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Une colère "justifiée": le soutien des oppositions aux agriculteurs mobilisés

Des agriculteurs bloquent l'autoroute A64 - Toulouse-Bayonne - à hauteur de Carbonne en Haute-Garonne, le 20 janvier 2024 (photo d'illustration)

Des agriculteurs bloquent l'autoroute A64 - Toulouse-Bayonne - à hauteur de Carbonne en Haute-Garonne, le 20 janvier 2024 (photo d'illustration) - Ed JONES © 2019 AFP

Haro sur l'Europe et ses "normes", charges en hausse et "désespérance": la colère des agriculteurs témoigne d'un "ras-le-bol" profond des campagnes, qui puise sa source dans un sentiment d'"abandon" des pouvoirs publics dans un contexte difficile de transition climatique.

Routes bloquées, panneaux retournés... Les manifestations d'agriculteurs se multiplient depuis quelques semaines, en France comme ailleurs en Europe, contre des charges financières et des normes environnementales jugées trop lourdes.

Face à cette colère, les politiques se veulent au chevet des agriculteurs et le tir nourri des oppositions pousse l'exécutif à agir.

Les Républicains "soutiennent très clairement"

Dans une lettre adressée à Emmanuel Macron, Éric Ciotti demande au chef de l'État "d'annoncer une pause dans la dérive normative" et de "nous positionner avec force et clarté contre toutes les dérives bureaucratiques".

"Nous avons le devoir d’écouter cette colère et de lui répondre", a-t-il affirmé.

La droite "soutient très clairement" le mouvement des agriculteurs, "y compris les blocages" de route débutés cette semaine dans le sud-ouest, a affirmé ce dimanche le chef de file des députés Républicains Olivier Marleix.

"On soutient très clairement les agriculteurs dans leur mouvement, l'expression de leur colère (...) y compris les blocages malheureusement quand il faut se faire entendre", a-t-il déclaré sur France 3.

Selon lui, c'est surtout la hausse de la fiscalité sur le gazole non routier (GNR) qui "déclenche la colère" et "le gouvernement doit renoncer dans l'immédiat à cette mesure".

Mathilde Panot pointe la nécessité de "normes écologiques"

Un point de désaccord avec la présidente des députés LFI, Mathilde Panot, qui a mis en avant sur la même chaîne la nécessité de "normes écologiques".

Il y a cependant une "revendication qui est partagée par tout le monde, très largement, c'est: 'On veut vivre de notre travail'", a-t-elle ajouté, rappelant que son groupe avait déjà proposé un "prix plancher pour que les agriculteurs puissent vivre dignement", rejeté "à six voix à l'Assemblée nationale, à cause des macronistes et des LR".

Dans un communiqué, le groupe insoumis à l'Assemblée nationale estime que "ce sont d’abord les prix payés aux producteurs par les entreprises de transformation et de distribution" qui sont en cause.

Il dénonce "le gouvernement et l'Union européenne continuent de négocier des traités de libre-échange permettant l’importation de produits alimentaires à des prix bien inférieurs aux nôtres" et demande de "mettre en place des aides à la trésorerie pour faire face à la hausse des coûts de production".

Une colère "justifiée" pour la gauche

Dans le même camp, le secrétaire national du parti communiste, Fabien Roussel, a réclamé sur LCI "une loi de programmation pour notre agriculture" afin de remédier aux difficultés d'une profession qui "survit sous le seuil de pauvreté".

Demandant lui aussi à "maintenir" l'avantage fiscal sur le GNR, car les agriculteurs "n'ont pas d'autre choix que d'en utiliser pour leurs tracteurs", il a prévenu qu'"on ne fera pas la transition écologique contre eux".

Le sénateur EELV Yannick Jadot a estimé ce samedi sur France info qu'une "bonne partie de la colère" des agriculteurs est "justifiée", déplorant leurs conditions économiques et sociales "dramatiques" et une "crise écologique qui est aussi liée à ce modèle agricole".

L'élu écologiste affirme que le gouvernement doit accompagner les agriculteurs vers "un modèle agricole (...) plus rémunérateur, socialement protecteur et qui respecte l'environnement".

L'extrême droite fustige l'Union européenne

À l'extrême droite, le président de Reconquête Éric Zemmour a jugé sur BFMTV que le "sentiment de désespoir des agriculteurs" est le résultat à la fois de "la tyrannie de la commission de Bruxelles" et d'une "surtransposition des normes" par "l'administration française qui prend un malin plaisir à laver plus blanc que blanc".

La veille déjà, le numéro un du Rassemblement national, Jordan Bardella, avait dénoncé depuis la Gironde viticole "l'Europe de Macron qui veut la mort de notre agriculture".

Il a notamment demandé une "loi de patriotisme économique" pour les agriculteurs.

Le projet de loi du gouvernement reporté

Hausse des charges, retards de paiements des subventions agricoles, interdiction de pesticides autorisés ailleurs, crise de la maladie hémorragique épizootique (MHE), manque de considération, sentiment d'être écrasés, au nom de la transition écologique, par des normes... Les motifs de colère sont multiples.

La goutte d'eau qui a fait déborder le vase est sans doute l'inflation qui s'est traduite par une nette hausse des coûts de production des agriculteurs. Une hausse parfois ignorée par les industriels malgré la loi Egalim qui prévoit notamment de répercuter ces coûts tout au long de la chaîne agroalimentaire lors des négociations commerciales.

Face à la gronde, le projet de loi sur l'installation de nouveaux agriculteurs, qui devait être présenté mercredi en Conseil des ministres, va être reporté de "quelques semaines" pour être complété d'un volet "simplification", a annoncé ce dimanche le ministre de l'Agriculture.

Salomé Robles avec AFP