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Pour la première fois, des chercheurs ont créé des embryons humains synthétiques

Embryon en formation, photo d'illustration.

Embryon en formation, photo d'illustration. - -

Cette avancée scientifique majeure doit permettre de faire progresser la recherche, notamment sur les maladies génétiques. Une découverte qui soulève cependant des enjeux éthiques et légaux.

Une percée scientifique et de nombreuses questions. Comme révélé mercredi par le Guardian, des scientifiques britanniques ont réussi a créer les premiers embryons synthétiques humains. Des organismes nés de cellules-souches, sans sperme ni ovule.

C'est la professeur Magdalena Żernicka-Goetz, de l'université de Cambridge et de l'Institut de technologie de Californie qui a annoncé cette découverte. Une annonce faite à l'occasion de la réunion annuelle de la Société internationale pour la recherche sur les cellules-souches. Pour l'instant, le contenu de ses recherches n'a pas été formalisé dans une revue scientifique.

Étudier le processus de développement des embryons

À ce stade, ces organismes n'ont ni cœur, ni cerveau, mais doivent permettre d'étudier le processus de développement des embryons. L'étude de "vrais" embryons n'est aujourd'hui possible en laboratoire que jusqu'à une limite légale de 14 jours au Royaume-Uni, et 7 jours en France. La recherche ne peut reprendre que par le biais d'échographies, à un stade de développement beaucoup plus lointain, pendant la grossesse.

C'est cette période inconnue que les chercheurs espèrent pouvoir observer grâce aux organismes synthétiques, et ainsi, mieux comprendre l'apparition des maladies génétiques dans l'espoir d'y remédier. Des études qui pourraient aussi comprendre et, peut-être, éviter certaines fausses-couches.

"L'idée est que si l'on modélise réellement le développement embryonnaire humain normal à l'aide de cellules-souches, on peut obtenir énormément d'informations sur la façon dont se déroule le développement, sur ce qui peut mal se passer, sans avoir à utiliser de (vrais) embryons précoces pour la recherche", a expliqué au Guardian Robin Lovell-Badge, responsable de la biologie des cellules-souches et de la génétique du développement à l'Institut Francis Crick de Londres.

Un cadre légal flou

Pour l'heure, il ne s'agirait que de théorie. La loi britannique précise qu'il serait illégal de "planter" un embryon synthétique dans un utérus pour amener le développement à terme. Mais jusqu'à quel point ceux-ci peuvent-ils être développés en laboratoire? Le flou demeure. Les chercheurs ont dépassé le cadre de la loi plus rapidement qu'anticipé, et envisagent la mise en place d'un code éthique pour s'auto-limiter.

"Si l'intention est que ces modèles ressemblent beaucoup à des embryons normaux, ils devraient être traités de la même manière (...) Or, la législation actuelle ne le prévoit pas. Les gens sont inquiets à ce sujet", a indiqué Robin Lovell-Badge.

Par ailleurs, si la législation autorisait bien d'implanter ces organismes, il n'est pour l'instant pas évident de savoir s'ils mèneraient à la naissance d'humains vivants "normaux". Des embryons synthétiques de souris ont été créés puis implantés dans un utérus, sans que cela n'aboutisse à une naissance viable. Des chercheurs chinois ont mené en avril dernier une expérimentation similaire, des signes de grosses sont apparus, mais le développement s'est arrêté au bout de quelques jours.

Tom Kerkour