors d'un déplacement à Paris ce mardi, Gabriel Attal a estimé que l'anonymat pouvait permettre de "libérer la parole" sur ce sujet.

À partir de ce jeudi 9 novembre, un questionnaire sur le harcèlement scolaire va être déployé dans toutes les classes de France, du CE2 jusqu'à la terminale. Les élèves "se verront proposer de remplir une grille d'auto-évaluation non nominative visant à évaluer s'ils sont susceptibles d'être victimes de harcèlement scolaire" a détaillé fin octobre le ministère de l'Éducation nationale dans un communiqué.

"C'est un questionnaire qui va avoir une double utilité, a expliqué le ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, ce mardi 7 novembre à l'occasion d'un déplacement dans un lycée parisien aux côtés de Brigitte Macron. "D'abord, il va nous permettre au niveau national d'avoir une vision plus claire et plus actualisée sur le phénomène du harcèlement", a-t-il affirmé.

Ce questionnaire doit aussi permettre "d'identifier s'il y a des cas de harcèlement et donc s'il faut engager un travail spécifique au sein de la classe ou de l'établissement", selon le ministre.

Il doit s'agir d'"un moyen de provoquer la discussion et de répondre à des situations qui sont parfois des situations de détresse et qui ne sont pas toujours signalées", a poursuivi Gabriel Attal.

Deux heures banalisées entre le 9 et le 15 novembre

Cette grille comporte quatre groupes de questions: "Avant d'aller à l'école", "À l'école", "Sur Internet ou sur les écrans" et "Comment te sens-tu?" en élémentaire (33 questions au total), et des thèmes similaires pour le collège et le lycée (44 questions à chaque fois).

Les collégiens se voient par exemple demander s'ils ont "peur d'aller au collège à cause d'un ou plusieurs élèves", s'ils ont "menti pour rester chez (eux)", s'ils ont "été mis(e) à l'écart dans la cour par un ou plusieurs élèves", s'ils mangent "seul(e) à la cantine", si des élèves "font courir des rumeurs sur (eux)" ou les ont "bousculés volontairement".

Il leur est également demandé s'ils ont reçu "des messages insultants ou menaçants" sur Internet ou les réseaux sociaux, si "des photos ou messages circulent" sur eux sans leur accord, ou encore s'ils ont "du mal à faire (leurs) devoirs", à "s'endormir" ou ont "mal au ventre ou à la tête" à cause de ce qu'ils vivent au collège. Deux heures du temps scolaire doivent être banalisées pour que les élèves remplissent ce document entre le jeudi 9 novembre et le mercredi 15 novembre.

L'anonymat, un atout ou un frein?

Les élèves doivent remplir ce questionnaire de façon anonyme, ce que certains acteurs de l'Éducation nationale déplorent. Le syndicat Snuipp estime par exemple que les enseignants "ne pourront pas traiter les situations individuelles qui en ressortiraient" et que, "quels qu’en seront les résultats", il ne sera pas possible "d’agir directement" sans savoir qui a rempli quelle grille.

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Ce mardi, Gabriel Attal a assumé le choix de l'anonymat pour ce dispositif: "Je pense que pour libérer la parole une première fois à travers ce questionnaire (...) c'est important" qu'il soit anonyme, a-t-il déclaré au lycée Pierre-Gilles de Gennes, dans le 13e arrondissement de Paris.

"Provoquer des discussions"

Il a affirmé avoir échangé avec plusieurs acteurs du milieu éducatif, arrivant à la conclusion que "le risque, c'est qu'un élève, qui aujourd'hui déjà n'ose pas parler, est-ce qu'il oserait davantage signer un papier dans lequel il dit qu'il est harcelé, ce n'est pas certain".

Le ministre a estimé que l'anonymat n'empêchera pas les enseignants de détecter quel élève a signalé des situations de harcèlement. "Je pense que les enseignants, s'ils voient que dans les questionnaires de leur classe, il y a un ou deux élèves qui se disent harcelés ou en tout cas dont on peut comprendre qu'ils sont harcelés", cela "provoquera la discussion" et les enseignants pourront identifier et accompagner les personnes concernées.

Sophie Cazaux