BFMTV
Politique

Les mesures-phares du programme de Mélenchon ciblées par Fillon et Le Pen

-

- - Jean-Luc Mélenchon à La Plaine-Saint-Denis le 4 avril 2017. - LIONEL BONAVENTURE / POOL / AFP

A mesure qu'il progresse dans les sondages et imprime son rythme dans la campagne, Jean-Luc Mélenchon devient la cible de ses concurrents à la présidentielle. François Fillon et Marine Le Pen viennent d'attaquer son programme, mais qu'en est-il vraiment?

Les adversaires de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle ne peuvent plus se permettre de l'ignorer ou de l'observer avec bienveillance. A mesure qu'il les dépasse dans les sondages, ou se rapproche de leur score, les candidats à la présidentielle se mettent à l'attaquer sur son programme afin d'essayer de contenir sa percée.

Ce dimanche, lors de son meeting Porte de Versailles à Paris, François Fillon a fustigé le volet économique de la feuille de route de son rival de la "France insoumise" qu'il a ainsi brocardé: "Monsieur Mélenchon se rêve en capitaine du Cuirassé Potemkine, mais finira par négocier la ferraille du Titanic". Ce lundi, au micro du Talk du Figaro, Marine Le Pen a mené une offensive plus directe et ce, sur deux fronts. "Il veut mettre en place, et il l'assume, 100 milliards (d'euros) d'impôts supplémentaires. Aux Français, je dis 'vous avez subi 35 milliards sous Nicolas Sarkozy et 35 milliards sous François Hollande, vous avez vu ce que vous avez vécu les 5 dernières années, vous multipliez par 3!'" a-t-elle lancé avant de l'accuser d'être "un immigrationniste absolu" souhaitant "ouvrir les frontières et régulariser l'intégralité des clandestins". 

Régulariser les travailleurs sans papiers sous contrat

En-dehors de la teneur polémique du propos dans le cadre d'une élection, la présidente du Front national retranscrit-elle fidèlement les objectifs de celui qu'un sondage présente désormais comme le troisième homme de l'élection? Sur le dernier point soulevé par la leader frontiste, Jean-Luc Mélenchon apporte une réponse claire dans son programme. Il y dit sa volonté de "réaffirmer le droit d’asile en accueillant les réfugiés qui en relèvent", et a récemment abordé la question de la régularisation de sans-papiers sur BFMTV:

"Le gars, la fille qui est là, qui paye ses cotisations, paye ses impôts locaux, moi, je suis pour qu’on lui donne des papiers. Je suis pour qu’il sorte du régime de la peur et que, quand il est libéré de cette peur, il puisse lui aussi réclamer ses droits lorsqu’ils sont niés."

Il ne s'agit donc pas de la régularisation massive de tous les immigrés clandestins mais de ceux bénéficiant d'un contrat de travail, ou d'individus éligibles au droit d'asile. 

Demander davantage d'efforts aux gros patrimoines

Au chapitre de la fiscalité, attaqué également par Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon se montre aussi très disert. La mesure principale proposée est d'accroître la progressivité de l'impôt en portant le nombre de tranches à 14. Pour le reste, sa politique fiscale est fondée sur une dichotomie entre gros patrimoines et revenus plus modestes. Jean-Luc Mélenchon entend "surtaxer les revenus au-delà de 400.000 euros de revenus annuels par personne (33 000 euros par mois)".

Cette surtaxe s'élèverait à 90% pour ces très hautes ressources. L'augmentation fiscale concerne aussi les droits de successions sur les gros patrimoines, avec cette précision: "pas d’impôt en-dessous de 130 000 euros d’héritage par enfant".

Ces hausse seraient compensées par des révisions à la baisse ailleurs, comme pour la TVA, impôt indirect. Il inscrit ainsi dans son programme l'idée de "réduire la TVA sur les produits de première nécessité, annuler les hausses récentes et réinstaurer une 'TVA sur le grand luxe' pour financer ces baisses". A l'arrivée, Jean-Luc Mélenchon l'assure cette impulsion donnée aux impôts provoquera "la baisse des impôts pour les personnes qui gagnent moins de 4.000 euros par mois et réduira les inégalités en redistribuant les richesses."

Une échelle de salaires allant de un à 20 dans les entreprises

Mais c'est plus largement sur l'économie que François Fillon, quant à lui, s'en est pris au député européen. Il faut dire que c'est dans ce domaine que Jean-Luc Mélenchon fournit ses propositions les plus frappantes. Il compte interdire les licenciements boursiers. En cas de fermeture ou de vente annoncée d'une entreprise, il suggère un "droit de préemption aux salariés pour former une coopérative". Il veut encore mettre en place une échelle des salaires allant de un à 20 dans les entreprises. 

Au plan de la redistribution sociale, il souhaite augmenter le smic net mensuel pour le fixer à 1.326 euros et "revaloriser les salaires des fonctionnaires". Cette augmentation du Smic trouve un écho supplémentaire dans son agenda dans la mesure où l'homme de gauche a l'intention veut faire en sorte d'établir les pensions de retraite au niveau du smic pour une carrière complète et le minimum vieillesse à 1.000 euros. 

Un double plan européen

François Fillon, le candidat de la droite et du centre au libéralisme assumé, se trouve aussi séparé de Jean-Luc Mélenchon par leurs approches des institutions européennes. 

Au sujet des institutions européennes, ce dernier pose l'alternative suivante: refonder les traités européens et les soumettre à référendum (c'est le "plan A") ; en cas d'échec des négociations, sortir des traités (son "plan B"). Une directive existante de l'Union européenne concentre les critiques du représentant de la "France insoumise": celle portant sur les travailleurs détachés qu'il compte suspendre. 

Une Constituante pour repenser les institutions

Résumé dans "L'Avenir en commun", le programme de Jean-Luc Mélenchon est ensuite démultiplié par de nombreux livrets thématiques (35 ont été publiés à ce jour, et ils sont appelés à être 43). Autant dire que son programme aborde de nombreux champs.

Au coeur de la démarche du candidat, il y a la volonté d' "abolir la monarchie présidentielle" de la Ve République. Pour ce faire, il est bien décidé, en cas d'élection, à convoquer une Assemblée constituante (exempte de la participation de tout parlementaire de la Ve République) dont le rôle sera de redéfinir les institutions démocratiques, via des mesures déjà proposées par le candidat comme la possibilité pour les citoyens de contrôler tous les élus avec l'option d'une révocation. 

L'école obligatoire de 3 à 18 ans

L'éducation trouve aussi sa place, bien entendu, dans l'horizon présidentiel de Jean-Luc Mélenchon. Il veut ainsi recruter "au moins" 60.000 enseignants supplémentaires durant son éventuel quinquennat, et revaloriser le traitement des professeurs de 7%.

Son désir est aussi d'allonger l'instruction obligatoire de "3 à 18 ans". Enfin, il évoque l'hypothèse de revenir sur la loi Carle "qui oblige les municipalités à financer l'enseignement privé". 

Environnement: un programme en vert et bleu

Comme il l'a dit à plusieurs reprises, Jean-Luc Mélenchon n'est pas né écologiste mais l'est devenu avec le temps. Aujourd'hui, l'environnement est l'une des fondations de son projet. Il veut ainsi sortir du nucléaire, garantit la fermeture immédiate de la centrale de Fessenheim "en garantissant l'emploi des salariés et leur formation". Il envisage aussi de lancer un "plan de transition énergétique vers les énergies renouvelables fondé sur la sobriété et l’efficacité", avec pour objectif "100 % d'énergie renouvelable en 2050". 

Son espoir de mise au point d'une "planification écologique" est aussi lié à l'instauration d'une règle verte: l'idée est la suivante, on ne peut prendre prendre à la nature davantage de ressources qu'elle ne peut reconstituer. 

Le candidat ne s'intéresse pas qu'à la terre car il a à l'esprit la fondation d'une "économie de la mer". Ce projet est à la confluence des volets économique et écologique de son programme en ce que cette économie pourrait susciter "300.000 emplois" selon les estimations de son équipe. 

Thématique essentielle pour les Français, Jean-Luc Mélenchon a détaillé son ambition pour la santé. Il promet le "remboursement à 100 % des soins prescrits : gratuité des soins et appareils dentaires, optiques et auditifs, baisse du tarif des lunettes" et la suppression des "dépassements d'honoraires supprimés". 

Un "indépendantisme national"

Enfin, les questions internationales comptent pour beaucoup dans la composition de la stature présidentielle d'un candidat. C'est d'ailleurs cet axe, et le discours de Marseille ce dimanche où Jean-Luc Mélenchon s'est présenté comme "le candidat de la paix", que son rival Emmanuel Macron a vertement critiqué, l'accusant de "désarmer" le pays. Il s'agissait peut-être pour lui de blâmer la volonté de Jean-Luc Mélenchon d'initier une sortie de la France de l'Otan. Pour Jean-Luc Mélenchon, qui se veut porteur d'un "indépendantisme national", la diplomatie française doit se placer à équidistance des Etats-Unis et de la Russie. 

Robin Verner