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"Pas là pour souffrir": après un autre 49.3, les députés macronistes assument le service minimum

Élisabeth Borne et plusieurs membres du gouvernement le 11 octobre 2022 à l'Assemblée nationale.

Élisabeth Borne et plusieurs membres du gouvernement le 11 octobre 2022 à l'Assemblée nationale. - Thomas SAMSON / AFP

Épuisés par le projet de loi de finances et remontés contre les oppositions, une grande partie des députés Renaissance étaient absents lors des premiers pas du budget de la Sécu, contraignant Élisabeth Borne à utiliser à nouveau le 49.3.

Des rangs de députés Renaissance très dégarnis ce jeudi. À peine entamé, le budget de la Sécu a pris un coup d'arrêt après qu'Élisabeth Borne a dégainé à nouveau la carte du 49.3. Si le gouvernement a été mis en très grande difficulté par les oppositions, c'est parce que de nombreux élus ont pratiqué la politique de la chaise vide.

"Très vite, on a deviné la fin de la pièce"

Dès le début du texte, le ton a été donné. Les députés des camps adverses, plus nombreux que les élus macronistes, à la majorité relative depuis les dernières élections législatives, n'ont eu de cesse de mettre en minorité l'exécutif.

"On n'est pas venu là pour souffrir. Très vite, on a deviné la fin de la pièce de théâtre donc on a eu envie d'aller rapidement à la conclusion", décrypte Prisca Thevenot, porte-parole du groupe auprès de BFMTV.com.

De fait, l'article premier qui permet de valider les dépenses de la Sécurité sociale de l'année 2021, est largement rejeté avec 84 voix contre et seulement 66 pour. De quoi susciter la colère de Gabriel Attal, le ministre délégué aux Comptes publics, qui a fait part de son "très grand étonnement" face à ce résultat.

Des députés "découragés"

"Ce genre d'ambiance où on voit que toutes les choses qui ont pu être votées avec les oppositions en commission sont toutes finalement rejetés dans l'hémicycle peut clairement en décourager certains", répond sans ambages Fadila Khattabi, la présidente de la Commission des affaires sociales.

Sur les bancs de la droite, après la prise de parole du locataire de Bercy, le ton est à la moquerie, le député Thibault Bazin rappelant que "c'est au gouvernement de mobiliser les 240 députés de la majorité".

Pas d'appel pour venir siéger en masse

Si le message semble reçu - l'article suivant étant adopté à 2 voix près -, la première partie du PLFSS, qui permet de clôturer les comptes de la Sécurité sociale, est également largement rejeté quelques minutes plus tard. Après un nouveau coup de gueule du ministre, Marine Le Pen décrypte le sous-texte.

"On a un tout petit peu le sentiment que vous surjouez l'indignation, peut-être parce que vous apprêtez à dégainer un certain article", analyse la présidente du groupe RN.

Renaissance possède pourtant bien un outil pour battre le rappel quand ses troupes ne sont pas assez nombreuses face aux oppositions pour faire passer les textes: une boucle Telegram qui demande aux députés de venir en séance.

Si cette boucle a des "allures d'infantilisation complète", dixit un député qui y voit même "presque du harcèlement physique", elle n'a cette fois-ci pas été beaucoup alimentée.

"Pas la peine de refaire le coup du budget"

"C'est aussi du management. On a des députés épuisés et qui n'ont pas trop apprécié de siéger 55 heures pour le budget sans avoir pu vraiment modifier le texte. C'était pas la peine de leur refaire le coup sur le budget de la Sécu", décrypte un conseiller ministériel.

Après plus de 8 jours de débat sur le projet de loi de finances, des amendements votés dans l'hémicycle, et parfois soutenus par des députés de la majorité n'ont pas été retenus. C'est par exemple le cas de la taxe sur les super dividendes, défendu par le Modem ou encore de l'amendement sur les EHPAD qui visaient à baisser la facture des résidents. Au gran dam de certains députés.

"C'est vrai que chez nous, nos élus spécialistes du budget ont lâché. On avait le besoin de se poser un peu, après un peu de frustation", résume le député Horizons Frédéric Valletoux.

Un éventuel troisième 49.3

De quoi pousser la Première ministre à prendre le chemin de l'Assemblée nationale moins de 8 heures après le début des débats pour déclencher le 49.3. Si la manœuvre écourte les débats, elle envoie un drôle de signal, loin du dialogue mis en scène pendant le projet de loi de finances.

Le gouvernement pourrait à nouveau dégainer cette carte constitutionnelle la semaine prochaine pour faire entièrement adopter le budget de la Sécu dont une dernière partie reste encore à examiner.

Marie-Pierre Bourgeois