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Nouvelle-Calédonie: Dupond-Moretti veut "une réponse ferme, rapide et systématique aux crimes et délits"

Dans une circulaire publiée ce vendredi 17 mai, le ministre de la Justice demande à l'institution judiciaire "une réponse pénale empreinte de la plus grande fermeté" à l'égard des personnes commettant des délits dans le cadre des émeutes en Nouvelle-Calédonie.

Le ministre de la Justice demande aux tribunaux de Nouméa "une réponse pénale ferme, rapide et systématique" aux infractions commises dans le cadre des émeutes en Nouvelle-Calédonie.

Dans une circulaire datée de ce vendredi 17 mai et adressée à la cour d'appel et au tribunal de première instance de Nouméa, Éric Dupond-Moretti demande que les auteurs des "faits délictuels les plus graves", comme les atteintes aux personnes ou les pillages, soient jugés en comparution immédiate ou à délai différé ou, lorsque c'est possible, fassent l'objet d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité.

Ces procédures ont en commun d'être rapides et doivent "permettre le prononcé d’une mesure de sûreté destinée à prévenir toute réitération", selon la circulaire, que BFMTV a pu consulter. Le ministre en détaillera le contenu devant la presse à 10 heures ce vendredi.

"Une réponse pénale empreinte de la plus grande fermeté"

Pour les mineurs âgés d'au moins 13 ans qui se voient reprochés des atteintes aux personnes dépositaires de l'autorité publique ou des atteintes graves aux biens publics, le ministre demande au parquet de requérir "une interdiction de sortir du domicile entre 20 heures et 6 heures et une interdiction de contact avec les co-auteurs et les victimes".

Dupond-Moretti demande plus largement aux tribunaux calédoniens "une réponse pénale empreinte de la plus grande fermeté à l’encontre des auteurs des exactions perpétrées". Il souhaite qu'une enquête pénale soit "systématiquement ouverte" en cas de "découverte de faits susceptibles de revêtir une qualification pénale à l’occasion de la mise en œuvre d’une mesure administrative - telle qu’une assignation à résidence ou une perquisition administrative".

"Les faits d’une extrême gravité dirigés contre les personnes et les biens commis en Nouvelle-Calédonie constituent des atteintes graves à l’ordre public entraînant un péril imminent", estime le garde des Sceaux dans sa circulaire. Il juge "impératif" le "rétablissement de l’ordre républicain" et souhaite que l’institution judiciaire y prenne "toute sa part".

Des zones à "reprendre"

Cinq personnes sont mortes depuis le début des émeutes lundi: deux hommes de 20 et 36 ans, une adolescente de 17 ans et deux gendarmes. Le premier, âgé de 22 ans, avait été atteint d'une balle dans la tête mercredi. Le second, âgé de 45 ans, a été victime d'un "tir accidentel" jeudi matin, selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Dans l'agglomération de Nouméa, ces dernières nuits, certains riverains ont érigé des barricades de fortune faites de palettes de bois, bidons et autres brouettes, sur lesquelles ils ont planté des drapeaux blancs. La Nouvelle-Calédonie a déploré vendredi une école et deux entreprises incendiées après une quatrième nuit de contestation de la réforme électorale votée à Paris.

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"Des renforts vont arriver (...) pour contrôler les zones qui nous ont échappé ces jours derniers, dont le contrôle n'est plus assuré", a déclaré vendredi devant la presse à Nouméa Louis Le Franc, Haut-commissaire de la République sur ce territoire français du Pacifique. Ils doivent permettre de "reconquérir tous les espaces de l'agglomération (de Nouméa) que nous avons perdus, et qu'il nous appartient de reprendre", a-t-il poursuivi.

Le représentant de l'État a évoqué "trois zones", des quartiers défavorisés du grand Nouméa peuplés majoritairement d'autochtones: Kaméré, Montravel et une partie de "la Vallée du Tir", où des "centaines d'émeutiers" recherchent selon lui "le contact avec les forces de l'ordre" et à poursuivre leurs "exactions".

Une situation "plus calme"

Dans un communiqué publié quelques heures auparavant, vendredi matin, le Haut-commissariat s'était voulu plus rassurant. "L'état d'urgence a permis, pour la première fois depuis lundi, de retrouver une situation plus calme et apaisée dans le grand Nouméa, malgré les incendies d'une école et de deux entreprises", affirmait-il.

La nuit de jeudi à vendredi a été "marquée par l'arrivée des renforts envoyés" de l'Hexagone, a ajouté la même source. Le gouvernement avait annoncé quelques heures plus tôt l'envoi d'un millier d'effectifs de sécurité intérieure, en plus des 1.700 membres des forces de l'ordre déjà sur place.

Selon Gérald Darmanin, les forces de l'ordre ont procédé à de nombreuses interpellations et "dix leaders mafieux" de la CCAT, la mouvance indépendantiste la plus radicale, ont été assignés à résidence. Celle-ci a publié un communiqué vendredi pour demander "à chacun de respecter le temps du deuil", à savoir "un temps d'apaisement pour enrayer l'escalade de la violence".

Les députés ont adopté dans la nuit de mardi à mercredi à Paris la réforme constitutionnelle qui a mis le feu aux poudres. Ce texte devra encore être voté par les parlementaires réunis en Congrès, sauf si un accord sur un texte global entre indépendantistes et loyalistes intervient avant. Le texte voté vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales. Les partisans de l'indépendance estiment que cette modification risque de réduire leur poids électoral et marginaliser "encore plus le peuple autochtone kanak".

Sophie Cazaux avec AFP