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Santé: le fléau des actes chirurgicaux inutiles

Une étude de la Fédération hospitalière de France révèle d'importantes disparités dans le nombre d'actes chirurgicaux pratiqués d'un département à l'autre. Dans certains cas, les césariennes, IRM ou pontages sont inutiles, de l'aveu même des médecins.

Césariennes, pontages coronariens, chirurgie de la colonne vertébrale ou de l'oeil... Des interventions loin d'être anodines, mais qui sont pourtant parfois réalisées sans réelle nécessité. C'est ce que révèle une enquête conduite par la Fédération hospitalière de France (FHF) et rapportée par le JDD dimanche. La FHF, qui représente les hôpitaux, alerte sur ce phénomène depuis bientôt une décennie et réclame une réflexion sur la pertinence des actes pratiqués en France, aussi bien dans le public que dans le privé. Elle renouvelle son constat, avec cette fois des chiffres à l'appui.

"L’objectif de cette étude c’est la prise de conscience. C’est de faire prendre conscience aux responsables publics mais aussi aux professionnels de santé qu’on a des écarts de pratiques, d’un département à l’autre, d’une région à l’autre, qui sont extrêmement préoccupants et qui nécessitent d’être étudiés pour être expliqués, et surtout pour qu’on réduise ces écarts", explique Cédric Arcos, délégué général de la Fédération, interrogé sur BFMTV ce lundi.

88% des médecins reconnaissent y avoir recours

D'après la FHF, une majorité de médecins ont déjà conscience du problème et reconnaissent l'existence de ces interventions inutiles. En parallèle de son étude, l'institution a en effet conduit un sondage auprès des praticiens. Les résultats sont édifiants: sur 442 médecins, 88% disent avoir déjà prescrit certains actes ou examens qui après coup leur ont semblé injustifiés. 84% des professionnels interrogés considèrent que des actes ou examens inutiles sont pratiqués dans certains disciplines. Un constat partagé par 64% des directeurs d'hôpitaux.

Quant aux disparités, elles sont flagrantes sur les cartes de France utilisées pour illustrer l'étude. Concernant la césarienne, l'écart est de 1 à 20 d'un endroit à l'autre: la moyenne nationale est à 217 pour 100.000 habitants. Elle atteint 308 dans les 20% de départements qui la pratiquent le plus, comme ceux de la région parisienne qui entourent la capitale, et 149 dans les 20% de ceux qui opèrent le moins, comme la Gironde, les Landes ou les Pyrénées-Atlantiques.

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Des raisons financières?

La moyenne du nombre de pontages coronariens est quant à elle à 29 pour 100.000 habitants. Son pic se situe à 36, comme dans le Gard, et son taux le plus faible à 10, comme dans la Somme. Pour ce qui est de la chirurgie de la colonne vertébrale, la moyenne est de 148 pour 100.000, le taux le plus haut est de 255, comme dans les deux départements alsaciens, et le plus bas de 72, comme dans le Finistère et les Côtes-d'Armor.

Comment justifier de tels actes? En 2012, un sondage réalisé par la FHF révélait déjà l'existence d'actes inutiles. Pour 85% des médecins répondants, c'est la demande du patient qui est à l'origine d'une telle opération. Viennent ensuite la peur du risque judiciaire, un problème lié à la formation, l'absence de contrôle des pratiques et enfin les incitations économiques. Cette fois, la FHF n'interroge pas les raisons de telles disparités en France. Pour Alain-Michel Ceretti, interrogé sur BFMTV.

"C'est d'abord lié à des pratiques, mais aussi à des modes de financement de la santé en France qui est financée, pour la chirurgie ou la médecine de ville, à l'acte. Donc plus on fait d'actes, plus on est payés", avance le président de l'association Le Lien, qui défend les patients et usagers de santé. 

Charlie Vandekerkhove