BFMTV
Élysée

NDDL: un référendum local peut-il vraiment être organisé rapidement?

L'annonce d'un "référendum local" sur le casse-tête de Notre-Dame-des-Landes risque de se heurter à la loi.

Emmanuelle Cosse a nié tout "marchandage" préalable à son entrée au gouvernement. Mais l'annonce par François Hollande jeudi de l'organisation d'un "référendum local" pour trancher l'épineux projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, y ressemble pourtant. Pour autant, la question est loin d'être réglée. La légalité de ce référendum est même contestée.

> Les référendums locaux existent

Les référendums locaux à caractère décisionnel et organisés par les collectivités locales sont possibles depuis une loi entrée en vigueur en août 2003. Jusqu'alors, et depuis une loi de février 1995, n'étaient autorisés que des référendums locaux consultatifs. Le champ d'application de ce référendum local concerne les affaires de la compétence de la collectivité territoriale, et tout projet d'acte relevant des attributions de son exécutif.

L'un des derniers référendums locaux organisés en France était consultatif et concernait, en septembre 2015 dans la ville de Beauvais (Oise), l'armement de la police municipale. Autre exemple, en novembre 2011, le maire de la commune de Nérac (Lot-et-Garonne) avait renoncé à installer un dispositif de vidéosurveillance dans sa commune après un vote défavorable lors d'un référendum local.

> Il ne s'agit plus d'un dossier local

Seulement, ces référendums concernaient des sujets locaux contrairement à Notre-Dame-Des-Landes.

"Il n'y a pas de texte aujourd'hui qui permette à l'Etat ou à une collectivité territoriale d'organiser soit un référendum soit une consultation locale sur un sujet d'Etat", rappelle Arnaud Gossement, avocat spécialiste des questions d'environnement. "L'Etat a délivré des autorisations, c'est à lui de les déboucler si il souhaite le faire", ajoute l'ancien porte-parole de France nature environnement.

Un projet de référendum sur les OGM dans le Gers a été annulé pour des raisons identiques à celles qui pèsent sur NDDL, comme le rappelle sur Twitter Patrick Sauce, journaliste à BFMTV.

> Peut-on modifier la loi d'ici octobre?

François Hollande avait déjà esquissé la piste du référendum, lors de la conférence environnementale, en novembre 2014, au lendemain de la mort d’un jeune écologiste, lors d’un affrontement avec les gendarmes mobiles en octobre 2014, lors d’une manifestation contre un projet de barrage à Sivens (Tarn).

S’en était suivi un chantier sur la démocratie participative, menée par le sénateur (PS) Alain Richard. Un projet d'ordonnance est en cours pour permettre de consulter les citoyens locaux, mais qui actuellement ne peut concerner que les projets non encore autorisés, au contraire de Notre-Dame-des-Landes.

C'est ce texte, présenté au Conseil national de la transition écologique le 16 février, qui devra être revu si l'État veut consulter les citoyens locaux. Modifier l'arsenal législatif rapidement semble "compromis" pour Arnaud Gossement.

Autre problème soulevé: d’un point de vue juridique, parler de référendum revient à valider l’idée que les procédures jusque-là respectées, les recours, et autre déclaration d’utilité publique, n’ont aucune valeur.

> Avec quels élus et quel périmètre?

Dans son annonce, le président de la République a indiqué qu’il s’agirait d’un "référendum local" mais ne s’est pas attardé sur les concernés par la consultation aux urnes.

"Le périmètre est très important", note Yannick Jadot, députée européen EELV. "Il y a deux régions qui sont concernées par le projet: les Pays de la Loire et la Bretagne. Si ce ne sont pas les deux régions qui votent, il y aura une sorte de mascarade démocratique", estime l’opposant à Notre-Dame-des-Landes.

Une petite précision a été annoncée vendredi après-midi. Ce référendum "sera défini à l'initiative des collectivités locales", ont annoncé les services de Manuel Valls, ajoutant qu'il "pourrait correspondre au département de la Loire-Atlantique".

"Si le gouvernement me le demande, je n'organiserai pas ce référendum sur Notre-Dame-des-Landes", a prévenu pour sa part le président du Conseil régional des Pays de la Loire Bruno Retailleau (Les Républicains), partisan du projet.

Cet imbroglio juridique et politique fait écrire à Ouest-France que "ce que vient de proposer François Hollande est au pire infaisable, au mieux contestable. De là à penser que c’est le but recherché..."