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Gouvernement

RN et "arc républicain": pourquoi Macron et Attal ont une subtile différence de position

En apparence opposé sur le Rassemblement national lors de leur dernière prise de parole, le président et son premier ministre ménagent en réalité la chèvre et le chou.

Un "distinguo" subtile mais lourd de sens politique. Emmanuel Macron et Gabriel Attal ont-ils une différence de stratégie face au Rassemblement national? Après s'être exprimé tous les deux médiatiquement à ce sujet, le premier à L'Humanité ce 18 février, le second au Monde deux semaines plus tôt, on pourrait penser qu'Emmanuel Macron et Gabriel Attal ne partagent pas exactement la même vision lorsqu'il s'agit d'évoquer le fameux "arc républicain" avec lequel il est possible de négocier ou discuter les textes parlementaires pour la majorité.

Si le chef de l’État a reconnu ce dimanche que l'on ne peut pas "faire abstraction" de la présence du Rassemblement national à l'Assemblée, et de ses 88 députés, il a précisé sa vision de l'"arc républicain".

"Ce distinguo suffit à dire où j'habite"

Ce concept politique offensif qui voit en LIOT, LR, le Modem, Horizon et Renaissance une sorte de grand champ "républicain" au centre est utilisé pour disqualifier les "extrêmes" (LFI et le RN, selon la majorité) situés à droite et à gauche de ce vaste camp.

"Toutes les forces élues par le peuple" n'adhéraient pas "à la République et ses valeurs", a tenu à expliquer Emmanuel Macron dans les colonnes de l'Humanité.

Il précise n'avoir "jamais considéré" que le RN, au même titre que Reconquête! (le parti d'Éric Zemmour), s'inscrivent "dans l'arc républicain". Il assure au passage s’être fixé un principe concernant les députés RN: "que les textes importants ne devaient pas passer grâce à leurs voix. Ce distinguo suffit à dire où j'habite".

Le président de la République affirme enfin ne pas "poser d'équivalence entre les deux extrêmes". Et ce, même si "par leurs positions, certaines personnalités de la France insoumise combattent les valeurs de la République".

Le 9 février, le chef de l'État déclarait pourtant lors d'un déplacement à Bordeaux "tout à fait normal d'avoir des discussions avec toutes les formations politiques" de l'Assemblée nationale

"L'arc républicain, c'est l'hémicycle"

À l'inverse, quelques jours plus tôt, Gabriel Attal avait exprimé vouloir dialoguer avec les oppositions "de manière permanente".

"Certains disaient qu’il ne fallait travailler qu’avec l’arc républicain. Moi, je considère que l’arc républicain, c’est l’Hémicycle", avait ainsi déclaré le nouveau Premier ministre début février au Monde, quelques semaines après son arrivée à Matignon.

Des propos plus ronds qui tranchent avec ceux de sa prédécesseure, Élisabeth Borne qui n'avait eu de cesse de juger Marine Le Pen et La France insoumise "en dehors de l'arc républicain". Et qui sonnent aussi plus rassembleurs que ceux d'Emmanuel Macron.

Service après-vente

Sans contredire son patron, Gabriel Attal semble plutôt assurer le service après-vente de l'Élysée. Début janvier en effet, dans sa conférence de presse, le chef de l'État s'était fendu d'une charge contre le parti à la flamme, s'attirant les foudres des députés RN.

"On sait plus trop ce qu'ils disent, mais ça a l'air sympa, c'est ça que peuvent se dire les Français", a-t-il expliqué, tout en assurant qu'il se "battra jusqu'au dernier quart d'heure" contre l'arrivée de Marine Le Pen au pouvoir.

On peut donc voir dans l'apparente bienveillance exprimée de Gabriel Attal envers l'intégralité de l'hémicycle une manière de temporiser les propos de son chef. Il faut dire que la majorité relative du Palais Bourbon n'est pas en position de pouvoir se mettre entièrement à dos le RN et LFI si elle veut réussir à faire passer ses textes.

Le Rassemblement national est-il "l'héritier de Pétain" ?
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20:34

Car bien que le souhait d'Emmanuel Macron soit autre, plusieurs lois clé de la mandature ont bien été votées avec les voix des députés de Marine Le Pen. De la loi immigration au projet de loi sur le pouvoir d'achat.

Hortense de Montalivet