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Abayas interdites: ce que l'on sait sur les menaces de mort visant un proviseur à Clermont-Ferrand

Depuis la rentrée, il est interdit pour les élèves de porter ce vêtement considéré comme un signe religieux par l'exécutif. Le père d'une jeune fille est accusé d'avoir menacé de mort et d'égorgement un proviseur alors que sa fille s'était vue refuser l'accès de son lycée pour ce motif.

La garde à vue de l'homme, accusé d'avoir menacé le chef de l'établissement où est scolarisée sa fille, a été levée ce vendredi, a appris BFMTV de source judiciaire. Il aurait proféré des menaces de mort car cette dernière s'est vue refuser l'accès à l'établissement en raison du port d'une tenue jugée non conforme. Il avait été placé en en garde à vue ce jeudi soir à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).

En cette rentrée scolaire, selon la volonté du ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, il est désormais interdit de se présenter en abaya dans les établissements scolaires. Cette robe longue est considérée par le gouvernement comme un signe religieux dérogeant à la loi de 2004 sur la laïcité.

• Des menaces d'égorgement proférées

Le père d'une élève du lycée Ambroise-Brugière a menacé de mort ce jeudi le personnel éducatif qui avait interdit l'entrée à sa fille plus tôt dans la matinée, en raison du port de l'abaya et son refus de le retirer. Quelques minutes après le renvoi, le père a appelé l'établissement "sans doute sous un gros coup d'énervement", raconte le proviseur, victime des menaces au quotidien La Montagne. Il a d'abord eu au téléphone un agent puis le conseiller principal d'éducation (CPE).

"À chacun de ces interlocuteurs, il aurait proféré des menaces de mort qui visaient le proviseur", rapporte La Montagne, qui a révélé l'information.

Contactée par BFMTV, l'académie de Clermont-Ferrand a confirmé ces faits. Selon une source judiciaire à BFMTV, il s'agit notamment de menaces d'égorgement.

• Un entretien avec le père avait eu lieu

L'académie rapporte que depuis la rentrée, la nouvelle règle concernant le port de l'abaya avait été bien acceptée. La situation était calme et sereine, notamment grâce à la mise en place d'un dialogue, selon le proviseur.

Sur les 1300 élèves de l'établissement, le seul point de tension a donc concerné cette élève. Selon le proviseur, un dialogue a été engagé avec elle dès le début de semaine car elle refusait de changer de tenue. Lundi matin, "elle a discuté avec un conseiller principal d'éducation (CPE)" pendant qu'il s'entretenait avec son père afin de faire de la pédagogie autour de cette nouvelle règle. "L'entretien a été tendu mais cordial", souligne le chef d'établissement.

La note de service du ministère de l'Éducation prévoit effectivement une période de dialogue avec les familles et les élèves mais dans un temps resserré, afin qu'elle ne se transforme pas en négociations. Au lendemain de la rentrée des classes, Gabriel Attal faisait état de 298 personnes s'étant présentées avec une abaya en cours. Parmi elles, 67 auraient refusé de retirer le vêtement.

Le mercredi, la jeune fille s'est vue refusée l'entrée à un cours avant de partir se changer. Ce jeudi matin, l’élève s'est à nouveau présentée dans cette tenue jugée non conforme et s'est vue refuser l'entrée.

• Une plainte déposée, le père placé sous contrôle judiciaire

Le proviseur du lycée a porté plainte. Un équipage de police s'est rendu à sa rencontre pour l'accompagner dans ce dépôt de plainte. En outre, un référent Valeurs de la République, rattaché au ministère, est présent dans l'établissement depuis ce jeudi.

Le père de famille, placé en garde à vue jeudi soir, a été relâché ce vendredi. Il sera jugé, devant le tribunal correctionnel à la fin du mois d'octobre pour "menaces en vue d'intimidation sur personne chargée d'une mission de service public". Il a été placé sous contrôle judiciaire jusqu'à cette date.

Un contrôle judiciaire qui lui impose un suivi social, une interdiction de contact avec les victimes, et une interdiction de se présenter aux abords des établissements scolaires du Puy-de-Dôme. 

• Gabriel Attal dénonce "des menaces extrêmement choquantes"

En plus d'avoir reçu le "soutien inconditionnel de sa hiérarchie", notamment de l'académie, le proviseur a été appelé dans l'après-midi ce jeudi par Gabriel Attal directement.

"Ce sont des menaces extrêmement choquantes", a lancé le ministre de l'Éducation nationale au micro de BFMTV.

"J'ai eu le proviseur hier au téléphone, évidemment je l'ai assuré de tout mon soutien, celui du gouvernement, de l'État et plus globalement, je crois, de nos concitoyens face à ces menaces qui sont inadmissibles et inqualifiables", a-t-il assuré.

Il a indiqué que le proviseur visé bénéficierait d'un "accompagnement constant en matière de sécurité: la police nationale sera à ses côtés" et d'un accompagnement juridique.

Laurent Wauquiez a également témoigné l'engagement de l'administration "pour que la décision de l’interdiction de l’abaya soit appliquée". Une équipe de sécurité va être déployée par la région dans l'établissement "afin d’apporter de l’apaisement et de la sécurité".

• Le proviseur affirme que la situation est "apaisée" au lycée

Interviewé par le journal La Montagne, le chef d'établissement a expliqué que "le lycée est apaisé" ce vendredi. "Entouré du conseiller sécurité du recteur, d'un agent de l'équipe mobile de sécurité du rectorat et d'un agent de l'équipe d'accueil renforcé de la Région", il s'est adressé, avant le début des cours, aux enseignants "surpris" par la situation. Ils ont ensuite discuté avec les "élèves" de la classe de la jeune fille.

Un courrier a aussi été envoyé aux parents pour "éviter les non-dits et les rumeurs" et leur expliquer que "cet incident a été immédiatement pris en charge par les différents services de l’Etat, ministère de l’Éducation nationale, police et justice."

Salomé Robles