BFMTV
Santé

Amiante : Aubry va demander l'annulation de sa mise en examen

-

- - -

Mise en examen mardi, la maire de Lille entend bien faire valoir son droit à la défense. Avec ses avocats, elle rejette pied à pied les griefs formulés à son encontre.

Martine Aubry entend bien ne pas se laisser faire. Mise en examen dans le dossier instruit par la juge Marie-Odile Bertella-Geffroy, l'ex-première secrétaire du PS s'est défendue mardi de toute faute dans sa gestion du dossier quand elle était haut fonctionnaire dans les années 1980, rejetant un à un tous les griefs ayant justifié sa mise en examen.

Voici, dans le détail, ce qui lui est reproché et les arguments qu'elle compte invoquer pour demander l'annulation de sa mise en examen, qu'elle juge "incompréhensible".

Quel est le chef d'inculpation ?

L'ancienne patronne du PS a été mise en examen pour homicides et blessures involontaires par la magistrate Marie-Odile Bertella-Geffroy, qui s'intéresse notamment à la réponse des pouvoirs publics entre les années 1970 et l'interdiction de l'amiante en 1997. Martine Aubry est poursuivie en sa qualité d'ancienne directrice des relations du travail (DRT) du ministère du Travail entre avril 1984 et septembre 1987.

Comment peut-elle contester cette mise en examen ?

Martine Aubry a tout intérêt à éviter une mise en accusation dans cette affaire, dont les faits remontent à 25 ans. Dans cette optique, son avocat, Me Yves Baudelot, a déclaré vouloir déposer ce mercredi une requête en annulation de la mise en examen. Cette demande d'annulation peut être formulée par toute personne mise en examen dans un délai de six mois suivant sa première comparution. La loi du 5 mars 2007 dispose que les mis en examen peuvent, sous certaines conditions, demander au juge d'instruction de revenir sur sa décision et obtenir le statut de témoin assisté. Pour rejeter cette demande, le juge d'instruction doit rendre une ordonnance motivée faisant état des indices graves ou concordants justifiant sa décision.

Mais Me Berthelot semble penser que cette requête a peu de chances d'aboutir : "Pendant l'audition, la juge n'a pas fait la moindre objection à nos observations argumentées. Il est clair qu'il était hors de question pour elle d'aboutir à autre chose qu'une mise en examen."

Sur le fond, quelle est la ligne de défense de Martine Aubry ?

• Premier grief : a-t-elle tardé à retranscrire une directive européenne ?

Dans le détail, la juge reproche notamment à la DRT d'avoir tardé à transcrire dans la législation française une directive européenne de 1983 concernant la protection des travailleurs exposés à l'amiante.

Martine Aubry, a indiqué que le décret préparé par la DRT avait été transmis "dans les délais", en novembre 1986, au ministre en charge du dossier, à l'époque Philippe Séguin. Selon son entourage, la maire de Lille a par ailleurs dénoncé comme une contre-vérité le fait que trois articles de cette directive n'auraient pas été transposés, observant notamment que les dispositions prévues par deux d'entre eux étaient contenues dans le premier texte réglementant l'usage de l'amiante en France, le décret de 1977.

• Deuxième grief : a-t-elle négligé les données de la CNAM ?

D'après la juge, les données réunies par la CNAM auraient dû permettre à Martine Aubry de comprendre qu'une épidémie se développait.

Là encore, Martine Aubry a doublement démenti selon son entourage, affirmant que les analyses des données de la CNAM étaient même publiées à la Documentation française, et soutenant que ces données ne pointaient alors pas vers l'existence d'une épidémie. Au contraire, les cancers propres à l'amiante étaient très rares dans les années 1980, selon la maire de Lille.

• Troisième grief : a-t-elle participé au comité permanent amiante (CPA) ?

Ce comité est présenté par les victimes comme le lobby des industriels de l'amiante, qui aurait efficacement œuvré à retarder l'interdiction de l'amiante.

Martine Aubry rejette toute participation à ce comité. Mieux, elle a réaffirmé comme elle l'avait fait devant les policiers en janvier 2010, qu'elle ignorait dans les années 1980 l'existence même du CPA. Pour Mme Aubry, rien dans le dossier de la juge ne montre que le CPA ait eu une influence quelconque sur l'administration du Travail.