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Police-Justice

Mort de Nahel: que changerait le déclenchement de l'état d'urgence demandé par la droite?

Ce régime permet de renforcer les pouvoirs des autorités civiles en restreignant certaines libertés en facilitant la mise en place de certaines mesures comme les assignations à résidence, l'interdiction de manifester ou encore les perquisitions administratives.

"Seule la fermeté pourra ramener l’ordre et la paix". Dans un tweet, Éric Zemmour a été le premier à réclamer la mise en place de l'état d'urgence. Peu après, le président des Républicains Éric Ciotti lui a embrayé le pas, demandant "le déclenchement sans délai de l’état d’urgence partout où des incidents ont éclaté".

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22:16

Pour Matignon, ce n'est pas "une option envisagée aujourd'hui". "Je crois qu'on peut mobiliser énormément de moyens sans qu’on ait besoin de recourir à un article particulier de la Constitution", a ajouté Gérald Darmanin.

Pierre-Henri Dumont, porte-parole des Républicains à l’Assemblée nationale, estime que cela permettrait de "rétablir l'ordre", alors que la nuit de mardi à mercredi a été marquée par de nouvelles violences au surlendemain de la mort de Nahel, tué par un policier à Nanterre. Qu'est-ce que cela changerait si l'état d'urgence était déclenché?

"Restreindre" certaines libertés

Cette forme d'état d'exception peut être activée soit "en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public", soit en cas de "calamité publique", c'est-à-dire une catastrophe naturelle "d'une ampleur exceptionnelle".

"Par vocation, l'état d’urgence permet de renforcer les pouvoirs des autorités civiles et de restreindre certaines libertés publiques ou individuelles", résume le site officiel vie-publique.fr.

Lors de sa création, il ne pouvait être déclaré que par un vote du Parlement. Aujourd'hui, et ce depuis 1960, c'est au Conseil des ministres - soit le gouvernement et le président - que revient cette décision. Initialement, l'état d'urgence dure douze jours mais peut être prolongé par une loi votée au Parlement.

Renforcement du pouvoir des autorités

Concrètement, ce régime d'exception permet au ministre de l'Intérieur et aux préfets d'interdire plus facilement des manifestations, rassemblements ou réunions publiques, de réclamer la fermeture de lieux publics ou encore de demander la dissolution de groupes "qui participent, facilitent ou incitent à des actes portant atteinte grave à l’ordre public".

Des assignations à résidence peuvent être prononcées pour "toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics".

Pierre-Henri Dumont exige par ailleurs sa mise en œuvre afin d'ordonner "des couvre-feux pour les mineurs non accompagnés d'un adulte ayant autorité".

L'état d'urgence permet également "d'ordonner la remise des armes et des munitions, détenues ou acquises légalement par leur propriétaires" ou "d'ordonner des perquisitions en tout lieu, y compris un domicile, de jour et de nuit (...) lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser que ce lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics". Cette mesure ne s'applique pas aux parlementaires, avocats, magistrats ou journalistes.

En outre, en 2015, une modification du cadre juridique a supprimé la possibilité de contrôle de la presse, de la radio, des projections cinématographiques ou des représentations théâtrales prévu par la loi de 1955.

"L'ordre républicain va revenir"

La création de l'état d'urgence fait suite à une vague d'attentats perpétrés par le Front de libération nationale algérien (FLN) à partir de novembre 1954 et aux affrontements liés à ce conflit. Il sera à nouveau appliqué dans les années 1980 en Nouvelle-Calédonie et entre le 14 novembre 2015 et le 1er novembre 2017 en raison des risques d'attentats.

L’état d’urgence peut être déclaré sur tout ou une partie du territoire. En 2005, lors des émeutes dans les banlieues, il est déclenché dans 25 départements, permettant notamment aux préfets des zones concernées de déclarer des couvre-feux.

"Ce soir, après les appels au calme que tout le monde aura répété (...), je crois que nous constaterons que l'ordre républicain va revenir", a maintenu ce mercredi Gérald Darmanin, en marge d'un déplacement dans le Nord, où plusieurs bâtiments officiels ont été incendiés.

Salomé Robles