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Police-Justice

Bordeaux: un médecin mis en cause pour des complications après des circoncisions

Un bébé (photo d'illustration)

Un bébé (photo d'illustration) - DIDIER PALLAGES / AFP

Le Centre de Circoncision rituelle de Bordeaux a récemment été pointé du doigt après la mort d'un nourrisson de deux mois. L'un de ses cofondateurs, David A., a été mis en examen dès février 2021.

Un dossier "complexe, sur le fond comme sur la forme". À Bordeaux, plus d'une dizaine de couples dénoncent des complications après des circoncisions pratiquées sur leurs enfants au sein du Centre de Circoncisions Rituelle (CCR) de la ville. Plus précisément, c'est David A., cofondateur de la structure et médecin, qui est accusé d'avoir manqué à la déontologie, rapportent nos confrères de Sud-Ouest.

L'Ordre des médecins de Nouvelle-Aquitaine, auprès de qui plusieurs signalements ont été remontés, estime que ces interventions chirurgicales se sont déroulées dans de mauvaises conditions sanitaires et avec un manque de suivi médical. Mis en examen en février 2021 pour "blessures involontaires" et "mise en danger de la vie d'autrui", David A. a récemment été suspendu de ses fonctions avant de faire appel.

"Quand on est ni chirurgien, ni anesthésiste, ni urologue, on ne pratique ni la chirurgie, ni l'anesthésie, ni l'urologie", plaide Me Pierre Landete, l'un des avocats des parties civiles, auprès de BFMTV.com.

"Douleurs considérables"

Ce dernier représente trois couples distincts dont les enfants sont passés entre les mains de David A. pour leur circoncision. D'après l'avocat, les trois petits garçons sont sortis "gravement blessés" de ces interventions. "Selon les experts nommés par le juge d'instruction, le plus blessé d'entre eux devra même attendre la puberté pour bénéficier de chirurgie réparatrice. Cela cause des douleurs considérables", détaille-t-il.

David A., médecin généraliste bordelais, décide d'ouvrir le CCR de Bordeaux, en 2017. Il se présente également comme un "mohel", c'est-à-dire la personne habilitée à pratiquer la circoncision sur les petits garçons de confession juive. Cependant, si ces opérations sont tolérées hors du système de santé au nom de la libre exercice des cultes, le médecin n'est pas chirurgien.

"Il franchit un seuil qu'il ne devrait pas franchir", estime Me Pierre Landete. "Le nombre d'enfants victimes montre bien que ce médecin ne maîtrise pas la pratique."

Au contraire, pour l'avocat du mis en cause, Me Thibault Soubelet, "ces seules plaintes et critiques ne prouvent pas qu'il est responsable" des complications.

Le médecin peut continuer d'exercer

Suspendu de ses fonctions pour deux ans par la Chambre disciplinaire de l'Ordre des médecins de Nouvelle-Aquitaine le 23 mai dernier, David A. et son avocat ont fait appel de cette décision. "L'appel est suspensif, ce qui veut dire que mon client peut continuer d'exercer en tant que médecin en attendant", détaille Me Thibault Soubelet, contacté par BFMTV.com ce mardi.

Pour chaque cas, la Chambre disciplinaire avait décidé de suspendre pour six mois le médecin. Ces différentes affaires, mises bout à bout, conduisaient à une suspension de deux ans au total.

"C'est très critiquable car cela viole le principe du non-cumul des peines", poursuit le conseil de David A., qui compte sur la jurisprudence pour que la Chambre disciplinaire nationale de l'Ordre, qui devra rendre sa décision en appel, pour revenir sur cette sanction.

Bataille d'experts

"C'est un personnage qui multiplie les procédures" pour échapper aux sanctions, commente de son côté Me Pierre Landete. "Rien ne l'arrête." Pas même la douzaine de familles qui se sont constituées parties civiles, dénonçant des complications suite à des circoncisions pratiquées par le médecin.

Des accusations que le mis en examen nie en bloc. "Il continue de contester les griefs, tant sur l'information aux parents que sur le geste en lui-même et le suivi des enfants", énumère Me Thibault Soubelet. "Un expert en urologie a validé à 100% la prise en charge du docteur David A.. C'est la première fois qu'un expert est objectif dans ce dossier", poursuit-il.

Le 25 mai dernier, c'est dans une autre affaire que le CCR de Bordeaux a été mentionné: un nourrisson de 2 mois est mort quelques heures après une circoncision opérée dans une maison louée par le centre en région bordelaise. Une enquête est en cours pour déterminer si un lien peut être établi entre l'intervention chirurgicale et la mort de l'enfant.

Elisa Fernandez