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Bayrou, Borloo: les enjeux d’une union au centre

Jean-Louis Borloo et François Bayrou sont sur le point d'officialiser leur union.

Jean-Louis Borloo et François Bayrou sont sur le point d'officialiser leur union. - -

A 24 heures de la conférence de presse commune entre Jean-Louis Borloo et François Bayrou, retour sur les enjeux d’un rapprochement Modem-UDI très stratégique.

Le rapprochement était connu. Il ne manquait plus que le faire-part. Dimanche, François Bayrou et Jean-Louis Borloo, respectivement dirigeants du MoDem et de l’UDI, ont annoncé sur Twitter une conférence de presse commune mardi 5 novembre, pour annoncer les termes de leur union.

> Se poser en opposants

Le but pour les deux dirigeants: se poser ensemble en opposants crédibles. "Les Français rejettent violemment le pouvoir socialiste, ils sont coincés entre une UMP dont ils ne manifestent pas le désir et une extrême droite qui leur sert d'exutoire", analyse le porte-parole des députés UDI, Jean-Christophe Lagarde. L’idée est donc, pour cette formation à deux têtes, de se poser comme une "alternative" au FN, dont la poussée dans les sondages inquiète.

Pour cela, les deux camps ont élaboré une charte commune. Sans prévoir la naissance d’un nouveau parti, elle officialise la création d’un bureau national réunissant les parlementaires MoDem et UDI. "Pas de fusion, mais une coopération", précise Marc Fesneau, secrétaire général du MoDem, à BFMTV.com. Selon le texte, les deux partis se présenteront ensemble aux élections. Et se posent dans l’opposition au gouvernement, au niveau local comme national.

> Préparer les élections de 2014

Mais localement, les choses se passent différemment. A commencer par Paris: samedi, Jean-François Martins, l’unique conseiller de Paris MoDem, a décidé de soutenir la candidate socialiste, Anne Hidalgo, rejetant "le choix d'une alliance avec la droite parisienne". Conséquence de sa décision: Jean-François Martins sera exclu du MoDem.

Mais à se montrer trop intransigeant, le parti de François Bayrou prend le risque de s'écarter de la gestion de villes importantes. A Dijon, ville dirigée par le socialiste François Rebsamen avec le MoDem, il pourra donc de nouveau faire liste commune avec le PS, sans que les colistiers MoDem soient exclus du parti. On devrait compter d'autres exceptions de ce genre. Des exceptions qualifiées d'"ambiguïté" par certains cadres de l’UDI, comme le député de Côte d'Or, François Sauvadet, qui explique sur Twitter qu'il n'assistera pas à la conférence de presse mardi.

Je ne serai pas du mariage mardi. Bayrou n a pas levé toutes les ambiguïtés à Dijon, Paris et ailleurs. J attends les noces de coton
— François SAUVADET (@sauvadet) November 3, 2013

Quant aux élections européennes, il s’agit de "présenter des listes communes Modem-UDI, mais ouvertes à d’autres", précise Marc Fesneau. Société civile, mais aussi UMP ou sociaux-démocrates, voire écologistes. Et peu importe les logiques de partis: "le principal, c’est les convictions", affirme le secrétaire général du MoDem.

> "Surmonter les différences"

C’était à prévoir, le rapprochement Bayrou-Borloo n’enchante pas tout le monde. A commencer par certains au sein de l’UDI, qui ont du mal à oublier que le président du MoDem a appelé à voter pour François Hollande en 2012. "Sur le terrain, il y a un vrai rejet de François Bayrou", affirme le député UDI de Mayenne Yannick Favennec, qui ne cache pas ses "réserves" face à cette union. "Il a trahi son électorat en 2012, et il n’est pas connu pour sa fidélité en politique", explique l'élu.

Un sondage publié dans Le Parisien dimanche crédite d’ailleurs l'ancien ministre de l'Education de 56% d’opinions négatives. 45% des sondés souhaitent que François Bayrou reste "indépendant", comme il l'a si souvent revendiqué dans le passé face à d'autres centristes. Marc Fesneau, lui, nuance: "Certes, il y a eu des divergences, un passé parfois difficile, mais l’idée qu’on se rassemble plaît. Les Français n’aiment pas les divisions. Il faut respecter les parcours de chacun. On est d’accord sur beaucoup de choses: le reste, c’est notre richesse."

A l’extérieur du parti aussi, certains voient d’un mauvais œil ce rapprochement. Notamment Nicolas Sarkozy, qui craint un départ de certains UMP pour le centre, raconte Le Lab. L'ancien président n’apprécierait que moyennement que le centre soit porté notamment par celui qui a pris parti contre lui en 2012. L'ancien ministre UDI Yves Jégo, ne s'en préoccupe guère et confie au Lab: "plus les sarkozystes réagiront, plus ils nous feront monter". Le pari est lancé.

Ariane Kujawski