BFMTV
Santé

Chirurgie ambulatoire: la France est-elle si en retard que ça?

Une salle de soins de l'hôpital de Thann, le 5 novembre 2016. (Photo d'illustration)

Une salle de soins de l'hôpital de Thann, le 5 novembre 2016. (Photo d'illustration) - Sébastien Bozon - AFP

La France serait en retard dans la chirurgie ambulatoire par rapport à ses voisins européens. Pour dresser ce constat, la Haute autorité de santé (HAS) et de nombreux professionnels du milieu médical s’appuient sur une étude datée, fortement incomplète.

La France est-elle en retard dans le développement de la chirurgie ambulatoire? La ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé ce dimanche dans le JDD qu'elle souhaitait, d'ici à 2022, que 7 patients sur 10 admis à l’hôpital en ressortent dans la journée, soignés, "contre 5 aujourd'hui".

Libération des lits, diminution des infections, allègement des procédures médicales… Si les avantages de cette simplification ont le mérite d'être étudiés, les professionnels du secteur, la Haute autorité de Santé (HAS), et même le ministère de la Santé, accusent au passage la France d'un retard par rapport à "ses voisins européens", notamment "les pays nordiques".

Ici et là, on peut donc lire qu'au Danemark, trois quarts des opérations sont réalisées en chirurgie ambulatoire, près de 70% en Suède et 50% en Norvège. Avec "seulement" 36% d'opérations réalisées dans ce cadre, la France serait donc à la traîne de ses voisins du nord.

Des données incomplètes

Problème: l’étude dont découlent ces constatations est très partielle. Les différents rapports et notices, dont "La chirurgie ambulatoire en 12 questions" diffusée par la HAS et l'Agence nationale d'appui à la performance (ANAP), renvoient quasiment tous vers une enquête de l'International Association for Ambulatory Surgery (IAAS) publiée en 2011.

Afin de mener cette étude, un formulaire déclaratif a été envoyé à une seule personne dans les 14 pays ou régions concernés. "Pour chaque pays, il est de la responsabilité de la personne de récupérer les données nationales et de s'assurer de leur validité", est-il expliqué dans le document. "Quand des chiffres sont trop surprenants, un astérisque a été ajouté à côté. Aucun effort n'a été mené pour clarifier ces chiffres", peut-on aussi lire.

De fait, un tableau en fin d’étude récapitule la fiabilité des données récupérées et si celles-ci sont complètes. Il apparaît alors que très peu de base de données ont été certifiées validées, notamment dans le cas de la France.

Evaluation de la qualité des données réunies par l'IAAS pour son étude.
Evaluation de la qualité des données réunies par l'IAAS pour son étude. © IAAS

En 2013, la HAS recommandait pourtant de traiter ces données "avec une grande prudence". De publication en publication, la source s'est éloignée et les précautions d'usage pour manipuler ces chiffres ont disparu. L'inspection générale des finances et celle des affaires sociales ont même repris ces chiffres en juillet 2014, appelant certes à la prudence mais n'en concluant pas moins que "les taux de chirurgie ambulatoire en France sont inférieurs à ceux de la plupart des pays européens".

Outre le fait qu'elles soient incomplètes, ces données sont diffusées par l'IAAS, une organisation dont le but est de... promouvoir la chirurgie ambulatoire.

En 2014, l'Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) notait notait un taux de recours à la chirurgie ambulatoire de 42,7%.

Liv Audigane