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"L'empathie peut s'apprendre": le jeu des trois figures, une solution face au harcèlement scolaire?

Le harcèlement à l'école, qui toucherait un élève sur dix, a été érigé en priorité absolue du gouvernement pour l'année scolaire 2023-2024, après le suicide de la jeune Lindsay, 13 ans, au printemps dans le Pas-de-Calais

Le harcèlement à l'école, qui toucherait un élève sur dix, a été érigé en priorité absolue du gouvernement pour l'année scolaire 2023-2024, après le suicide de la jeune Lindsay, 13 ans, au printemps dans le Pas-de-Calais - Emmanuel DUNAND © 2019 AFP

Invité sur l'antenne de BFMTV ce mercredi, le psychiatre Serge Tisseron a exposé les règles du "jeu des trois figures", une activité théâtrale qui doit permettre aux élèves de développer leur empathie, mais aussi de libérer leur parole.

Des mesures qui trouvent leur inspiration à l'étranger. Ce mercredi, le gouvernement va présenter son plan interministériel pour lutter contre le harcèlement scolaire. Parmi les avancées notables, l'exécutif souhaite la mise en place de brigades dédiées dans les rectorats, mais aussi la confiscation du portable dans les cas graves.

Également pressenti, la mise en place de cours d'empathie dès le plus jeune âge, une mesure tout droit venue des pays nordiques, où cet enseignement existe depuis déjà plusieurs années. En France, alors que les cas de harcèlement se multiplient, certaines écoles ont déjà, en phase de test, délivré certains cours d'empathie.

"Apprendre à se mêler de ce qui ne les regarde pas"

Invité ce mercredi matin sur l'antenne de BFMTV, le psychiatre Serge Tisseron, qui au cours de sa carrière a longuement travaillé sur le comportement des plus jeunes, estime que "l'empathie peut s'apprendre."

Lors de cette prise de parole, il a longuement évoqué "le jeu des trois figures", qu'il a lui-même créé en 2005, et qui consiste en "une activité théâtrale ou les volontaires jouent tous les rôles. Ils se mettent dans la peau du harceleur, de la victime ou d'un tiers, qui peut être un témoin", décrit-il.

Comme l'explique le psychiatre, c'est cette figure du "tiers", et son empathie, qui doit être développée. "Il faut apprendre à se mêler de ce qui ne les regarde pas. Le problème du témoin, c'est qu'il tient la clé des situations de harcèlement."

"Aujourd'hui, le témoin, le plus souvent, se tait. Il a l'impression de ne pas avoir de légitimité, il a peur de se mettre la classe à dos. Il faut un travail pour que les témoins prennent des phrases de réflexe pour intervenir dans des situations de harcèlement. L'empathie c'est bien, intervenir pour la manifester, c'est encore mieux", insiste Serge Tisseron.

Si ce jeu est déjà testé dans plusieurs écoles, des versions qui concernent les collégiens, mais aussi les lycéens sont actuellement en développement. "C'est un protocole différent, il y a une histoire, il faut imaginer une fin, et jouer cette fin où personne ne se sent malmené lésé", conclut-il.

"Comprendre pourquoi"

La présentation du plan interministériel prévue ce jour intervient après une récente visite du ministre de l'Éducation à Copenhague. Depuis de longues années, au Danemark ou en Finlande, sont mis en place des programmes spécifiques pouvant être qualifiés de "cours d'empathie." Auprès de BFMTV.com, Catherine Verdier, psychologue, thérapeute, analyste pour enfants et adolescents souligne leur importance afin de "développer les aptitudes psychosociales."

"Comprendre pourquoi son copain pleure, de quoi il a besoin... C'est le travail par rapport aux émotions qui amène à l'empathie", ajoute la spécialiste.

Des mesures qui semblent porter leurs fruits. Selon les données recueillies dans plus de 200 écoles finlandaises, la part des enfants se disant harcelés est passée de plus 16% en 2009 à moins de 12% en 2018. Au Danemark, 70% des professionnels trouvent que les enfants font preuve de davantage de bienveillance grâce à ce programme.

https://twitter.com/Hugo_Septier Hugo Septier Journaliste BFMTV