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Terrorisme

La possibilité d’un retour massif de jihadistes inquiète la France

Les hommes du Raid (photo d'illustration)

Les hommes du Raid (photo d'illustration) - AFP

L'Unité de coordination de la lutte antiterroriste dénombre 700 Français dans les rangs de Daesh en Irak et en Syrie. Parmi eux, 460 enfants qui ont perdu "la notion du bien et du mal". L'organisation s'inquiète également des 200 individus qui sont revenus en France et "ont appris à tirer sans ciller".

Ce sont des données inquiétantes. Au total, 700 Français, jihadistes et leurs familles, sont engagés sous la bannière du groupe terroriste Daesh en Irak et en Syrie sur les 12.000 volontaires étrangers, estime Loïc Garnier, chef de l'Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat), dans une interview ce mercredi au Figaro. Et parmi ces 700 Français, il compte 250 "combattants" formés à tuer, tirer à la kalachnikov et poser des bombes. 

Parmi les 3.000 Européens dans les rangs de l'organisation terroriste, et "même si la Belgique est la plus représentée au regard de sa population, la France reste le plus gros contributeur de l'Union européenne", déclare le responsable, ajoutant que 232 "compatriotes [étaient] présumés décédés". Sur le territoire national, ils seraient "un millier de velléitaires" à manifester "la volonté de partir sans que l'on sache toujours si leur envie est vraiment réelle", ajoute-t-il.

200 "revenants" en France

Concernant les "revenants", c'est-à-dire ceux qui rentrent en France de ces territoires en guerre, Loïc Garnier en décompte un peu plus de 200. Selon lui, certains sortent des "radars en prenant des routes improbables et trompent la vigilance des services de police". Et ajoute qu'il est assez "marginal" que ces revenants, "qui sortent de l'enfer pour rejoindre le monde des vivants", négocient leur retour avec les autorités françaises. "Cela concerne surtout des jeunes femmes qui parviennent à appeler leur famille", explique-t-il. Mais ces individus sont particulièrement dangereux, selon lui.

"Un certain nombre d'entre eux ont appris à démystifier le combat, à tirer sans ciller (...) à faire preuve d'un sang-froid glaçant (...) comme on l'a vu au Bataclan (...) Ils connaissent la fabrication artisanale ainsi que le maniement des explosifs. Ils ont appris à piéger une voiture, une ceinture d'explosif. Enfin, certains continuent à suivre aveuglément les prescriptions de leur émir recommandant les coups de couteau ou l'utilisation de camions béliers comme à Nice. Ces jihadistes sont prêts à tout et n'importe quoi".

En novembre dernier, Manuel Valls, qui était alors le Premier ministre, avait estimé que le retour des jihadistes d'Irak et de Syrie devait être "la principale préoccupation" en matière de sécurité des "cinq, des dix prochaines années".

460 enfants dans les zones de combat

Selon Loïc Garnier, "il reste dans les zones de combat quelque 290 femmes et 460 enfants français, dont un tiers nés sur place - donc âgés de moins de 4 ans - ainsi qu'une vingtaine de combattants". Sur cette question des mineurs, le chef de l'Uclat explique que ces derniers sont "dépourvus de tout discernement" et ont perdu "la notion du bien et du mal": "les islamistes ont instillé dans leur esprit un tel degré d'ultraviolence que cela devient presque un handicap mental. Le fait de côtoyer des cadavres, d'assister à des scènes de décapitations a été banalisé". Et selon lui, les conséquences sont lourdes.

"Des prises en charges psychiatriques seront nécessaires, tout comme des accueils dans des familles, la reconstitution d'un cocon où ils pourront à nouveau s'épanouir ainsi qu'une réacquisition de certaines valeurs."

Un sujet qui inquiète. Une réunion se tiendra jeudi avec Bernard Cazeneuve sur le retour des mineurs. "Depuis septembre, nous avons accueilli cinq familles comprenant 19 enfants: 10 garçons et 9 filles (âgés de 3 mois à 16 ans). Cinq sont nés dans les zones de conflits. Souvent, ils ne sont accompagnés que par leur mère", indique au quotidien Fabienne Klein-Donati, procureure de Bobigny.

Une attaque à l'aide d'un drone "envisageable"

Alors que la menace terroriste reste élevée en France, frappée depuis janvier 2015 par une série d'attentats sans précédent qui ont fait 238 morts, le patron de l'Uclat estime qu'une attaque à l'aide d'un drone est "tout à fait envisageable, même si cela nécessite une technicité un peu plus poussée. Aucun scénario n'est exclu".

L'organisation Sahan, spécialisée dans les conflits, a récemment émis un rapport sur le sujet, estimant que les terroristes de Daesh avaient de plus en plus recours aux drones piégés. Une note nationale a même été envoyée aux préfets de zone de défense, également relayée à la police. Elle indique que tout drone doit suivre la même procédure qu'un colis suspect et précise les consignes à suivre: l'appareil ne doit pas être touché, un périmètre de sécurité doit être établi et des équipes spécialisées alertées.

Quelque 17 projets d'attentats ont été déjoués sur le territoire en 2016, selon le gouvernement. En 2015, 7 avaient été empêchés.

C.H.A. avec AFP