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Politique

Un Sénat à droite, ça change quoi?

Le Sénat a basculé à droite, ce qui aura des conséquences pour le gouvernement.

Le Sénat a basculé à droite, ce qui aura des conséquences pour le gouvernement. - Jean-Pierre Muller - AFP

Avec un Sénat qui bascule à droite, la tâche du gouvernement de Manuel Valls va se compliquer. La majorité socialiste ne peut plus réviser la Constitution, et le travail législatif pourrait être ralenti.

Le Sénat a basculé à droite ce dimanche. L'UMP et ses alliés occupent désormais 189 des 348 sièges que compte la haute assemblée. Pour la première fois depuis le début du mandat de François Hollande en 2012, l'exécutif va donc gouverner sans l'appui du Sénat. Qu'est-ce que cela va changer?

Un processus législatif ralenti

Les sénateurs UMP et UDI risquent de ralentir le processus législatif. Déjà, avant les résultats de ce dimanche, ils prévoyaient de batailler sur chaque texte de loi proposé par la majorité socialiste.

"Le président du Sénat (qui devrait être membre de l'UMP, ndlr) peut s'opposer à la procédure accélérée, c'est à dire le fait qu'il n'y ait qu'une lecture des textes", avait ainsi assuré Roger Karoutchi, sénateur UMP des Hauts-de-Seine.

Ainsi, tous les grands textes pourront être amendés, retardés, même si c'est l'Assemblée nationale, toujours à gauche, qui a le dernier mot.

  • Pas de réforme constitutionnelle

Pour réformer la Constitution, il faut obtenir le vote de 3/5e des députés et sénateurs réunis en Congrès. Mathématiquement, les socialistes n'ont plus la capacité d'obtenir seuls une telle majorité.

Ainsi, le gouvernement sera obligé de proposer des réformes consensuelles: il sera donc par exemple impossible d'instaurer une dose de proportionnelle aux élections législatives.

D'autres sujets de société pourraient faire l'objet d'un blocage du Sénat, comme l'instauration du droit de vote des étrangers aux élections locales. Mais l'exécutif pourra passer par la voix du référendum (article 89 de la Constitution). L'hypothèse est cependant peu probable quand on connaît le déficit de popularité du président de la République: un référendum risquerait de se transformer en un vote "pour ou contre François Hollande".

Un nouveau rapport de force, de nouveaux débats politiques

A côté de l'ordre du jour du gouvernement, la Conférence des présidents du Sénat fixe le programme de travail des séances plénières et définit l'ordre du jour. Ainsi, sans contrôler totalement l'agenda, les sénateurs de droite pourront imposer des débats politiques, aussi bien dans l'hémicycle que dans les médias, selon le Journal du Dimanche.

  • Par ailleurs, le poids de la droite devrait augmenter en commission mixte paritaire. Cette dernière est composée de sept députés et sept sénateurs en cas de "désaccord persistant entre les assemblées sur un projet ou une proposition de loi".

Autre changement: le président du Sénat, qui devrait être issu des rangs de l'UMP, aura un nouveau poids politique et médiatique. Ainsi, Gérard Larcher ou Jean-Pierre Raffarin, s'ils sont élus, auront davantage la possibilité de prendre la parole publiquement pour s'opposer à François Hollande et sa politique.

La droite à la tête de toutes les commissions?

Toutes les présidences de commission au Sénat pourraient basculer à droite, assure le Journal du Dimanche. Or ce n'était pas le cas quand la gauche était majoritaire dans la haute assemblée. Les socialistes pourraient ne même pas obtenir la tête de la commission des Finances, celle-ci étant attribuée à l'opposition depuis le mandat de Nicolas Sarkozy. Or selon Philippe Marini (UMP), son actuel président, la droite incarne toujours "cette opposition".

Un président par intérim de droite

En cas de "vacance" du président de la République "pour quelque cause que ce soit", ou "d'empêchement", il revient au président du Sénat d'assurer l'intérim, selon l'article 7 de la Constitution. Ainsi, si François Hollande mourrait ou démissionnait, l'Etat serait dirigé jusqu'à la mise en place d'une nouvelle élection par un homme de droite.

Par ailleurs, le président du Sénat peut nommer trois des neufs membres du conseil supérieur de la magistrature, trois des membres du Conseil constitutionnel, mais aussi certains des membres du conseil supérieur de l'audiovisuel ou de l'autorité des marchés financiers. 

Il peut enfin saisir le Conseil constitutionnel si les textes des lois votées lui paraissent non conformes à la Constitution. Une hypothèse plus que probable avec un président UMP, qui dispose donc d'un pouvoir de nuisance non négligeable.

Maxence Kagni