FN: Wallerand de Saint-Just se mue en hipster pour séduire l'Ile-de-France

Le trésorier national du FN depuis 2007 a récemment opéré une mutation majeure: le candidat frontiste en Ile-de-France est passé de catho tradi à hipster. Anonyme auprès des électeurs, cet historique du FN joue le tout pour le tout en 2015, alors que les chiffres du parti dans la région progressent fortement.   

Face à une ancienne ministre-députée, Valérie Pécresse, et à l'actuel président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, Wallerand de Saint-Just le chef de file du Front national pour les régionales en Ile-de-France, fait figure d'inconnu. Pourtant, "malgré son relatif anonymat, il est poussé par la dynamique actuelle du FN", expose Gaël Sliman, politologue à Odoxa. Tant et si bien que le dernier sondage de cet institut pour BFMTV crédite Wallerand de Saint-Just de 23% au premier tour et de 25% au second. Présentation d'un historique du parti qui a opéré sa mue pour tenter de séduire un électorat peu sensible aux thèses frontistes lors des derniers scrutins. 

> Un historique, membre du grand huit du FN

Wallerand de Saint-Just prend sa carte au Front national en 1987. A 65 ans, il approche donc des trente ans de militantisme. Proche dans sa jeunesse du GUD, un groupuscule d'extrême droite violent, avocat de formation et catholique traditionaliste revendiqué, il est aujourd'hui membre du bureau exécutif du FN, qui regroupe les huit principaux cadres du parti.

Un poste important qu'il doit en partie à la scission qui s'opère en 1999 quand Bruno Mégret quitte le FN. Il rejoint d'abord le pôle juridique aux côtés de Marine Le Pen avant de devenir trésorier national du mouvement en 2007. "Pendant quatre ans, on a porté le FN à quatre: Jean-Marie Le Pen, Marine, Philippe Péninque [alors proche conseiller] et moi", raconte-t-il à Libération.

Wallerand de Saint-Just est désormais un fidèle de Marine Le Pen, après avoir été l'avocat de Jean-Marie Le Pen, qu'il a contribué à exclure du FN en août 2015, car "il entravait les progrès" du parti, tranche-t-il. Un fidèle qui s'adapte aux circonstances, donc.

> Un parcours politique sans éclat

En 1989, Wallerand de Saint Just se présente face à Jacques Chirac aux municipales de Paris, puis doit finalement quitter la capitale pour remporter ses premiers mandats. Il prend ainsi les rênes du FN dans l'Aisne, devenant conseiller municipal de Soissons puis conseiller régional, toujours en fonction, de Picardie.

En parallèle, ce père de quatre enfants figure sur la liste de Marine Le Pen aux européennes de 2009 dans le Nord-Ouest avant de revenir à Paris pour conduire la liste FN aux municipales. Il ne passera pas le premier tour dans le 15e quand son parti récolte 6,26% des voix. Entre-temps, il a pris la tête de la fédération de Paris et est désormais en première ligne des régionales avec de vraies chances de siéger.

> La mutation du look... et de certaines idées

Alors que ses chances de se maintenir dans une triangulaire au second tour, et donc de siéger à la région, sont réelles, Wallerand de Saint-Just a travaillé son image. Fini la moustache et les petites lunettes rondes qui collaient trop bien à son nom fleurant bon la bourgeoisie. En 2015, le candidat porte la barbe blanche taillée et des lunettes à monture épaisse. "Est-ce l’électorat hipster que vous ciblez en Ile-de-France?" lui avait-on demandé sur France 3 Ile-de-France. "Non, c’est l’électorat swag que je vise. Celui qui est détendu et un peu décontracté". Rebelote sur RTL où Wallerand de Saint-Just se dit "l'égal des plus hipsters des Français que nous connaissons". 

Un nouveau look comme une marque puisque la monture des lunettes et la barbe sont utilisées graphiquement par son équipe, notamment sur les t-shirts de campagne:

> Tentative de clash (ratée) sur Twitter

Très actif sur le réseau social Twitter, Wallerand de Saint-Just poste des photos de campagne et ses interventions médiatiques. Preuve ultime qu'il ne renonce à rien pour convaincre, il tente début novembre de clasher le rappeur Booba sur Twitter. Sans succès, mais avec un petit écho médiatique qui contribue à sa notoriété recherchée.

> Mis en examen dans le cadre de l'enquête sur le financement du FN

Moins tendance mais illustrant le virage pris dans le portrait que lui consacre Libération, Wallerand de Saint-Just prend ses distances avec les luttes contre le droit à l'avortement. Contrairement à Marine Le Pen, il s'était déjà gardé de prendre position lors des débats ouvrant le mariage aux homosexuels: "Un piège de la gauche", dit-il. Pour le reste, il demeure un adepte des thèses rebattues par le FN: les thèmes de la sécurité, de l'immigration et de l'islam sont très présents dans ses interventions.

Si Wallerand de Saint-Just travaille son image, celle-ci a été écornée en septembre lorsqu'il a été mis en examen pour recel d'abus de biens sociaux dans l'affaire du financement du parti. Des tracas judiciaires qui ne l'empêchent pas de déclarer à France Inter ce mercredi: "Je crois à la responsabilité morale et politique de nos dirigeants", fustigeant implicitement ses rivaux.

Samuel Auffray