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Rassemblement national

Parlement européen: le champagne et les dîners luxueux du FN font des vagues

Marine Le Pen et ses alliés européens du groupe ENL le 16 décembre 2017 à Prague.

Marine Le Pen et ses alliés européens du groupe ENL le 16 décembre 2017 à Prague. - Michal CIZEK / AFP

Le groupe dont fait partie le Front national est sommé de justifier au total plus de 427.000 euros de dépenses suspectées par le Bureau du Parlement d'être non conformes. Il dispose d'un délai pour s'expliquer, mais devra au-delà de cette date rembourser la somme.

Depuis 2017, le Parlement européen s'intéresse aux comptes du groupe ENL (Europe des Nations et des Libertés). A Bruxelles, ce groupe d'extrême droite réunit depuis sa formation en 2015 les eurodéputés du Front national français, de la Ligue de Matteo Salvini en Italie, du PVV néerlandais de Geert Wilders et du FPÖ autrichien, fondé par Jorg Haider. Sur les 36 élus qui le composent, près de la moitié sont des frontistes.

D'après un audit mené sur ses comptes pour l'année 2016, plus de 500.000 euros de dépenses ont été mis en doute, conduisant le Parlement à réclamer des "clarifications". L'immense majorité de ces dépenses est imputable aux eurodéputés français du FN, alors que le parti est déjà empêtré dans l'affaire des assistants parlementaires européens. Dans le détail, la commission de contrôle budgétaire du Parlement avait estimé en mars que devraient être remboursés 38.890 euros "pour des dépenses non étayées par des pièces justificatives adéquates" et 388.280 euros "pour des dépenses enfreignant les règles relatives aux marchés publics".

Un repas à 401 euros par tête

Parmi les dépenses listées dans le rapport d'audit que l'AFP a pu consulter, figurent une centaine de cadeaux de Noël à plus de 100 euros et quelque 230 bouteilles de champagne, dont six d'une valeur de plus de 81 euros, mais aussi un repas de Noël pour 140 personnes pour une facture de plus de 13.500 euros. Deux autres repas sont pointés du doigt, l'un à 449 euros par personne au restaurant gastronomique parisien l'Ambroisie, un triplement étoilé de la Place des Vosges, et l'autre chez Ledoyen, près des Champs-Élysées, pour deux personnes, à 401 euros par tête.

D'après le Canard Enchaîné dans son édition du 30 mai, ce dernier repas, indiqué pour des raisons de "diplomatie", était un dîner de Marine Le Pen avec Matteo Salvini, le dirigeant italien de la Ligue. Ce que conteste Nicolas Bay, interrogé par Le Monde ce jeudi.

"Il n’y avait ni Salvini, ni Le Pen à ces dîners", affirme le vice-président du parti français, évoquant "des repas à caractère confidentiel dans le domaine de l’industrie et de la diplomatie".

Un délai accordé au groupe

Ce qui justifierait que les noms des invités soient tenus secrets. Quant aux bouteilles de champagne, il explique qu'elles ont été "distribuées au grand public dans le cadre de réunions", ce qui l’empêche de fournir la liste des destinataires, note Le Monde, réclamée par le Parlement. Nicolas Bay, également co-président du groupe ENL, explique aussi concernant les autres dépenses que le groupe a mis en place "des règles plus contraignantes à partir de 2017".

Seul habilité à exiger un remboursement de frais, le Bureau du Parlement européen, organe de direction de l'institution, doit chaque année valider les comptes des différents groupes politiques, où ces derniers justifient l'utilisation des fonds européens qui leur sont versés pour couvrir leurs coûts de fonctionnement. Avant de prendre une décision définitive, le Bureau entend accorder aux représentants du groupe ENL "la possibilité de formuler d'autres remarques par écrit", indique le texte retenu lors d'une réunion à huis clos lundi soir. Le groupe a donc une dernière chance de justifier plus de 427.000 euros de dépenses, jusqu'à mi-juin, au risque sinon de devoir les rembourser.

Mauvaise ambiance

Comme le rapporte Le Monde, cette affaire a instauré une ambiance à couteaux tirés au sein du groupe, dont le co-président néerlandais, Marcel de Graaff, a vivement critiqué ses alliés français.

"Au nom du Parti pour la liberté (PVV) de Geert Wilders, l’eurodéputé s’est dit 'offusqué' des pratiques 'd’enrichissement de la part de la délégation française', et assuré 's’en distancier totalement'", écrit le quotidien du soir.

Charlie Vandekerkhove avec AFP