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Le "convoi de la liberté" peut-il frapper fort en France ce week-end?

Sur les réseaux sociaux, des groupes rassemblant plusieurs milliers de membres appellent à bloquer l'accès à Paris, s'inspirant de la mobilisation actuelle dans la capitale canadienne Ottawa.

Un mouvement né au Canada pour protester contre l'obligation faite aux routiers d'être vaccinés afin de traverser la frontière américaine s'apprête-t-il à faire des émules en France? Le "convoi de la liberté", qui paralyse depuis 12 jours Ottawa et qui s'est depuis élargi à une multitude de revendications appelant à la fin des mesures de rétorsion face à l'épidémie de Covid-19, connaît en tout cas un fort intérêt dans l'Hexagone, si l'on en croit les réseaux sociaux.

Preuve en est, sur Facebook, le groupe hexagonal "Le convoi de la liberté" rassemble plus de 257.000 membres. L'objectif? Converger ce week-end vers Paris en plusieurs convois composés d'automobilistes et de motards, pour bloquer l'accès à la capitale. Certains proposant même de continuer la route jusqu'à Bruxelles, siège de la plupart des institutions européennes.

Une myriade de profils

Kevin, porte-parole du Bloc Lorrain, "une nébuleuse de personnes d'inspiration anarchiste", selon Guillaume Farde, consultant sécurité pour BFMTV, détaille les revendications de la déclinaison française de ce mouvement.

"C'est similaire au mouvement des gilets jaunes. Il y a différents groupes dans différentes régions. Chacun va faire ce qu'il veut pour bloquer la capitale et faire pression sur le gouvernement", présente-t-il. Leurs préoccupations? "La justice sociale avec la hausse du prix de l'essence, l'obligation déguisée vaccinale... Il va y avoir un petit peu de tout".

Ce vendredi, le rendez-vous a été fixé à 20h à Paris. Sur les réseaux sociaux, les instigateurs du mouvement sont d'anciens gilets jaunes, mais aussi des personnes mobilisées contre le pass sanitaire, puis vaccinal ou récusant les mesures de freinage prises dans le cadre de l'épidémie de Covid-19.

Sur BFMTV, Emmanuelle Anizon, grande reporter à L'Obs, explique qu'on retrouve dans ce mouvement "d'anciens gilets jaunes, qui sont clairement au cœur de cette sphère. Mais aussi des anarchistes, tout ce mouvement anti-pass naturopathe, et simplement des citoyens qui estiment qu'on leur a retiré leurs libertés. Ce qu'on voit, c'est un ensemble de personnes extrêmement différent, que seul rassemble l'objectif de protester".

Un premier convoi interpellé

Et qu'en est-il des routiers? Doit-on s'attendre, comme à Ottawa où ils sont stationnés face au Parlement, à voir des camions bloquer les principales artères parisiennes? Rien n'est moins sûr.

En France, "le 'convoi de la liberté' vise à bloquer les axes routiers. Mais pas avec des camions, parce que le modèle français des routiers n'a rien à voir avec le modèle canadien. Au Canada, ce sont des auto-entrepreneurs, souvent propriétaires de leur véhicule. En France, les routiers ne sont pas propriétaires. Donc récupérer un véhicule qui ne vous appartient pas, un week-end, pour aller vous en servir pour une action manifestement illégale, ça peut vous apporter des ennuis. Ce ne sera probablement pas des routiers, mais d'autres personnes venant avec leur véhicule individuel. C'est plus difficile à anticiper pour les services de renseignement", analyse Guillaume Farde.

"Le délit d'entrave, ça coûte cher. On peut se voir retirer son permis et son permis de travailler", abonde Emmanuelle Anizon.

"Ce week-end sera intéressant" analyse-t-elle, afin de jauger l'ampleur du mouvement. Un premier convoi d'une trentaine de personnes a été interpellé lundi par les forces de l'ordre entre l'Essonne et la Seine-et-Marne.

Pour Guillaume Farde, si l'objectif de ce mouvement est de s'ériger en symbole de la résistance contre le pass vaccinal et les mesures de rétorsion, il pourrait avoir loupé le coche. "Les services de renseignement considèrent que le momentum, c'était l'été dernier, quand les anti-pass sanitaire s'étaient réunis. Une séquence estivale durant laquelle ils n'avaient pas trop réussi à mobiliser ni à recueillir l'assentiment populaire. Les Français ne les ont pas suivis, car c'était les vacances, et car la grande majorité est vaccinée".

"La réponse de l'État sera extrêmement forte"

Interrogé à ce sujet sur BFMTV-RMC ce mardi, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a en tout cas indiqué qu'il "prenait les choses au sérieux".

"Ce qui est certain, c'est que nous mettons les moyens de renseignement et d'action si jamais des gens voulaient bloquer la liberté des uns et des autres", promettant que la "réponse de l'Etat sera extrêmement forte".

Mais pour le ministre, aujourd'hui, il n'y a pas "de renseignements qui nous disent que cela s'organise dans des proportions qui seraient importantes".

De l'autre côté de l'Atlantique, la situation est tendue. Le maire d'Ottawa Jim Watson a indiqué que "ce sont les protestataires qui font la loi. Nous sommes en train de perdre la bataille, nous devons reprendre notre ville". Il a demandé l'envoi de 1800 policiers supplémentaires.

Jules Fresard