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Quand le gouvernement faisait capoter une loi pour lutter contre l'évasion fiscale

A l'heure des "Panama papers", la classe politique s'insurge contre l'évasion fiscale. Plusieurs députés ont déjà demandé que les entreprises françaises rendent publiques leurs informations financières. Mais en décembre dernier, le gouvernement avait procédé à un passage en force pour les freiner.

Le secrétaire d'Etat au Budget a dit espérer vendredi que le scandale financier "Panama papers" incitera les fraudeurs à régulariser leur situation et fera avancer la communauté internationale sur la transparence fiscale. Christian Eckert a estimé que "l'émoi" suscité par les révélations des "Panama papers" allait "pouvoir faire progresser les choses au niveau international". Si tel est le cas, ce ne sera pas grâce à lui.

Comme l'avait rapporté BFMTV.com en décembre dernier, ONG, dont Oxfam France, CCFD-Terre Solidaire et ONE France, membres de la "Plateforme Paradis fiscaux et judiciaires" s'étaient insurgées contre le "passage en force" du gouvernement.

L’enjeu d’un amendement proposé en décembre dernier par cinq députés socialistes et écologistes était d'imposer plus de transparence financière pour les grandes entreprises. Cette disposition, qui oblige les entreprises à publier leurs résultats, a d’abord été adoptée à l’Assemblée lors d'une séance de nuit avant d’être remise en cause car le gouvernement ne l’entendait pas de cette oreille.

Un deuxième vote à 1h du matin

Les députés avaient dans un premier temps adopté des amendements socialistes et écologistes en faveur de ces mesures, destinées à lutter contre l'optimisation et la fraude fiscale, par 28 voix contre 24. Mais Christian Eckert a aussitôt demandé une suspension de séance en vue d'une seconde délibération.

Elle lui a finalement donné raison et les députés ont rejeté le dispositif par 25 voix contre 21, 40 minutes plus tard. A plusieurs députés qui ne cachaient pas leur agacement, Christian Eckert a répliqué: "C’est moi qui décide a priori". 

Quatre mois après, l’un des députés à l’origine de l'amendement 340 a son explication.

"Je pense les pressions exercées par les grandes entreprises cotées aux CAC 40 ont dû être telles sur le gouvernement et le président de la république que ceux si ont reculé", avance le socialiste "frondeur" Pascal Cherki.

La France ne veut pas agir sans l'Europe

Bercy se justifie autrement en expliquant que la France ne peut pas agir seule, au risque de voir ses grandes entreprises, se délocaliser.

"Si une telle décision avait été prise le risque serait important que de grandes entreprises françaises mettent leur siège social ou leur holding dans des pays où une telle disposition ne serait pas adoptée.

Le mieux c'est que tous les pays d'Europe le fassent en même temps", explique Christian Eckert.

En clair, la transparence publique des grandes entreprises, ce sera, tous les pays européens ensemble, ou pas du tout.

K. L. avec Anne Saurat-Dubois