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Police-Justice

Dutroux s'adresse aux familles de ses victimes: "Rien ne me rendra ma fille", répond le père de Julie

Marc Dutroux lors de son procès en 2004 à Arlon, en Belgique .

Marc Dutroux lors de son procès en 2004 à Arlon, en Belgique . - POOL / AFP

L'avocat du Belge, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, a adressé une lettre aux six victimes de Marc Dutroux. Leurs familles disent "ne pas vouloir" entrer dans son jeu, alors que le criminel espère une libération anticipée pour 2021.

"Rien ne me rendra ma fille." C'est avec colère que les familles des victimes de Marc Dutroux ont réagi à la lecture de la lettre que le criminel belge leur a adressée. L'avocat de ce dernier, Bruno Dayez, a en effet transmis un courrier aux proches des quatre jeunes filles violées et assassinées en 1995 et aux deux autres adolescentes enlevées en 1996 puis retrouvées vivantes, estimant "opportun de faire un pas dans leur [votre] direction".

"Vous serez (sic) le caractère tout à fait impersonnel puisqu'il commence par Madame Mademoiselle, Monsieur. Il n'y a que 6 lettres à envoyer, il aurait déjà pu les personnaliser, mais bon...", rétorque Jean-Denis Lejeune, le père de Julie, une enfant de 8 ans, enlevée en même temps que Mélissa Russo. Toutes deux ont été retrouvées mortes après avoir subi une véritable calvaire.

Dans un message publié sur Facebook, le père de la jeune victime dénonce l'attitude de Marc Dutroux, notamment son absence de réponses à certaines questions que se posent les familles des victimes. "Dutroux m'a envoyé un courrier de 44 pages où il se dédouane de tout, n'est responsable en rien vu que ce ne serait pas lui qui aurait tué Julie et Melissa, qu'il les aurait protégées des méchants, et qu'il ne serait pas responsable de leur mort puisque sa femme Michelle Martin était censée aller les nourrir dans la cache pendant qu'il était en prison. Le pauvre...", ironise Jean-Denis Lejeune.

"Monologue de pervers"

Dans ce courrier, que viennent de recevoir les parents de quatre fillettes assassinées et les deux jeunes femmes également violées qui ont survécu à leur séquestration, Me Bruno Dayez affirme que son client "est prêt à répondre" aux questions qui seraient restées en suspens. Car, assure-t-il, "le procès d'Arlon (en 2004, ndlr) n'a pas livré, loin de là, la réponse à toutes les questions". "Que je sache, on ne s'est pas emmuré dans le silence (...) on n'a n'a pas arrêté de poser nos questions! Mais jamais nous n'avons eu la même version. Chacun des inculpés avait sa propre version et tellement différentes qu'on ne sait qui croire", s'indigne le père de Julie.

"Pendant neuf ans de procédure, les parties civiles n'ont fait que ça, de l'interpeller. Aujourd'hui, il conteste avoir commis certains faits (...), mais lesquels? Pourquoi? Qu'il nous le dise", enrage Me Georges-Henri Beauthier, l'avocat de deux victimes, parlant d'"un monologue de pervers".

Lors de son procès en 2004, Marc Dutroux n'avait exprimé aucun remord pour la mort des quatre jeunes filles et n'avait cessé de scander son innocence. Chacun des accusés avait apporté sa propre version. Le criminel avait été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. Son ex-femme avait écopé de 30 ans de prison. Les deux autres personnes jugées avaient reçu des peines de 20 et 5 ans de prison. Aujourd'hui, l'avocat du "monstre de Charleroi" entend obtenir sa libération anticipée à l'horizon 2021.

"Ma démarche est gagnante"

Et l'avocat de Marc Dutroux ne cache pas que cette lettre datée du 27 août nourrit cette ambition. Dans son courrier, Me Bruno Dayez rappelle en effet qu'une des cinq conditions pour cette libération anticipée concerne "l'attitude du condamné à l'égard des victimes". "Non Monsieur Dayez, je ne rentrerai pas dans votre jeu malgré toute la pommade que vous laissez apparaître dans votre lettre, lui rétorque Jean-Denis Lejeune. Il n'y a pas de place pour le dialogue avec votre client."

"Comme on pouvait s'y attendre, il s'agit d'un coup de publicité majeur d'un avocat avec beaucoup de temps et peu de clients, enrage auprès de La Libre Belgique Jean Lambrecks, le père d'Eefje, morte dans la cache du criminel. C'est un pamphlet dénué de sens. La lettre n'a même pas été traduite. Les coûts pour la traduction sont pour ainsi dire pour nous."

Malgré cette fin de non recevoir adressée par les familles des victimes, l'avocat de Marc Dutroux estime que cet épisode est positif. "De toute façon, ma démarche est gagnante, quelles que soient les réactions, puisque je justifie avoir fait le premier pas". Ne pas donner suite, "c'est la liberté pleine et entière" des victimes, "je n'ai pas à juger", enchaîne-t-il. Pour peaufiner le dossier, l'avocat va désormais s'attaquer à la question de la dangerosité de son client. "C'est la prochaine étape, nous allons demander la désignation d'un collège de psychiatres" pour l'examiner, dit-il à l'AFP.

Justine Chevalier avec AFP