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Et si la primaire UMP était déjà un échec?

Nathalie Kosciusko-Morizet dans le piège de la primaire UMP à Paris

Nathalie Kosciusko-Morizet dans le piège de la primaire UMP à Paris - -

Mobilisation en-deçà des attentes, résultat incertain, dénonciation de fraudes: le vote pour le premier tour de la primaire de l'UMP à Paris s'est ouvert vendredi à 8 heures, sur fond de tensions entre les quatre candidats et d'interrogations sur les conditions techniques de la consultation.

"Cette primaire UMP est devenue une vraie loterie!". Annoncée comme un plébiscite pour légitimer Nathalie Kosciusko-Morizet, la primaire de l’opposition pour la mairie de Paris, dont le premier tour se déroule de vendredi à lundi, s’est transformée en énorme point d’interrogation pour l’UMP.

"Peu de militants se sont inscrits et la sociologie de ceux qui se feront l'effort de voter n’a rien à voir avec la sociologie des électeurs de Paris… C’est la loterie. Et, au final, l’UMP pourrait bien se tirer une balle dans le pied", commente Thomas Guénolé, politologue et spécialiste de la droite.

Selon les derniers chiffres communiqués par le parti, seuls 17.500 inscrits (qui se sont acquittés d’un écot de trois euros) pourront participer à cette primaire qui aura finalement peu intéressé. Mais au-delà de cette faible participation, pourquoi ce scrutin est-il déjà un semi-échec? Éléments de réponse.

> Un risque d'entrisme

"L’échéance de la primaire UMP est tellement éloignée des élections municipales, que les électeurs seront très peu nombreux à voter. Dans ce contexte, il n’est pas exclu qu’il y ait, de fait, un problème d’entrisme", rappelle à BFMTV.com Thomas Guénolé. L'immixtion dans la campagne des opposants au mariage homosexuel, ces dernières semaines, a en effet rebattu les cartes, en faisant craindre aux partisans de NKM une "manipulation" du scrutin.

Plusieurs sites de la droite radicale, et l'un des chefs de file de la Droite forte Guillaume Peltier ont appelé ces dernières semaines à faire battre la députée, coupable, selon eux, de s'être abstenue sur la loi Taubira. Trois leaders du mouvement, dont le sénateur de Paris Pierre Charon, ont ainsi appelé à voter pour Pierre-Yves Bournazel, tandis que l'hebdomadaire d'extrême droite Minute appelait à se "payer" NKM "pour trois euros". Le favori de l’hebdo? Jean-François Legaret, maire du 1er arrondissement, qui "a fait une campagne résolument à droite et a pris part à toutes les manifestations contre le mariage homosexuel", selon Minute.

Plusieurs organisateurs des anti-mariage homo ont appelé leurs partisans à s’inscrire à la primaire et à voter soit pour Jean-François Legaret, soit pour Franck Margain, vice-président du Parti chrétien démocrate de Christine Boutin.

> Le spectre de la triche

Le choix d’un vote électronique pour ce scrutin interne est aussi critiqué: trop complexe, il serait de plus sujet à suspicions. "Oui, je surveille de très près ce qu’ils font ", confie à BFMTV.com, le candidat et conseiller de Paris Pierre-Yves Bournazel, ajoutant ne "pas être en confiance" quand on évoque la régularité du scrutin.

Jean-François Legaret va plus encore loin, assurant qu'il sera "très attentif" au déroulement du scrutin électronique afin d'"évacuer ces suspicions de fraude". "Je reçois de très nombreux témoignages de piratages du fichier des inscriptions", insistait-il jeudi lors d'une conférence de presse.

Je reçois de très nombreux témoignages de piratages du fichier des inscriptions #Primaire75
— JeanFrançois Legaret (@jflegaret) May 30, 2013

Tout cela est de nature à remettre en cause la sincérité du scrutin #Primaire75
— JeanFrançois Legaret (@jflegaret) May 30, 2013

Le plus jeune candidat de la primaire, Pierre-Yves Bournazel s’agace également du "changement des règles en cours de route". La semaine dernière, la date butoir pour s'inscrire à la primaire, initialement fixée au 28 mai, a été repoussée jusqu'au dernier jour du vote électronique prévu du 31 mai au 3 juin. "Pouvoir s’inscrire alors que le vote est déjà ouvert, cela n’existe dans aucune démocratie du monde!", fustige-t-il.

Le problème des fraudes dans les scrutins internes des partis politiques "est récurrent", estime le politologue Thomas Guénolé. "Le problème avec le vote électronique est que si vous réussissez à frauder, après coup, la fraude est quasi-indétectable", ajoute-t-il. "Les observateurs pourront seulement constater qu'une mobilisation tous azimuts au dernier moment sera suspecte".

A la veille du scrutin, Nathalie Kosciusko-Morizet a elle-aussi dénoncé, dans un communiqué de presse, un scrutin trop complexe. "Ce soir, 30 mai, à la veille de l'ouverture du scrutin pour la primaire à Paris, de nombreuses personnes inscrites sur le site des primaires rencontrent un important et récurrent problème technique de compatibilité de leur ordinateur pour le vote", a-t-elle fustigé avant d'expliquer que toutes les versions du logiciel Java n'étaient pas compatibles avec le vote.

> Le risque de désigner un mauvais candidat pour Paris

Enfin, des interrogations sur la capacité à gagner du candidat qui sera issu de cette primaire demeurent. "A Paris, l’extrême gauche et la gauche radicale, tout comme l’extrême droite et la droite radicale sont sous-représentées. Plus qu’ailleurs encore, l'élection municipale de Paris se jouera donc au centre gauche et au centre droit. A l’issue de la primaire, l’UMP aura donc déjà perdu si le candidat désigné est trop marqué par un des courants du parti. S’il est issu de la droite morale par exemple, l’élection contre la sociale-démocrate Anne Hidalgo sera perdue d'avance", prédit Thomas Guénolé. "La sociologie des électeurs qui se déplaceront à la primaire risque d'être trop minoritaire", insiste-t-il.

La tenue même d'un second tour serait de nature à affaiblir NKM dont les commentateurs avaient annoncé le triomphe au premier round. Et si elle devait rater totalement la primaire, imagine le politologue, "l’UDI ne manquerait pas d’envoyer, en confrontation, un candidat très haut de gamme". Jean-Louis Borloo se tient-il prêt?


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Les électeurs parisiens, qu'ils soient encartés à l’UMP ou non, sont appelés à choisir sur internet jusqu’à lundi 19 heures entre quatre candidats.

Hélène Favier