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Police-Justice

Guyane: fin d'une expérimentation sur les saisies de cocaïne

Une saisie de drogue en provenance de Guyane en 2004 (Illustration)

Une saisie de drogue en provenance de Guyane en 2004 (Illustration) - FRANCIS ROCHE / DOUANE FRANCAISE / AFP

L'expérimentation voulait éviter l'arrivée de drogue en France, mais les observateurs mettent en doute la procédure.

Une expérimentation classant sans poursuite les saisies de moins de 1,5kg de cocaïne en Guyane, plaque tournante du trafic vers l'Hexagone, ne sera pas prolongée au-delà du 30 septembre, a annoncé mercredi le procureur général de Cayenne Joël Sollier. Le parquet de Cayenne avait mis cette mesure en place le 1er juillet dernier afin de "diminuer la charge" du trafic de stupéfiants sur la chaîne pénale.

"Cette expérience était prévue jusqu'au mois de septembre et s'arrêtera pour l'instant", a déclaré Joël Sollier sur la chaîne Guyane la 1ère.

Pour les quantités de cocaïne jusqu'à 1,5kg, principalement in corpore, c'est-à-dire sous forme d'ovules ingérées par des "mules" en partance pour l'aéroport d'Orly, l'expérimentation consistait à recourir à une "procédure simplifiée" notifiée en "un classement sous condition" de l'affaire, selon un courrier du procureur aux chefs de la police, de la gendarmerie et des douanes.

Une centaine de mules par jour

La personne interpellée devait alors être libérée avec une interdiction de paraître à l'aéroport de Cayenne "pendant six mois" et une "inscription au FPR" (Fichier des personnes recherchées). Entre 1,5 et 4kg, le suspect recevait directement une convocation pour comparaître au tribunal; au-delà de 4kg le trafiquant était présenté au parquet.

"En gros, ils ont été au bout de leur expérimentation. Ils n'ont pas arrêté avant malgré le tollé que ça a créé. Elle avait été mise en œuvre sans consultation avec les élus du territoire", a relevé auprès de l'AFP le député guyanais Davy Rimane.

"L'expérimentation était d'empêcher la drogue d'arriver à Paris, mais elle peut rester en Guyane sans problème. Si la drogue était récupérée, je dirais bravo, mais là non. C'est un échec", a-t-il poursuivi. Selon le procureur général, le "nombre de mules qui étaient dirigées vers les vols Cayenne-Paris" a été évalué "à environ une centaine par jour, répartis sur trois vols quotidiens, soit une bonne trentaine par vol".

Ainsi, plus d'un tiers des flux de cocaïne a été stoppé grâce à cette politique, a rappelé Joël Sollier, concédant toutefois que l'expérimentation n'a pas toujours été "comprise et acceptée".

"Cela ne servait à rien"

Le porte-parole du collectif Trop Violans Yvane Goua, qui mène des actions de prévention contre le phénomène des mules, s'est dit "satisfait" de l'arrêt d'une expérimentation "inappropriée". "Les façons de faire nous alertent", a-t-il regretté, "aucune discussion avec les acteurs autour de cette problématique, aucune réflexion...".

"Cela ne servait à rien, on n'arrêtait pas les mules, on ne saisissait pas la drogue, on n'envoyait aucun message aux protagonistes", conclut-il.

Le procureur général a lui jugé les résultats "inattendus". "Au mois de juin, avant l'expérimentation, notre saisie de cocaïne était de 36kg. En juillet et en août, nous estimons que nous avons prévenu l'embarquement de 2,5 à 3 tonnes de cocaïne parce que nous avons appréhendé 1500 personnes et qu'il y en a autant qui n'ont pas embarqué car elles ne se sont pas présentées à l'aéroport", a-t-il rappelé.

A.A. avec AFP