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Les atomes crochus de Macron et Mélenchon

Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron ont échangé plusieurs moments de complicité lors du débat.

Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron ont échangé plusieurs moments de complicité lors du débat. - Capture d'écran TF1

Les deux candidats à la présidentielle, qui ne s'étaient jamais rencontrés avant le débat, ont échangé lundi plusieurs moments de connivence. Au point de surprendre certains commentateurs et d'attirer la suspicion dans le camp socialiste.

"Un casse-noix, il faut que ça serre des deux bords, Macron-Mélenchon. Et au milieu, ça fait de l'huile". Lors d'un meeting au Mans en janvier, Jean-Luc Mélenchon a eu cette phrase à propos du PS, qu'il décrivait pris en étau entre sa candidature et celle d'Emmanuel Macron, avant la primaire. Depuis le débat de lundi soir, les quelques moments d'échanges entre les deux candidats, qui ne s'étaient jamais confrontés jusqu'alors et occupaient des pupitres voisins, font jaser.

Le candidat de la France insoumise a par exemple soutenu celui d'En Marche! contre Marine Le Pen, qui l'attaquait sur la laïcité après l'avoir pris à partie en l'accusant d'être favorable au burkini. Contre la présidente du FN également, Emmanuel Macron s'est amusé de l'image de Jean-Luc Mélenchon sur les "épuisettes" de Marine Le Pen "avec des trous dedans" pour lutter contre l'immigration. Les deux hommes ont aussi évoqué l'idée de débattre tous les deux, en face-à-face, sur la santé. "Il y aura bien une émission qui sera d'accord", a lancé Jean-Luc Mélenchon, comme le rappelle L'Opinion, qui a vu dans ces échanges un "coup de foudre en direct".

"Marginaliser Hamon"

Pour un membre du gouvernement interrogé par le quotidien, cela ne fait pas un pli: la complicité affichée par les deux hommes était une tactique utilisée contre Benoît Hamon. "C’était une stratégie organisée, c’est évident, de faire cette passerelle pour marginaliser Benoît", assure ce ou cette socialiste.

Un autre socialiste, Julien Dray, a expliqué ne pas avoir été surpris par ces échanges. "Je savais ce qui allait se passer avec Mélenchon, je savais que Jean-Luc Mélenchon allait le câliner pour le faire venir, que Emmanuel allait tenter de se dire je me mets à la portée de Jean-Luc Mélenchon", a expliqué le conseiller régional d'Ile-de-France sur le plateau de Zemmour et Naulleau mercredi, sur Paris Première. 

Mais pendant le débat, Benoît Hamon a plusieurs fois rejoint Jean-Luc Mélenchon, ou inversement, contre Marine Le Pen. En revanche, le candidat socialiste s'en est pris à Emmanuel Macron sur le financement de son mouvement. Jean-Luc Mélenchon, lui, a insisté, à propos des affaires, sur le fait que seuls deux participants étaient concernés: François Fillon et Marine Le Pen. Une mise au point appréciée par Emmanuel Macron, d'après RTL, qui rapporte que lui et Jean-Luc Mélenchon auraient ce soir-là échangé leurs numéros de téléphone.

Mélenchon "intrigué" et Macron "fasciné"

Benoît Hamon, à qui de nombreux socialistes préfèrent le candidat d'En Marche! avait des raisons de s'en prendre à Emmanuel Macron. Jean-Luc Mélenchon en avait sans doute un peu moins. Pour Eric Coquerel, co-fondateur du Parti de gauche et soutien de Jean-Luc Mélenchon, le terme complicité est "hors de propos".

Contacté par BFMTV.com, il juge que ces interrogations font "beaucoup de bruit pour pas grand chose", même s'il reconnaît qu'Emmanuel Macron était "un peu fasciné par Jean-Luc Mélenchon". "Il y avait peut-être un peu de mise en scène de sa part", note-t-il, lui qui était dans le public ce soir-là.

"Que Jean-Luc Mélenchon soit intrigué, sans doute. Il y a une confrontation politique qui (l')intéresse", poursuit-il, "entre la vision ethnique de la société Marine Le Pen, la vision libérale d'Emmanuel Macron et la nôtre".

"Ils se reconnaissent une démarche intellectuelle"

"On considère que l'adversaire de ce côté de l'échiquier politique, libéral, c'est Emmanuel Macron", explique-t-il, réfutant fermement l'idée d'un "axe" contre Hamon. "Nous on vise à aller au second tour", insiste Eric Coquerel, "il n'y a pas de raison de renforcer Macron. Le PS n'a pas besoin de nous pour jouer fragmenté", conclut-il. 

Dans le camp d'Emmanuel Macron, on reconnaît une entente certaine entre les deux hommes ce soir-là. "Ils se reconnaissent mutuellement une qualité, ils sont à peu près d’accord sur rien, mais ils reconnaissent une démarche intellectuelle des deux côtés, une honnêteté intellectuelle et une forme de cohérence", a déclaré Benjamin Griveaux sur BFMTV ce jeudi soir. Mais le porte-parole d'En Marche l'assure, "il ne faut pas y voir autre chose". 

Charlie Vandekerkhove