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Politique

L'affaire Benalla éclipse totalement les débats à l'Assemblée nationale

Les débats à l'Assemblée nationale ont été parasités par l'affaire Benalla.

Les débats à l'Assemblée nationale ont été parasités par l'affaire Benalla. - AFP

Actuellement réunis en session extraordinaire, les députés se sont interrompus ce jeudi en plein examen du projet de révision de la Constitution: toutes les discussions étaient tournées vers l'affaire Benalla.

Une réunion en urgence de plus une heure, juste après une série de moments tendus dans l'Hémicycle. Le président de l'Assemblée nationale et les présidents des groupes parlementaires se sont mis d'accord ce jeudi soir pour appliquer l'article 145 du Palais Bourbon. Ce dernier autorise la commission des Lois à se constituer en commission d'enquête parlementaire afin de procéder à des auditions, en l'occurrence sur l'affaire Alexandre Benalla. 

Avant de trouver une solution à cette affaire qui a parasité les débats de l'Assemblée ce jeudi, un conciliabule, preuve de la délicate gestion de cette affaire côté gouvernement, s'est tenu vers 18 heures sur les marches de la cour d'honneur. Christophe Castaner, Nicole Belloubet, François de Rugy, Richard Ferrand et d'autres ténors de la majorité dont Marc Fesneau (MoDem) et Yaël Braun-Pivet, ont discuté en petits groupes, cherchant visiblement une porte de sortie.

Belloubet interpellé

Si les débats devaient reprendre dans la soirée, ils ont été longuement interrompus une bonne partie de l'après-midi. Le parasitage de l'examen du projet de révision constitutionnelle par l'affaire Benalla devrait peser sur l'agenda parlementaire déjà chargé. Mardi, le gouvernement avait annoncé que trois jours et trois nuits de débats, incluant le week-end à venir, étaient ajoutés au temps initial pour étudier le projet de loi. Les débats sur le texte constitutionnel, à leur huitième jour et loin d'être achevés avec encore quelque 1.500 amendements au menu.

Pourtant dès le début de la journée, les débats dans l'hémicycle ne portaient pas sur la réforme constitutionnelle mais bien sur les images montrant l'ancien chef adjoint de cabinet du président de la République violenter un manifestant. L'élu LR Eric Ciotti attaque d'abord la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, sur les faits "extrêmement graves" révélés mercredi soir par Le Monde. La ministre a tenté d'évacuer le sujet. Tout en évoquant des "gestes absolument inadaptés", elle a rappelé que l'affaire était désormais entre les mains de la justice.

Un départ de Benalla réclamé

Mais peu avant la pause de mi-journée, l'Insoumis Jean-Luc Mélenchon hausse le ton dans les couloirs, et réclame la saisie d'un juge d'instruction et des sanctions pour les responsables à l'Elysée. Dans l'hémicycle, des communistes ou socialistes demandent que le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb vienne s'expliquer. Dans les rangs de la majorité, certains se demandent comment éteindre l'incendie, ne voyant "pas d'autres solutions" qu'un départ d'Alexandre Benalla.

"Il ne serait pas inutile que la mise à pied temporaire se transforme en retrait définitif ou, à tout le moins, en retrait de l'Elysée jusqu'à la décision de justice", observe Florent Boudié (LREM).

Côté opposition, l'affaire relance les demandes de création d'une commission d'enquête sur les violences ayant émaillé le 1er-Mai à Paris, émanant des Insoumis, communistes et socialistes, mais aussi de LR, qui a redéposé une résolution, ciblée sur l'affaire. Qui a donné les ordres? Quel rôle a eu le collaborateur de l'Elysée? Le ministre de l'Intérieur était-il au courant? demandent notamment les Insoumis.

"Instrumentalisation"

A la reprise des travaux à 15 heures, les rappels au règlement se succèdent pendant plus de deux heures, les oppositions réclamant encore des explications de l'exécutif et une réponse sur la commission d'enquête. "Qu'est-ce qui a justifié que sa hiérarchie, au premier rang le président de la République, a décidé de cacher cette affaire à la justice ?", demande notamment le patron des LR Christian Jacob.

"Ne laissez pas cette affaire pourrir", lance Jean-Luc Mélenchon. Sébastien Jumel dénonce "un véritable scandale d'Etat".

Dans les couloirs, Gilles Le Gendre, un des vice-présidents LREM, affirme que son groupe "ne souhaite pas de commission d'enquête parlementaire" et plaide pour attendre les résultats de l'enquête de la justice et de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN). Et il accuse les oppositions de "se lier depuis trois heures pour instrumentaliser cette affaire et bloquer le débat constitutionnel".

Après une longue suspension de séance, le président de l'Assemblée François de Rugy (LREM) dit souhaiter "que le gouvernement puisse (...) s'exprimer", mais ne pas avoir "de réponse à ce stade" aux demandes des oppositions. Le patron des députés LREM Richard Ferrand intervient: il n'a "pas l'impression qu'à ce stade il soit raisonnable de penser (...) qu'il y aurait une volonté d'étouffer quoi que ce soit".

Justine Chevalier avec AFP