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Loi immigration: Gérald Darmanin accusé par une députée de la macronie de "piétiner leurs valeurs"

La députée apparentée Renaissance Stella Dupont a croisé le fer avec le ministre de l'Intérieur en réunion de groupe. Attaqué sur le projet de loi immigration, durci par le Sénat avec son soutien, Gérald Darmanin lui a expliqué avoir souffert de racisme dans sa jeunesse.

Un échange sous très haute tension à l'image des débats qui s'annoncent dans l'hémicycle en décembre. Présent lors de la réunion de groupe des députés macronistes ce mardi matin, Gérald Darmanin a été interpellé sur le contenu du projet de loi immigration, considérablement durci par le Sénat mi-novembre.

La députée apparentée Renaissance Stella Dupont a accusé le ministre de l'Intérieur de "piétiner les valeurs originelles du macronisme" de la majorité présidentielle, d'après des informations de BFMTV.

Des députés qui s'inquiètent d'un texte jugé déséquilibré

Le locataire de la place Beauvau est attendu de pied ferme alors que la commission des lois a commencé l'examen de ce texte ce mardi soir avant un examen en séance mi-décembre. Les députés de l'aile gauche s'inquiètent de la version sénatoriale, très loin de la copie initiale du gouvernement qui avait promis "l'humanité" et "la fermeté".

Sous l'égide du patron des sénateurs LR, les membres de la chambre haute ont adopté des dispositions qui n'existaient pas dans la version présentée par l'exécutif.

Parmi celles-ci, on compte par exemple la suppression du droit du sol, la fin de l'aide médicale d'urgence ou encore la suppression de l'article 3 qui cherchait à créer un titre de séjour pour les personnes sans-papiers qui travaillent dans des secteurs en tension comme le BTP ou la restauration. Avec l'assentiment de Gérald Darmanin qui a salué "un texte co-construit", "enrichi par le Sénat".

Darmanin comme "un étranger dans sa famille politique"

De quoi agacer une partie de la macronie dont Stella Dupont, une proche de l'ex-ministre Barbara Pompili. La députée fait partie des élus qui ont défendu l'article 3 en septembre dernier aux côtés de l'écologiste Julien Bayou et Fabien Roussel en une de Libération.

"Très en colère" par l'interpellation de la députée d'après une participante, Gérald Darmanin lui a rétorqué avoir lui-même souffert de racisme dans sa jeunesse "avec ses cheveux frisés".

L'ex-pilier des Républicains, qui a rejoint Emmanuel Macron après sa victoire à la présidentielle en 2017, s'est également senti mis en cause dans son parcours politique.

"C'est comme ça que je le ressens, comme un étranger dans ma famille politique", s'est agacé l'ancien maire de Tourcoing, avant de rappeler qu'il était membre du gouvernement depuis 7 ans, et qu'il faisait preuve de loyauté.

À la recherche des votes de la droite

Il a également accusé Stella Dupont d'utiliser les mêmes méthodes que La France insoumise et le Rassemblement national, qui jugeraient les gens d'après "le milieu d'où elles viennent".

Si Gérald Darmanin a réagi avec virulence, c'est que le ministre de l'Intérieur sait qu'il joue très gros. À l'Assemblée, le quadragénaire doit s'atteler à convaincre la macronie. Certains de la majorité ont déjà annoncé ne pas vouloir voter en faveur de ce texte si la création d'un titre de séjour pour les métiers en tension n'était plus en débat.

Les députés de droite, eux, ont déjà expliqué refuser farouchement d'aller dans ce sens. L'élu du Nord a pourtant désespérément besoin des voix des députés LR en l'absence de majorité absolue. Avec un objectif: éviter à tout prix un 49.3 au coût politique très lourd pour son avenir.

"Ce qu'on gagne d'un côté, on le perd de l'autre, peu importe le texte qu'on vote à la fin. C'est la quadrature du cercle", nous expliquait en soupirant un député Renaissance la semaine dernière.

Une tribune de proches du président

En attendant, l'aile gauche des députés est bien décidée à continuer de jouer sa propre partition. Dans un courrier qu'a pu se procurer BFMTV.com, plusieurs très proches ou anciens lieutenants d'Emmanuel Macron, comme le co-fondateur d'En marche (ex-Renaissance) Jean-Marc Borello ou l'économiste Jean Pisani-Ferry, ont écrit à la majorité présidentielle.

Dans cette tribune, ils les enjoignent à "ne pas voter" le projet de loi immigration dans sa version sénatoriale et s'agacent de sa "stigmatisation généralisée des personnes étrangères".

Perrine Vasque avec Marie-Pierre Bourgeois