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Police-Justice

Assassinat de Samuel Paty: la sœur de l'enseignant réclame une commission d'enquête au Sénat

Le président du Sénat Gérard Larcher à Versailles (Yvelines), le 31 mars 2023.

Le président du Sénat Gérard Larcher à Versailles (Yvelines), le 31 mars 2023. - Ludovic Marin

Dans un courrier adressé au président du Sénat Gérard Larcher et au président de la commission des Lois François-Noël Buffet, Mickaëlle Paty demande l'ouverture d'une enquête pour "demander des comptes aux personnes responsables de la mauvaise gestion (et) du traitement erronée de la menace pesant" sur frère.

"Établir les failles de ce drame et de tenter d’en colmater les brèches". C'est en ces termes que Mickaëlle Paty, la sœur de Samuel Paty, a justifié sa demande d'ouverture d'une commission d'enquête parlementaire au Sénat dans un courrier adressé à son président Gérard Larcher et au président de la commission des Lois au Sénat François-Noël Buffet. Un courrier en date du lundi 22 mai que BFMTV a pu consulter.

"Vous qui avez condamné à l’unanimité l’assassinat de Samuel Paty, délaissant votre traditionnel clivage, j’espère que vous agirez aujourd’hui dans le même esprit d’unité", écrit la sœur de l'enseignant assassiné.

Samuel Paty a été décapité le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) par un réfugié russe d'origine tchétchène qui l'accusait d'avoir montré des caricatures de Mahomet à ses élèves.

"Mon frère, Samuel Paty, n’a-t-il pas rempli sa part du contrat social pour que l’État ne lui ait pas assuré sa protection?", écrit Mickaëlle Paty dans son courrier, soulignant "l’inaction des hommes dits 'de bien'" dans cette affaire.

Une volonté de "ne pas faire de vagues" dans cette affaire

Des juges d'instruction antiterroristes ont ordonné la semaine dernière que 14 personnes - dont six mineurs - soient jugées après l'assassinat de l'enseignant.

"La défense de certains prévenus mis en examen se base sur l’absence de réaction des services de protection. Cela est censé démontrer qu’ils ne sont en rien coupables [...] Dans le cas de l’assassinat de mon frère, l’absurdité de cette situation est illustrée par la volonté, en amont, de 'ne pas faire de vagues', générant une minoration des menaces qui pesaient contre mon frère et une absence de protection", écrit la sœur de l'enseignant tué.

"En aval, c’est cette même volonté de 'ne pas faire de vagues' qui finit par donner des arguments de défense à ceux que l’on nomme 'ennemis'", poursuit Mickaëlle Paty, s'indignant de l'absence de protection pour son frère avant son assassinat.

"Demander des comptes"

La famille de Samuel Paty a porté plainte en avril 2022 pour non-empêchement de crime et non-assistance à personne en péril: "il me semble évident qu’il fallait protéger la cible désignée publiquement, sur le fondement d’informations connues de tous le 9 octobre 2020. La descente aux enfers de Samuel aura duré 11 jours, et nul ne pouvait l’ignorer".

"C’est la raison pour laquelle je souhaite solliciter [...] la possibilité de demander des comptes aux personnes responsables de la mauvaise gestion, du traitement erronée de la menace pesant sur mon frère et du défaut de prévoyance qui en a découlé, facteurs qui sont à l’origine de sa mort", développe enfin Mickaëlle Paty.

"Les responsables [...] bien qu’avertis, se sont pourtant abstenus d’agir, ou ont agi d’une manière totalement inefficace eu égard à leurs connaissances, moyens et capacités", écrit-elle enfin.

Mickaëlle Paty rappelle enfin dans son courrier "la nécessité d'établir la vérité sur cette histoire pour éviter effectivement toute récidive [...] L’État ne peut s’affranchir du principe de responsabilité, qui est la base du droit civil, en se créant une immunité de fait".

Hugues Garnier Journaliste BFMTV