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Omicron: pourquoi la France a-t-elle du retard dans la détection de nouveaux variants?

La France réalise beaucoup moins de séquençages que d'autres pays européens. Cette technique est pourtant la plus efficace pour évaluer l'arrivée de nouveaux variants.

La France compte désormais son premier patient atteint du variant Omicron, détecté ce mardi à La Réunion. Un diagnostic rendu possible par la technique du séquençage, qui vient passer au crible les résultats de tests PCR positifs, permettant de mettre en lumière certaines mutations du virus.

C'est cette même technique du séquençage qui permet de surveiller l'apparition de nouveaux variants, quand des tests PCR positifs présentent des mutations jusqu'alors jamais observées.

Un retard français

Oui mais problème, la France séquence moins que ses voisins, et a donc accumulé du retard dans la détection de nouveaux variants, comme le rapporte Philippe Froguel, généticien et professeur au CHU de Lille et à l'Imperial College de Londres.

"La France a toujours mal fait dans le dépistage des nouveaux variants. On a toujours un mois de retard. Dans la plupart des autres pays, on fait travailler ensemble les centres de génétiques humaines, les centres hospitaliers... En France, on n'a jamais réussi à se mettre d'accord", tance Philippe Froguel.

Les chiffres semblent venir appuyer cette analyse. Si l'on s'attarde sur le nombre de séquençages réalisés ces 30 derniers jours, la France en a partagé 3419. En Allemagne, ce chiffre monte à 10.097, au Danemark 23.874 et au Royaume-Uni 134.005.

Il faudrait 40.000 séquençages par mois

En France, c'est l'Institut Pasteur qui est notamment chargé de séquencer des tests PCR positifs. Camille Capel, technicienne de laboratoire à l'Institut, a ainsi détaillé aux équipes de BFMTV comment elle venait "confectionner des librairies" de tests positifs, ensuite déposées dans un séquenceur. Une imposante machine venant passer au crible le virus.

Vincent Enouf, responsable adjoint du centre des virus des infections respiratoires à l'Institut Pasteur, explique qu'en France, il a été calculé que le nombre de séquençages à réaliser chaque semaine pour surveiller efficacement le virus était situé entre 8000 et 10.000 séquençages.

"Avec entre 8000 et 10.000 échantillons séquencés chaque semaine, on est suffisamment sensible pour déterminer la présence de nouveaux variants ou de surveiller un variant que l'on connait déjà" explique Vincent Enouf.

Soit 40.000 séquençages par mois, loin des 134.005 réalisés au Royaume-Uni, qui compte pourtant une population presque égale à la France. D'autant que ce chiffre ne représente que les séquençages qui ont été partagés par les chercheurs britanniques.

La solution du criblage

Le séquençage n'est cependant pas l'unique technique disponible pour venir repérer un variant dans un test PCR positif. Une fois les spécificités d'un variant connu par les scientifiques, ils peuvent avoir recours à la technique du criblage.

Comme le détaille François Blanchecotte, président du syndicat des biologistes, "le criblage prend trois heures, et on en fait des milliers par jour. Le problème, c'est qu'il faut se mettre d'accord sur la séquence à identifier".

Une technique néanmoins disponible uniquement quand un variant a été étudié et documenté par la communauté scientifique. Rendant donc le séquençage toujours indispensable pour surveiller l'arrivée de nouveaux variants. L'Afrique du Sud, épicentre de la diffusion du nouveau variant Omicron, devrait dépasser les 10.000 cas positifs cette semaine.

Jules Fresard